Faire face aux épidémies hivernales au début du XXe siècle

L’hiver ne va jamais sans son triptyque : froid, pluie et goutte au nez. Les maladies hivernales sont sur toutes les lèvres et la presse ne rate jamais l’occasion de traiter ce fiévreux marronnier. Il en est ainsi de L’Ouest-Eclair, en ce lendemain de Noël 1902 : « Comment éviter toutes ces vilaines maladies provoquées par le froid, depuis le désagréable coryza et les engelures, jusqu’à la foudroyante congestion qui pardonne si rarement ? »1

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« Ce n’est rien, il est grippé », une « croyance populaire », qui vaut aussi bien en 1916 qu’un siècle plus tard, fait de cette maladie un simple désagrément hivernal qui nous oblige à tenir le lit pendant quelques jours. Pourtant, « il s’agit, pour nous, médecins, d’une affection qui n’est jamais sans gravité ».2 D’autant plus si la contagion est tellement forte qu’elle crée une épidémie. Comme en décembre 1902, alors que la ville de Vitré est en émoi : il y a une « épidémie au 70e [régiment d’infanterie] ».3 Les soldats malades sont si nombreux que « tous les lits de l’hôpital militaire sont occupés et [que certains] ont été évacués […] sur les hôpitaux militaires de Rennes ». L’inquiétude gagne la population vitréenne : « une nouvelle épidémie éclate à la caserne et menace même, dit-on, la ville ». Les autorités militaires tentent de rassurer en parlant de « grippe », mais on craint que quelques cas de typhoïde ne se soient également produits. En outre, puisqu’on est alors au cœur de l’hiver, il est impossible de mettre le régiment en quarantaine au camp de la Lande d’Ouée, sur la commune de Saint-Aubin-du-Cormier, comme ce fut le cas un été, « il y a quelques années ». Il faut dire que les Vitréens ont déjà subis les affres d’une épidémie de typhoïde, due à une mauvaise qualité de l’eau du réseau municipal.

L’hygiène : voilà le principal remède aux maladies hivernales, au-delà des remèdes miracles vantés dans les journaux comme l’Aniodol – « le seul antiseptique possédant cette propriété de tuer les microbes et de fortifier en même temps la cellule, après l’avoir libérée des hôtes qui l’infectaient » – ou des « poudres de Cock »4 garanties pour soigner – entre autres ! – la gastro-entérite. Cette dernière maladie est, par ailleurs, responsable à elle-seule de plus de la moitié de la mortalité infantile à Rennes : 95 des 184 décès de nourrissons pour l’année 1901.5 A en croire le journal rennais, il existerait même une « hygiène du froid ».6 Il « est excellent pour les organismes sains : le sang circule avec force ; l’appétit est augmenté ; l’estomac digère bien ». Le sommeil également, « plus long qu’en été, vous donne de nouvelles forces pour lutter contre les microbes ».

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Une fois les frimas de l’hiver éloigné, vous pensez être tranquille ? Que nenni ! vous répond l’édition du 11 juin 1925 de L’Ouest-Eclair : « Méfiez-vous de la chaleur ».7 Alors qu’une « vague de chaleur […] vient de déferler sur la France […] les pauvres humains vont pâtir […] de troubles gastro-intestinaux ». Il n’y a décidément plus de saisons, même pour les microbes…

Thomas PERRONO

 

 

1 BNF-Gallica. « Les cruautés du thermomètre », L’Ouest-Eclair, 26 décembre 1902, en ligne.

2 BNF-Gallica. « La grippe », L’Ouest-Eclair, 15 décembre 1916, en ligne.

3 BNF-Gallica. « A propos d’une épidémie », L’Ouest-Eclair, 26 décembre 1902, en ligne.

4 BNF-Gallica. « Les maladies d’estomac », L’Ouest-Eclair, 8 décembre 1910, en ligne.

5 BNF-Gallica. « L’indigence à Rennes », L’Ouest-Eclair, 12 janvier 1902, en ligne.

6 BNF-Gallica. « Les cruautés du thermomètre », art. cit.

7 BNF-Gallica. « Défiez-vous… Méfiez-vous de la chaleur », L’Ouest-Eclair, 11 juin 1925, en ligne.