Pour une histoire des entreprises : le registre du commerce et le registre/répertoire des métiers

Faire l’histoire d’une société n’est pas une simple affaire. Et pour cause, l’essentiel des documents qui y sont produits appartiennent à l’entreprise. Certes, dans de rares cas, les archives sont mises à disposition des chercheurs soit directement par l'établissement, soit par l’intermédiaire d’un musée, ou encore par le biais d’un dépôt d’Archives (fonds privés)1. Mais il existe d’autres moyens qui permettent, pour partie, de contourner ces difficultés. C’est notamment le cas des fonds des tribunaux de commerce et plus particulièrement du registre du commerce et des sociétés.

Carte postale. Collection particuilère.

Ce dernier est créé par la loi du 18 mars 1919 et l'arrêté du 22 mars 1920. Toute personne exerçant une activité commerciale ou industrielle est désormais obligée de s’immatriculer afin que l’administration puisse à tout moment vérifier l'existence de la société. Le registre permet en effet de centraliser toutes les informations légales des commerçants (état civil, activité exercée, modifications de l’activité).

La manipulation du registre est assez simple, à condition qu’il soit communicable2. Il se présente sous la forme d’un fichier alphabétique dont les éléments renvoient aux registres analytiques et aux dossiers individuels (immatriculations, inscriptions modificatives, radiations, éventuellement des pièces justificatives). La plus grande difficulté est en réalité de savoir qui on cherche. Et pour cause, sans le nom du commerçant ou son numéro d’immatriculation, il devient vite fastidieux de s’y retrouver. S’il existe bien un fichier géographique (pour retrouver une société à partir du nom d’une rue) et un  fichier chronologique dans chaque tribunal de commerce, ils ne sont pas toujours conservés dans les dépôts d’Archives départementales3.

A partir de 1936, le registre connaît une légère modification. Si pour les commerçants rien ne change, désormais, les artisans sont enregistrés dans le registre des métiers. On y trouve sensiblement les mêmes informations (état civil, nature de l’activité, nombre d’employés, brevets d'inventions, marques de fabrique...). La procédure de recherche est similaire et ce, même après le 1er mars 1962, date à laquelle le décret 62-235 transfère la tenue du répertoire (et non plus le registre) des métiers aux chambres des métiers.

Pourtant, derrière cette simplicité évidente, il y a une subtilité qu’il nous paraît utile de préciser. Lorsque l’arrondissement judiciaire ne possède pas de tribunal de commerce, les sociétés doivent s’immatriculer auprès du greffe commercial siégeant au tribunal de première instance. Ce faisant, les archives sont conservées dans les fonds de ces derniers tribunaux. Pour être clair, prenons l’exemple concret du Morbihan. Jusqu’en 1958, il y a quatre ressorts judiciaires à savoir Vannes, Lorient, Ploërmel et Pontivy. Or, seuls les deux premiers possèdent un tribunal de commerce. Les sociétés souhaitant se faire inscrire dans les ressorts de Ploërmel et Pontivy doivent alors se faire immatriculer auprès du tribunal de première instance.

Courrier à en-tête d'une entreprise des Côtes-du-Nord. Collection particulière.

Pour aller plus loin, nous pouvons également conseiller la consultation d'autres sources susceptibles d'apporter des éléments complémentaires sur les entreprises. Signalons ainsi :

  1. les annuaires.
  2. les actes de sociétés, les dossiers de faillites, les dossiers de liquidations judiciaires et les jugements des litiges (fonds des tribunaux de commerce).
  3. les actes de sociétés (fonds des justices de paix).
  4. les dossiers d'installations classées (fonds de la préfecture).
  5. les diverses sources fiscales (cadastre, enregistrement).

Yves-Marie EVANNO

 

1 On peut citer deux exemples. Les archives des Forges d’Hennebont, dans le Morbihan, sont consultables à l’écomusée des Forges. Quant aux archives de la biscuiterie LU, elles sont disponibles pour la période fin 19e / mi 20e siècle aux Archives départementales de Loire-Atlantique  sous les cotes 118 J et 202 J.

2 Si les fiches alphabétiques sont immédiatement communicables, les dossiers individuels ne le sont qu’après 75 ans (en raison de la présence d’actes notariés et d’état-civil), sauf en cas de dérogation.

3 Précisons par exemple que les fichiers géographiques des tribunaux de Vannes et Lorient sont conservés aux Archives départementales du Morbihan, à la différence des fichiers chronologiques.