Un cabinet de merveilles
Il est en plein cœur de Rennes, niché dans un sous-sol de l’Hôtel-Dieu, un endroit absolument magique fait pour toutes celles et ceux qui rêvent de tenir un scalpel datant du XIXe siècle entre les mains ou de contempler les dizaines de bocaux qui pouvaient consteller les rayonnages des pharmaciens bretons des années 1930 : le Conservatoire du patrimoine hospitalier. Accueillis par une équipe de bénévoles aussi passionnés que passionnants, vous pourrez ainsi vous saisir de ces objets et vous imaginer, l’espace de quelques instants, dans la peau d’un dentiste du Faouet à la Belle époque ou dans celle d’un chirurgien rennais du début des années 1950. Pour les autres, c’est-à-dire les personnes dont la fibre médicale est peut-être moins chevillée au corps, pas d’inquiétude ! Ce conservatoire est non seulement une véritable caverne d’Ali Baba mais surtout un remarquable outil pédagogique permettant de s’initier à l’histoire de la médecine, tant du point de vue des docteurs que des patients.
Ce faisant, deux éléments frappent le visiteur peu au fait des questions médicales. Le premier, élémentaire mais que l’on peut réellement toucher du doigt dans ce Conservatoire, concerne les incontestables progrès effectués au cours des deux derniers siècles. Revenons quelques instants à notre fameux scalpel du XIXe siècle. Si la lame ne contraste probablement pas énormément avec les ustensiles utilisés aujourd’hui en bloc opératoire, que dire du manche en écaille de tortue ? Si un tel matériau choque aujourd’hui, c’est moins du fait de son éco-irresponsabilité que parce qu’il empêche toute stérilisation. De la même manière, saisissants sont les progrès effectués par la chirurgie cardiaque, évolution qui s’incarne notamment par une fantastique collection de pacemakers permettant d’appréhender leur constante miniaturisation.
En déambulant parmi les merveilles de ce conservatoire, vous réaliserez combien l’histoire de la médecine est connectée et, par définition, internationale. Pour s’en convaincre, il n’est qu’à déchiffrer les inscriptions « Made in USA » apposées sur un grand nombre de matériels médicaux. Mais cette suprématie américaine ne se limite pas uniquement à une avancée technologique. C’est ce que rappelle cette table d’opération apportée à l’Hôtel-Dieu par les Américains en 1944 : en effet, elle servira après la Libération pendant une vingtaine d’année dans ce même hôpital.
Enfin, il y a un élément qui ne manque pas de marquer les visiteurs, c’est la dimension esthétique de ce qui est entreposé dans ce conservatoire. A moins encore une fois d’être passionné par la chose médicale, ce qui est loin d’être le cas de l’auteur des présentes lignes qui serait au contraire plutôt phobique de tout ce qui est en rapport avec le corps humain, on se prend à réprimer quelques sourires en début de visite lorsqu’on entend les bénévoles nous vanter la beauté de tel ou tel ustensile. Et puis, au fur et à mesure de la visite, l’œil opère une sorte d’acculturation et tombe lui aussi sous le charme du matériel des laborantins, du cuivre rutilant des autoclaves, du design épuré d’une prothèse orthopédique ou encore la rusticité effrayante d’une seringue de la fin du XIXe siècle et finit par concéder que oui, sans aucune doute, tous ces objets sont beaux.
En définitive, nous ne saurions trop inviter nos lecteurs à aller visiter ce remarquable conservatoire qui, au-delà de l’indéniable valeur patrimoniale des objets qui y sont exposés, est un magnifique outil pédagogique. On se permettra d’insister d’ailleurs sur ce dernier point en soulignant le travail d’inventaire que font les équipes de bénévoles afin de recenser les matériels mais également de collecter leur histoire, effectuant par la même occasion une belle enquête d’ethnologie des professions de santé en Bretagne. On insistera enfin sur les nombreux ouvrages et quelques archives encore inexploitées qui font de ce conservatoire un lieu assurément unique, et pas uniquement pour les passionnés d’histoire de la médecine.
Erwan LE GALL
Informations pratiques:
2, rue de l’Hôtel-Dieu, CS 26419, 35 064 Rennes Cedex. Ligne de bus n° 8 – arrêt rue de Saint Malo : Square de la Rance. Arrêt métro le plus proche : Place Sainte Anne. Permanences tous les jeudis de 14 à 17 h. Ateliers tous les mardis et mercredis de 14 à 17 h (sauf juillet et août). Possibilités de rencontres sur rendez-vous.
Téléphone : 06 63 02 57 42
Courriel : conservatoire@cphr.fr
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