5 questions à Matthieu Boisdron et Michel Catala à propos d’un prochain colloque sur l’histoire des élections municipales de 1977

C’est un colloque particulièrement intéressant qui se tiendra les 16 et 17 mars prochain à La Roche-sur-Yon. Organisée par l’Université de Nantes et le Centre de recherches en histoire internationale et atlantique, cette manifestation reviendra sur l’histoire des élections municipales de 1977, moment d’un important basculement à gauche des grandes villes de l’Ouest.

Le programme du colloque

 

Pourquoi un tel colloque ?

Les années 1970 entrent désormais résolument dans le champ de l'histoire. Elles sont effectivement un moment d'importantes mutations sur le plan économique, démographique, social, culturel  mais aussi politique. Le pays entre alors dans une certaine forme de modernité qui annonce ce que sera la France que nous connaissons aujourd'hui. Les trente glorieuses touchent à leur fin, certaines difficultés économiques se font jour, l'urbanisation progresse, les mœurs se libèrent, la mondialisation de l'économie s'amorce tout comme l'approfondissement de la construction européenne. Ces mutations affectent les territoires et chamboulent les équilibres politiques anciens.

Edmond Hervé remporte en 1977 la mairie de Rennes, succédant à Henri Fréville. Archives municipales de Rennes.

Que se passe-t-il en 1977 lors de ces élections municipales ?

Lors des élections municipales des 13 et 20 mars 1977, les candidats des partis de l'Union de la gauche – alliance électorale fondée entre le Parti socialiste (PS), le Mouvement des radicaux de gauche (MRG) et le Parti communiste français (PCF) sur la base du Programme commun de gouvernement conclu le 27 juin 1972 – s'imposent dans cinquante-cinq communes françaises de plus de 30 000 habitants. Ce véritable basculement électoral des grandes villes, annoncé l’année précédente par les élections cantonales des 7 et 14 mars 1976, fait émerger un nouveau paysage politique qui prépare la victoire de François Mitterrand à l'élection présidentielle de 1981.

Quelles sont les nouvelles figures qui apparaissent lors de ce scrutin ?

Dans l'Ouest, certains jeunes maires alors élus commencent avec cette élection une longue carrière politique. On pense naturellement à Edmond Hervé, à Rennes, futur ministre de la santé et de l'énergie ; à Jean-Marc Ayrault, à Saint-Herblain, qui prendra la tête de la ville de Nantes à partir de 1989 et celle du gouvernement entre 2012 et 2014 ; à Jacques Auxiette à La Roche-sur-Yon, président du Conseil régional des Pays-de-la-Loire entre 2004 et 2015.

Peut-on parler d'un scrutin fondateur pour la Bretagne et, plus largement encore, pour l'Ouest ?

L'Ouest était en effet traditionnellement un territoire conservateur, et de droite. On se souvient en effet du propos d'André Siegfried dans son Tableau politique de la France de l'Ouest, paru en 1913, selon lequel le granit fait le curé et le calcaire l’instituteur. Cette analyse, même déterministe, s'appuyait néanmoins sur autre chose que la seule géographie et décrivait aussi une réalité sociale et politique sensible. Même s'il convient, en histoire, de toujours nuancer, on peut raisonnablement considérer que la seconde moitié des années 1970 marque un basculement vers la gauche. Les scrutins des années 1980, 1990, voire 2000, l'ont confirmé.

Jean-Marc Ayrault à la fin des années 1970. Archives Ouest-France.

Pourquoi l'historiographie s'intéresse-t-elle si peu aux élections municipales ?

Il est vrai que ces élections municipales demeurent méconnues. Les étudier n’est pas chose aisée tant les scrutins sont, par définition, nombreux, de même que les candidats. De plus, si le résultat des urnes est le fruit de considérations nationales, il est aussi celui de considérations locales qui sont parfois difficiles à déterminer. Notre colloque a pour ambition d'affiner l'explication du succès de l'Union de la gauche en modifiant l'échelle d'analyse de ce phénomène qui n'est pas homogène et qui trouve son origine dans un tissu local souvent spécifique.

 

 

Le programme du colloque