Georges Le Bail, une figure incontournable de la vie politique finistérienne

Georges Le Bail est indiscutablement un personnage emblématique de la vie politique finistérienne du début du XXe siècle. Maire, député, conseiller général et sénateur, il maîtrise parfaitement les rouages de la IIIe République et devient incontournable dans son fief électoral. Comme le résume parfaitement Maurice Lucas, « durant 40 années, rien ne se fera dans le Finistère politique sans compter sur l'appui ou l’hostilité » du Breton1. Cette omniprésence en fait un homme clivant : fascinant les uns, irritant les autres.

Le fief: Plozévet. Wikicommons.

Georges Le Bail naît à Quimper le 15 juin 1857 dans une famille déjà très engagée politiquement, et fermement républicaine. Son grand-père, Roland, puis son père, Lucien, ont tous les deux été maires de Plozévet. Mais Georges pousse plus loin la tradition familiale. Après avoir fait ses armes en tant qu'avocat, il décide de se lancer lui-même dans une carrière politique. Il succède tout d'abord à son père à la mairie de  Plozévet en 1898. Tout s'enchaîne ensuite rapidement : il devient, la même année, conseiller général du canton de Plogastel-Saint-Germain puis, en 1902, il remporte les élections législatives. Cette première grande victoire le mène à Paris où il fréquente des personnalités influentes telles Paul Deschanel, Alexandre Millerand ou encore Marcel Cachin... A l’occasion, il prend également la plume et publie, avant la fin de la guerre, en 1917, un ouvrage à la gloire des fusiliers marins2.

Georges doit certainement une partie de sa réussite à sa femme. Marie Maignan est la fille d'un architecte des Côtes-du-Nord spécialisé dans l'édification et la restauration de constructions religieuses. Or, si Georges clame son anticléricalisme, la présence hebdomadaire de sa femme à la messe renvoie, à l'inverse, l'image d'un homme tolérant. Avec Marie, Georges élève deux fils. L'aîné, Georges Le Bail-Maignan, suit rapidement les traces de son père : il devient avocat puis se lance dans une brillante carrière politique. En 1914, à seulement 27 ans, il devient député. A Paris, il profite des douceurs que lui offre la vie, enchaînant les fêtes et les conquêtes amoureuses. Mais la déclaration de guerre le ramène à la dure réalité. Mobilisé, il tombe malade et meurt en juillet 1918 à seulement 31 ans. Son jeune frère, Albert (il a douze ans de moins), embrasse presque sans surprise une carrière d'avocat avant de se lancer dans la politique. Il devient député en 1932.

Alors que son fils rencontre le succès, Georges Le Bail constate amèrement qu'il n'est plus l'homme politique influent qu'il était. En 1928, après trois décennies de mandats, il perd successivement son siège au Conseiller général, puis celui à l'Assemblée nationale. Une élection providentielle lui permet malgré tout de conserver un pied à Paris, ce sera désormais au Palais du Luxembourg en tant que sénateur.

Les obsèques de Georges Le Bail. Cliché publié le 7 février 1937 dans La Dépêche de Brest.

Le 3 février 1937, Georges Le Bail succombe des suites d'une pneumonie à l'âge de 80 ans. Ses funérailles, à Quimper, attirent, selon La Dépêche de Brest,  « une foule considérable » dont le préfet, le président du Conseil général, l'amiral-préfet maritime et de nombreuses personnalités politiques et syndicales. L'ampleur de la cérémonie témoigne de l'importance d'un homme qui a marqué son époque. Quant aux habitants de Plozévet, ils choisissent une tête connue pour prendre la succession de l'illustre édile : son fils, Albert Le Bail.

Yves-Marie EVANNO

 

 

 

1 LUCAS, Maurice, « A propos d'un cacique radical et bigouden : Georges Le Bail », in Coll., Etudes sur la Bretagne et les pays celtiques. Mélanges offerts à Yves Le Gallo, Brest, CRBC/ICB, 1987, p. 325-352.

2 LE BAIL, Georges, La brigade de Jean le Gouin : histoire documentaire et anecdotique des Fusiliers-Marins de Dixmude; d'après des documents originaux et les récits des combattants, Paris, Perrin, 1917.