Louis Le Faucheur n’est plus

Nous venons d’apprendre aujourd’hui le décès de Louis Le Faucheur, figure de la Résistance bretonne et survivant du camp de Neuengamme. Très affecté par sa disparition, le cabinet d’ingénierie mémorielle et culturelle En Envor s’associe au deuil de sa famille et la prie de bien vouloir recevoir par la présente ses plus sincères condoléances. Nous avons eu la chance de le connaître, et c’est là un honneur que nous n’oublierons jamais.

Né en novembre 1925 à Plérin, Louis Le Faucheur suit sa scolarité au Lycée Anatole Le Braz de Saint-Brieuc, un établissement où quelques élèves ont monté un actif groupe de Résistance affilié aux FUJP (Forces unies de la jeunesse patriotique). Ayant intégré l’organisation clandestine, il se livre à de la propagande en distribuant tracts et journaux, collant quelques affiches ou peignant des inscriptions séditieuses sur les murs. Il participe également à quelques sabotages, notamment sur du matériel militaire ennemi.

Louis Le Faucheur est arrêté le 10 décembre 1943, en même temps que 18 autres compagnons d’armes du Lycée Anatole Le Braz, sur dénonciation. Tandis que Pierre Le Cornec, Yves Salaün et Georges Geffroy sont fusillés au Mont Valérien, en banlieue parisienne, Louis Le Faucheur est incarcéré avec 8 camarades à Saint-Brieuc.

Le 2 mai 1944, soit à peine un mois avant le débarquement de Normandie, les 9 adolescents sont transférés, enchaînés deux par deux, au camp de Royallieu à Compiègne, prélude à leur déportation par mesure de répression à Neuengamme, gigantesque camp de la mort nazi situé au nord de l'Allemagne. Le 30 mai 1944, Louis Le Faucheur est envoyé avec six de ses amis du Lycée Le Braz du camp central à Fallersleben, kommando de Neuengamme où les déportés sont réduits en esclavage au profit de la firme Volkswagen.

Dans la cour du Lycée Le Braz, une statue rappelle aux élèves et aux professeurs le martyr de Louis Le Faucheur et des lycéens arrêtés par les nazis. Collection privée.

Les conditions sont tout simplement inhumaines mais les sept Lycéens tiennent bon. Le 7 avril 1945, devant l’avancée des troupes alliées, le kommando est évacué, les déportés étant entassés à 120 par wagons. C’est le début d’une folle errance qui ne s’achève qu’au bout d’une semaine dans le camp de Wöbelin, sur les bords de l’Elbe. Ce n’est que le 2 mai 1945 que le camp est libéré par des troupes de la 82e division aéroportée américaine.

Rapatrié dans des conditions d’affaiblissement extrême, Louis Le Faucheur arrive au Lutétia le 18 mai 1945 puis, le lendemain, prend le train gare Montparnasse pour rentrer chez lui, à Saint-Brieuc.

De par son parcours, Louis Le Faucheur est l'illustration même de la sévérité impitoyable de la répression exercée conjointement par Vichy et l'occuppant en Bretagne pendant la Seconde Guerre mondiale.

Très affaibli, Louis Le Faucheur ne peut reprendre qu’en 1947 le cours de ses études, en s’inscrivant notamment à la faculté de Lettres de Rennes. Il exerce ensuite le métier de professeur avant de prendre sa retraite, avec son épouse, à Saint-Laurent-sur-Mer. Louis Le Faucheur était le frère d’Yves Le Faucheur, ancien maire de Plérin.

Le mois de mars 2013 est décidément terrible pour la Résistance bretonne, déjà durement éprouvée par le récent décès de Maurice Delarue.

Erwan LE GALL

Sources : KLEIN, Pierre et Marie-Pierre, Les Déportés des Côtes-du-Nord, Avril 1941-Septembre 1944, Lanvallay, 2007, p. 256-257.