La guerre vue de Châteaulin : pommes de terre et artillerie lourde

L’association « Mémoires de Châteaulin » poursuit avec persévérance le travail entamé à l’été 2014 afin de rendre compte, chaque mois, de la manière dont les Châteaulinois, au front comme à l’arrière, ont vécu la Grande Guerre1.

Gabriel Bauguion, devant sa pièce de 305 mm dans la Somme à l'été 1916. Crédits: Châteaulin 14-18.

Les derniers numéros de Châteaulin 14-18 évoquent ainsi, entre autres sujets, la participation du 118e RI (Quimper) à la reprise du fort de Vaux en novembre 1916, la Légion d’honneur attribuée au capitaine Mercier, fils d’une famille de minotiers de la Forest-Landerneau, blessé lors de ces combats ou encore la vie chère. L’hebdomadaire local, Le Bas-Breton, rappelle notamment dans son édition du 30 décembre 1916 que si cette question « depuis de longs mois, est à l’ordre du jour », elle ne « semble pas avoir sensiblement évolué vers un commencement de solution »… « La main d’œuvre diminue dans nos campagnes et malgré les mises en sursis de cultivateurs-soldats et les nombreuses permissions agricoles qu’on leur accorde avec raison, beaucoup de terres restent en friche » déplore le journal. La solution ? La pomme de terre avance le rédacteur, s’appuyant sur ce qui se fait en Allemagne : « c’est la pomme de terre qui fait le cochon et c’est le cochon qui fait le Boche. Tout le secret de la résistance des Empires du centre est là » considère-t-il. Il faudra cependant au journal, en janvier, annoncer la taxation de certaines denrées – beurre, pommes de terre… – et la mise en place de cartes de ravitaillement, pour le sucre notamment.

Châteaulin 14-18 poursuit, par ailleurs, la publication de correspondances de soldats originaires de cette partie du Finistère. Ainsi de celle de Gabriel Bauguion, qui sert dans l’artillerie lourde, ce dont il se félicite – « je me trouve très heureux et très content d’être mis là-dedans » écrit-il dans une lettre du 30 décembre 1916 –, conscient qu’il est d’échapper ainsi à nombre des risques encourus non seulement par les fantassins, mais aussi par les artilleurs de l’artillerie de campagne, bien plus proches du front. Pour lui comme pour d’autres, la nouvelle année est l’occasion de vœux à ses proches : « que 1917 soit plus chanceuse que 1916 écoulée et que ce sera celle de la victoire et de la libération » espère-t-il entre autres. Le 1er janvier surtout, « c’est permis de faire la bombe » se réjouit-il : « on a acheté entre nous une bouteille de rhum et je t’assure qu’on va faire la bombe » écrit-il à son épouse ce jour-là.

A cette correspondance suivie chaque mois ou presque depuis 2014 – ou 1914… –, s’en ajoutent d’autres, celle de François Le Scao, qui sert dans un régiment de cuirassiers, et meurt de tuberculose en mars 1917, une maladie dans son cas sans lien avec le service, ce qui ne lui permet pas d’obtenir la mention de « mort pour la France », ou encore les lettres de Louis Gourmelon, affecté quant à lui dans une usine de Saint-Chamond, dans la Loire, bien loin du front et de ses dangers.
On mesure, à travers ces quelques exemples, toute la richesse et la diversité de cette publication qui en est à son 32e numéro.

Yann LAGADEC

 

 

1 Pour s’abonner, écrire à : memoires.chateaulin@laposte.net