Une figure nantaise : Paul Bellamy

Malgré les vives critiques qu'il subit à la fin de sa carrière politique, Paul Bellamy demeure une figure incontournable de l'histoire de ce département que l’on nommait alors la Loire-Inférieure, et plus particulièrement encore de la ville de Nantes qu'il dirige pendant 18 ans.

Paul Bellamy, à droite, en compagnie du célèbre aviateur Marcel-Georges Brindejonc des Moulinais. Carte postale. Collection particulière.

Son histoire commence pourtant à plusieurs centaines de kilomètres des bords de la Loire puisqu’il voit le jour à Brest, le 27 octobre 1866. De la cité finistérienne, il ne conserve que peu de souvenirs. En effet, en 1870, alors qu'il n'a que quatre ans, ses parents déménagent à Nantes où son père devient greffier en chef du tribunal.

Paul Bellamy se tourne d’ailleurs rapidement vers des études de droit, ce qui lui permet de succéder à son père en 1891. Dans les couloirs du tribunal, il côtoie de nombreuses personnalités locales qui ne tardent pas à influencer ses opinions politiques. En 1908, son ami Gabriel Guist'hau parvient à le convaincre et tous deux se lancent à la conquête de la mairie de Nantes. La liste radicale-socialiste triomphe, Gabriel Guist'hau devient maire. Paul Bellamy, de son côté, endosse la fonction de premier adjoint. Cette même année, en étant également élu conseiller général, il fait définitivement le choix de se consacrer à une carrière politique.

Celle-ci s'accélère rapidement. En 1910, Gabriel Guist'hau entre  au gouvernement comme sous-secrétaire d'Etat à la Marine et démissionne de la mairie. A 44 ans, Paul Bellamy devient alors le nouvel homme fort de Nantes. Réélu en 1912, il ne s'imagine pas encore le rôle qui va lui être confié quelques mois plus tard. Pendant quatre longues années, il administre parfaitement sa ville face aux difficultés de la guerre.

Au sortir du conflit, Paul Bellamy continue son ascension politique. En 1920, il devient président de l'association des maires de France. Quatre ans plus tard, il se présente avec succès aux élections législatives. sa carrière est alors à son apogée. Mais la machine s'enraye dès l'année suivante. En 1925, il conserve de justesse la mairie de Nantes. Paul Bellamy n'est plus véritablement l'homme fort de sa ville. Il affronte de violentes critiques, principalement en raison de son incapacité à faire accélérer la construction d'un monument aux morts à Nantes. En 1927, la presse conservatrice se déchaîne une nouvelle fois contre le député-maire lorsque ce dernier décide d’élever à Nantes, près du monument aux morts, une statue intitulée La Délivrance. Bien que commémorant la Grande Guerre – elle est d’ailleurs initialement intitulée La Victoire – cette œuvre allégorique figure une femme nue, portant dans la main droite un glaive et dressant tout son corps vers le ciel, une posture que beaucoup jugent obscène à proximité d’une stèle en mémoire des morts pour la France.

La Délivrance devant le monument aux morts. Carte postale. Collection particulière.

Les élections législatives de 1928 confirment l'avertissement reçu aux municipales. Le député-sortant est sévèrement battu par Francis Merlant dès le premier tour. Profondément marqué par cette défaite, il estime ne plus être légitime auprès des électeurs et abandonne brusquement tous ses mandats. En 1929, malade, il part à Combo-les-Bains pour tenter de soigner une tuberculose. En vain.  Il meurt le 29 mars 1930. Ses obsèques, le 3 avril 1930 à Nantes, donnent lieu à une traditionnelle démonstration de sympathie. Le discours du maire de Nantes, Léopold Cassegrain, vante les qualités humaines et professionnelles de Paul Bellamy, occultant les dernières années de ses mandats, comme pour ne pas réveiller les querelles, comme pour ne conserver que le positif d'une brillante carrière comme le concède le quotidien Ouest-Eclair  :

« D’aucun pourront reprocher à cette nécrologie une excessive sobriété. Elle dit, en tout cas, l'essentiel, sans manquer à la vérité. Elle jette seulement un voile une un difficile passage de la vie du regretté défunt et c'est bien ainsi... »1

Yves-Marie EVANNO

 

1 « Les obsèques de Paul Bellamy, ancien maire de Nantes », L’Ouest-Eclair, 31e année, n°11201, 3 avril 1930, p. 4.