Actualités de l'histoire

Nous vous évoquions en début de semaine dernière, à l’occasion de la réédition du maître-ouvrage de Jules Maurin, la décision de la Commission nationale de l’informatique et des libertés d’autoriser la mise en ligne des registres de matricule des combattants de la Grande Guerre. On ne peut bien évidemment que se féliciter de cette nouvelle et souligner combien sont réactives les Archives départementales du Pas-de-Calais qui, le jour même, rendaient accessibles leurs archives numérisées.

Pourtant, une semaine après cette importante décision, force est de s’interroger sur l’impact réel d’une telle décision sur la recherche. Si beaucoup de commentateurs, que cela soit sur des sites spécialisés ou sur des forums, ont insisté sur la mise à disposition des documents, bien peu ont envisagé ce qu’il était possible d’en faire. Comme si, au final, les sommes investies dans ce titanesque chantier n’allaient profiter qu’aux généalogistes.

Attaque repoussée ennemie à la grenade. Illustration publiée dans l'illustré Sur le Vif en janvier 1917.

Encore une fois, notre propos n’est pas de jeter la pierre sur telle ou telle communauté, bien au contraire, mais de souligner combien la fabrique de l’histoire est avant tout un processus humain, au sens où indépendamment des considérations technologiques et/ou archivistiques, elle résulte avant toute chose d’un projet intellectuel. Il est en effet assez paradoxal de constater que l’on aborde le centenaire de la Première Guerre mondiale en ne connaissant au final qu’assez peu la composition réelle de l’Armée française, connaissance que permet justement l’étude des registres matricules, comme l’a superbement démontré Jules Maurin.

Tout porte donc à croire que scientifiquement ce centenaire ne s’arrêtera pas avec 1918, ni même avec le centenaire du traité de Versailles ou de la Société des Nations. Il faudra des années pour digérer l’imposante production bibliographique qu’engendre cet anniversaire. Plus encore, ces grands moments de mémoire sont producteurs d’archives au sens où ils font ressortir des placards des familles des documents qui, sans cela, se soustrairaient encore au regard des chercheurs. Quelques perles sortent déjà comme les quatre courriers inédits de Jean Norton Cru révélés par l’excellent blog Sources de la Grande Guerre, mais on peut à s’attendre à bien d’autres merveilles…

Remarquable est à cet égard La grande collecte initiée du 9 au 16 novembre prochain par la Mission du centenaire et Europeana 1914-1918. Curieusement, en Bretagne, seules les Archives départementales des Côtes d’Armor à Saint-Brieuc sont mentionnées comme partenaires de l’opération. Malheureusement, les Archives départementales d’Ille-et-Vilaine ne pourront pas participer à cette opération puisque leur salle de lecture sera fermée du 12 au 15 novembre prochain, pour cause de travaux. L’occasion pour nous de vous rappeler l’appel lancé il y a déjà plusieurs mois par les Archives municipales de Saint-Malo visant à collecter, numériser et mettre en valeur les archives privées de la Première Guerre mondiale.

Documentaire sur la révolte des Bonnets rouges réalisé en partenariat avec Alain Croix.

Enfin, on nous permettra de revenir quelques instants sur l’actualité du week-end et plus particulièrement sur cette écotaxe qui n’en finit pas de faire des vagues. Bien évidemment, il ne nous appartient pas de nous prononcer sur cette décision du gouvernement mais on ne peut qu’être frappé par la résurgence de la mémoire de la révolte des Bonnets rouges dans ce mouvement social. C’est précisément cette réflexion qui est à la base du dernier billet de Benoît Kermoal sur son carnet de recherches Enklask, un article qui permet mettre en perspective l’actualité du moment. Bien souvent la raison d’être de l’histoire…

Erwan LE GALL