Brest revisite Pierre Mac Orlan

Brest propose à partir du 27 septembre prochain, et ce jusqu’au 13 novembre 2013, de revisiter un grand écrivain qui, s’il n’est pas Breton, a beaucoup écrit sur la Bretagne : Pierre Mac Orlan. En témoignent par exemple son Ancre de miséricorde ou encore son Chant de l’équipage, deux excellents romans qui se passent en Bretagne.

Aujourd’hui injustement méconnu, Pierre Mac Orlan, est né Pierre Dumarchey en 1882 à Peronne, dans la Somme. C’est d’ailleurs, là que, mobilisé, il est blessé en 1916. Pierre Mac Orlan compte parmi ses écrivains aujourd’hui tombés dans une certaine désuétude, à l’instar d’un Roger Vercel ou d’un Henry de Monfreid. C’est ainsi que Pierre Assouline se demande, d’une plume acide mais pourtant non dénuée de réalisme, « qui a lu un livre de Pierre Mac Orlan depuis ses jeunes années ? ». Cruel, le constat n’en est pas moins pertinent. Il est vrai que l’œuvre de Mac Orlan est en grande partie basée sur une vision singulière du voyage et qu’elle est écrite à une époque où les compagnies low cost n’offrent pas de billets à 15€ pour parcourir le monde. Sans doute est-ce ce décalage qui nuit tant à une œuvre dense, riche et par bien des égards fascinante (à titre personnel, je vous conseille L’Ancre de miséricorde : une petite merveille dont l’action se déroule d’ailleurs à Brest).

Deux raisons paraissent tout particulièrement devoir inciter à (re)découvrir cet auteur. Tout d’abord, Pierre Mac Orlan est une grande figure du monde intellectuel, se liant aussi bien d’amitié avec les peintres Maurice de Vlaminck ou Picasso qu’avec des écrivains tels que Roland Dorgelès ou Max Jacob. Au tournant des années 1910, il fréquente ainsi assidument Pont-Aven, épicentre renommé d’une école de peinture dont les têtes d’affiche sont Paul Gauguin et Paul Sérusier. Il siège également pendant 20 ans au sein du jury du prix Goncourt, véritable faiseur de rois des lettres françaises.

Pourtant, loin des salons et de l’avant-garde des arts et lettres, c’est une Bretagne interlope que permet de visiter Mac Orlan, celle des docks et des bars à matelots enfumés. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si son Quai des brumes, qui se passe non pas en Bretagne mais au Havre,  donne lieu à un grand classique du cinéma français.

On ne peut donc que saluer l’initiative de la ville de Brest qui tente de (re)faire découvrir au grand public l’œuvre de Mac Orlan, au moyen d’une belle exposition qui se tient à la bien nommée salle de spectacle Mac Orlan, dans le quartier de Recouvrance. S’y ajoutent plusieurs animations spécifiques proposées par les bibliothèques de la ville ainsi qu’un concert exceptionnel d’Arnaud Le Gouëffec et John Trap, artistes qui puisent l’inspiration de leur musique électronique dans l’œuvre de Pierre Mac Orlan, qui fut également parolier pour, entre autres, Juliette Gréco. Bref, un ensemble de manifestations à ne pas manquer pour qui aime la Bretagne et la littérature !

Erwan LE GALL