A propos du patrimoine sanitaire

« En Bretagne, le patrimoine lié à la science et à la santé demeure encore largement méconnu. Peu étudié, perçu comme trop récent, trop technique ou peu spectaculaire, il est éclipsé par un patrimoine plus classique et plus familier, églises, chapelles et châteaux » (avant propos, p. 7)1. Tout est dit de l’ambition et de l’intérêt de ce petit livre écrit par deux spécialistes du patrimoine, qui veulent faire partager leur passion pour ces traces d’une activité singulière qui a ses prolongements avec la station biologique de Roscoff dont on rappelle la croissance continue depuis 1872 avec successivement son histoire (p. 14-17), son évolution spatiale et architecturale (p. 18-21) et ses riches collections présentées autour d’artistes parfois prestigieux comme Mathurin Méheut (p. 22-23). On peut néanmoins regretter la faible place accordée aux collections techniques (juste une photo de microscope et quelques lignes p. 23), qui ne fait que renforcer le constat initial.

Carte postale. Collection particulière.

Les établissements de santé sont nombreux sur la côté et leur densité est remarquable. Au-delà des notices très documentées, il est frappant de voir combien il y a une spécialisation à partir de deux établissements novateurs. Tout d’abord, un pionnier de la thalassothérapie, Louis Bagot, fait construire un Institut marin en 1902. Il utilise un établissement congréganiste, la Maison Saint-Luc, comme lieu de résidence pour les curistes. A la pointe de l’innovation dans les traitements il dispose d'une renommée solidement établie sur le plan national. La Maison-Saint Luc est d’ailleurs encore aujourd’hui un établissement de rééducation fonctionnelle.

D’autre part, le sanatorium héliomarin de Perharidy, lui aussi toujours en activité, structure un autre pôle médical. Initiative privée de Mme de Kergariou pour traiter les enfants atteints de tuberculose, il est construit au tout début du XXe siècle. Une résidence balnéaire, le château du Laber, devient en 1915, sous l’égide des Hôpitaux de Paris qui en ont hérité, un préventorium annexe au sanatorium. Autre annexe de ce même établissement, la clinique du Laber est construite dans les années 1920 pour accueillir une clientèle féminine aisée. Enfin, la villa Kerléna est transformée en 1920 en clinique pour traiter une forme particulière de tuberculose. Agrandie dans les années 1930, elle devient un sanatorium à part entière. Roscoff s’affirme ainsi comme un important centre de traitement de la tuberculose à l’échelle nationale.

Carte postale. Collection particulière.

On notera la grande qualité de l’architecture de ces établissements, bien représentatifs des conceptions de leur époque. Les magnifiques mosaïques d’Isidore Odorico, un artiste rennais, du sanatorium de Parharidy présentées pages 54-56 en sont une parfaite illustration. L’architecture balnéaire associée à ces activités, fait l’objet d’une rapide évocation (p. 24-26). A la fin de l’ouvrage, un itinéraire de découverte permet même d’organiser une visite de ces lieux d’exception.

Le petit format de ce volume (12 X 22) est pratique car il peut aisément se mettre dans la poche. Cependant, certaines photos auraient mérité de plus larges dimensions pour restituer de manière plus lisible les détails qui font tout l’intérêt de ces documents, en particulier les cartes postales et photos anciennes. Quoi qu’il en soit ce petit livre comblera la curiosité des amateurs de patrimoine technique. Il en appelle d’autres pour une connaissance plus large d’une histoire dont les vestiges contribuent largement à l’identité de Roscoff.

Jérôme CUCARULL

DOUARD Christel et GUESNIER Valérie, Recherche, santé et patrimoine à Roscoff, Rennes, Apogée, 2014.

 

 

1 DOUARD Christel et GUESNIER Valérie, Recherche, santé et patrimoine à Roscoff, Rennes, Apogée, 2014. Afin de ne pas surcharger inutilement l’appareil critique, les références à cet ouvrage seront dorénavant indiquées dans le corps de texte, entre parenthèses.