DPLA et BZH
Le Gallica US, la Digital Public Library of America, vient d’ouvrir ses portes ! Il était donc naturel que la rédaction d’En Envor teste cette nouvelle plateforme et essaye de voir en quoi cet outil peut intéresser l’histoire de la Bretagne contemporaine.
Autant le dire de suite, cet article ne prétend aucunement à l’exhaustivité et n’imagine pas faire le tour d’un site aussi vaste en seulement quelques clics. Néanmoins, les quelques heures passées à surfer dans cette bibliothèque numérique suffisent à apprécier le confort d’utilisation ainsi que l’interface agréable et souple.
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Il faut bien l’avouer, on se sent un peu désemparé face à un tel outil surtout lorsque, et c’est précisément le cas aujourd’hui, on ne cherche rien de particulier si ce n’est essayer de voir ce que « la bête a dans le ventre ». De facto, la comparaison est déloyale vis-à-vis de Gallica où non seulement on a nos repères mais où, de plus, on sait la plupart du temps précisément ce que l’on vient chercher. C’est donc un petit peu hésitant que j’ai tapé mon premier mot sur le moteur de recherche, Brittany, craignant de tomber sur une succession d’entrées concernant le Royaume-Uni et me consolant d’avance en me disant que de toute manière, le premier essai ne compte pas. Manque de chance, la première vignette à apparaitre est celle d’une photographie de Carhaix prise dans les années 1900, cliché sur plaque de verre conservé au Smithsonian Institute. En sélectionnant uniquement les données iconographiques, on obtient une petite cinquantaine d’images représentant Quimperle, Crac’h, Josselin… Au final les données collectées sont très variées et mêlent textes, photographies, gravures, peintures ou même objets, certains remontant à la préhistoire comme des têtes de flèche en pierre. Les provenances sont variées (université mormone de Brigham Young, Kentucky University, Smithsonian Institute…), la Digital Public Library of America jouant le rôle de méta-structure reliant entre elles des centaines de bibliothèques digitales.
Deuxième essai avec cette fois-ci Saint-Malo. Cette recherche est là moins concluante, le nombre de résultats étant beaucoup moins important et comportant de surcroît de nombreuses erreurs (Saint-Severin au lieu de Saint-Servan, Saint-Malo en … Normandie !). S’en suit une légère déception qu’on pondère rapidement en se disant qu’en interrogeant Gallica avec un bourg du fin fond du Nebraska les résultats ne doivent pas, non plus, être faramineux. Aussi il n’y a sans doute rien d’étonnant à ce qu’une sous-préfecture du Finistère renvoie à la ville de Brest-Litovsk en Russie.
Pour celles et ceux qui, comme moi, ne savent pas réellement quoi chercher dans cette bibliothèque numérique, il convient de mentionner une très intéressante timeline qui permet, d’une manière très ludique, de sélectionner les items par rapport à une date. Une méthode qui, gageons-le, ravira le grand public mais décontenancera sans doute les chercheurs, plus habitués à interroger les bases de donnée suivant des entrées précises.
On apprécie également le lien entre la Digital Public Library of America et Europeana qui, à terme, promet de constituer une base de données particulièrement intéressante. On remarque de même que la DPLA compte sur l’activité de ses plus fidèles lecteurs puisqu’un service d’indexation collaborative est mis en place. Celui-ci devrait à terme s’avérer particulièrement utile dans le cadre de la recherche par lieux, disponible à partir d’un beau planisphère, outil d’une intuitivité absolument remarquable.
Le site présente enfin une série d’expositions virtuelles très réussies, dont une consacrée à la prohibition, qu’En Envor a évoqué il y a peu, ainsi qu’une autre, particulièrement intéressante, traitant de l’activisme aux Etats-Unis. Les documents sélectionnés sont variés, particulièrement instructifs, et devraient ravir les enseignants.
Pour celles et ceux qui s’intéressent à l’histoire de la Bretagne contemporaine, cette Digital Public Library of America est bien entendu une excellente nouvelle tant elle va rapidement – gageons-le – s’imposer comme un outil indispensable. En effet, qui pouvait il n’y a ne serait-ce que quelques semaines savoir que la Basque Librairy de l’Université du Nevada à Reno possédait des documents relatifs à l’histoire de la Bretagne ? Sans doute bien peu. Cet outil permet d’interroger des centaines de bibliothèques numériques en une seule fois et d’obtenir par conséquent des résultats à la hauteur de cette mise en réseau. Mais une telle médaille à également son revers, celui d’un trop plein de sources qui, au final, peut contribuer à noyer le chercheur et empêche la réflexion. Là encore, il convient donc d’être particulièrement vigilent et de savoir prendre son temps, celui de la constitution du corpus mais aussi, et peut-être même surtout, celui de la réflexion, de l’analyse critique de la documentation, bref le temps qui fait l’essence même de l’histoire en tant que science sociale.
Erwan LE GALL
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