Yves Le Foll, une figure bretonne du PSU

S’il est un maire de Saint-Brieuc dont la mémoire locale n’est pas prête de s’éteindre, c’est bien Yves Le Foll. Né en 1912 dans une famille modeste des Monts d’Arrée, il doit à son statut de pupille de la Nation la possibilité de faire des études, à l’école normale d’instituteurs de Quimper d’abord, à l'École normale supérieure de l'enseignement technique de Cachan ensuite. Sa rencontre avec la préfecture des Côtes-du-Nord se fait au gré d’une nomination en tant que professeur de mathématiques au lycée technique Curie1. Etablissement au sein duquel il devient par la suite le censeur, soit le proviseur-adjoint de nos jours.

Au centre, Yves Le Foll (1957). Archives municipales de Saint-Brieuc.

Mais bien au-delà de sa carrière d’enseignant, c’est son militantisme qui lie Yves Le Foll à Saint-Brieuc. Un engagement politique solidement ancré à gauche depuis les années 1930. Il participe notamment à  la « manifestation antifasciste du 12 février 1934 ». Au cours d’une interview-portrait diffusée à la télévision régionale le 16 janvier 1983,  à l’aube de sa carrière politique, il raconte que sa rencontre avec le professeur de français et écrivain Jean Guéhenno – par ailleurs originaire de Fougères – a largement « orienté » sa conscience politique. Un engagement à gauche qu’il traduit en adhérant à la SFIO, ses désaccords avec « le régime soviétique » lui interdisant de prendre sa carte au Parti communiste.

A la fin des années 1950, ce sont des désaccords avec la politique algérienne de Guy Mollet qui éloignent Yves Le Foll de la SFIO. Il participe alors à l’aventure du Parti socialiste unifié (PSU), comme de nombreux élus socialistes du département. Il devient un proche de Michel Rocard, des mains duquel il reçoit la Légion d’honneur en 1982. En réponse aux journalistes, Le Foll rejette les termes de « deuxième gauche », « nouvelle gauche » ou « d’autre gauche » pour qualifier le PSU. Il ne veut y voir que des sensibilités différentes du socialisme. Mais il est vrai que l’on est alors en 1983, la gauche est au pouvoir sous la présidence de François Mitterrand. Il est important de faire bloc derrière le gouvernement… Toujours selon lui, les deux seules options différentes à gauche sont le socialisme ou le communisme.

En 1962, Yves Le Foll devient conseiller municipal dans l’équipe du maire PSU Antoine Mazier, jusqu’au décès de ce dernier le 6 décembre 1964. Aux élections municipales qui suivent, Le Foll conduit la liste d’Union de la gauche et devient le nouveau maire briochin avec 51,5% des voix. En 1967, il remporte les élections législatives face au gaulliste Robert Richet. Un court mandat, puisque le général de Gaulle dissout l’Assemblée nationale à la suite des événements de mai 1968. Un poste de député qu’il retrouve par la suite entre 1973 et 1978. Il est alors le seul député PSU en France. Sur le plan municipal, il remporte également les scrutins de 1971 et de 1977. Une carrière électorale qui s’achève par sa volonté, lorsqu’il rend tous ses mandats lors des élections municipales de 1983.

L'hôpital Yves Le Foll. Centre hospitalier de Saint-Brieuc.

La carrière politique d’Yves Le Foll a été marquée par de nombreux  événements survenus dans sa ville de Saint-Brieuc. Dans la nuit du 27 au 28 avril 1968, une bombe placée par deux militants du F.L.B. détruit les garages de la caserne de la CRS 13. Des militants nationalistes bretons qui commettent de nouveaux attentats : au Palais de Justice dans la nuit du 18 au 19 décembre 1975, puis à la Banque de France dans la nuit de 29 au 30 mai 1977. La grève du Joint Français, qui dure du 13 mars au 8 mai 1972, marque également profondément l’histoire de la préfecture des Côtes-du-Nord à cette époque. Le conflit social a un retentissement national et reçoit le soutien de nombreux artistes. Le maire Yves Le Foll défile auprès des ouvriers pour soutenir cette grève. Elle est pour lui l’expression « d’un rejet de l’exploitation de la main d’œuvre à bon marché » (12’55’’).

A Saint-Brieuc, son action municipale se lit également dans la réfection et la piétonisation d’une partie du centre-ville, avec entre autres la construction des nouvelles halles. Entre 1976 et 1983, un viaduc routier de 524 mètres de longueur est construit au-dessus de la vallée du Gouët. Il lance également la construction d’un nouvel hôpital public pour remplacer celui des Capucins. L’hôpital de la Bauchée est inauguré en 1979. Depuis 1998, année du décès d’Yves Le Foll, il porte le nom de son fondateur.

Thomas PERRONO

 

1 L’établissement n’existe plus de nos jours. Il était situé au 4, rue Curie. Les locaux abritent désormais une école maternelle.