Un pilote de classe: Marc Pourpe

Le sobre titre de l’article publié en une de L’Ouest-Eclair est très révélateur à la fois de l’immense popularité du défunt et des temps pionniers de son activité : « L’aviateur Marc Pourpe fait une chute mortelle ». Pourtant, ce vocabulaire, qui aujourd’hui serait employé pour désigner quelqu’un trébuchant dans un escalier, sert bien à décrire l’accident d’avion qui emporte le pilote morbihannais et son passager du jour, le lieutenant observateur Vauglin.

Né à Lorient en 1887 dans une des  franges les plus favorisées de la société, le jeune Marc Pourpe étudie en Angleterre à Harrow, prestigieuse école préparant aux non moins prestigieuses universités de Cambridge et Oxford. Tout le destine donc à une carrière plus qu’honorable sauf à ignorer le souffre qui entoure une partie de sa famille. Sa mère, Anne-Marie, mène en effet une vie assez hors du commun : après avoir obtenu le divorce peu après la naissance de son fil, elle mène une vie de courtisane, sous le pseudonyme de Liane de Pougy, et est ouvertement bisexuelle, vivant notamment une passion fulgurante avec l’écrivain américaine Natalie Clifford Barney. Peut-être est-ce pourquoi, au final, plus que les résultats académiques, c’est bien l’aventure nouvelle que constitue alors l’aviation qui attire irrémédiablement Marc Pourpe. Devenu mécanicien puis pilote – en autodidacte ! –  il finit pas être certifié en 1911.

Carte postale. Collection particulière.

Vient alors la période de la célébrité attisée à coups de tentatives inédites (le record de la traversée de la Manche … dans sa plus grande largeur) et de victoires dans des courses improbables. Marc Pourpe vole ainsi dans le sud-est asiatique ou encore en Afrique en réalisant la liaison Le Caire / Khartoum. Il compte parmi les plus grandes figures de l’aviation, aux côtés des Marcel-Georges Brindejonc des Moulinais et autres Léon Letort.

Engagé volontaire à la déclaration de guerre, Marc Pourpe trouve la mort à 27 ans, le 2 décembre 1914, dans un accident survenant à la fin d’un vol de reconnaissance, dans la Somme.  Une nécrologie publiée en 1916 dans le 4e numéro de l’illustré La Guerre aérienne laisse entendre que le froid pourrait être à l'origine du drame. Engourdi par la température très basse, Marc Pourpe aurait perdu le contrôle de son appareil à la sortie d’un nuage, avant de « glisser sur l’aile » et de venir s’écraser au sol.

Bien qu’inhumé dans sa ville natale, la mémoire de Marc Pourpe est aujourd’hui cantonnée aux seuls cercles restreints des passionnés des temps pionniers de l’aviation. Il compte pourtant assurément parmi les grands As bretons de la Grande Guerre, totalisant presque 80 heures de combats, sans aucune décoration ni galon ! En effet, fait curieux, malgré son prestige et sa renommée internationale, Marc Pourpe n’est « que » simple pilote de deuxième classe lorsqu’il trouve la mort.

Erwan LE GALL