Les fonds privés, archives de l’intime ?

Les archives ne se limitent pas à celles que l’on trouve traditionnellement dans les dépôts publics. Bien au contraire puisque chaque individu produit quotidiennement, dans le cadre professionnel et privé, des documents qui deviendront des archives. Ces dernières constituent indéniablement le plus gros réservoir documentaire permettant d’écrire l’histoire des Bretons et des Bretonnes, mais également celle des entreprises, des commerces ou des associations.

Carte postale. Collection particulière.

En quelque sorte, le plus grand dépôt d’archives de France se trouve dans les armoires – et ordinateurs – des particuliers et des entreprises. Correspondances, photographies, factures, avis d’imposition… sont autant de témoignages utiles à l’historien. Ces documents constituent un point de départ idéal pour quiconque souhaite écrire son histoire familiale et, de manière générale, l’histoire de la vie quotidienne. Malheureusement, appartenant à la sphère de l’intime et, parfois, du confidentiel, l’accès à ces archives s’avère compliqué.

Conscientes de l’importance de la valorisation de leurs fonds, certaines entreprises s’attachent néanmoins à rendre accessibles leurs archives en proposant une consultation sur place, dans un service dédié, comme pour la Société générale par exemple, ou par l’intermédiaire d’un musée. Les particuliers ne sont pas en reste et l’essor de la numérisation permet d’accéder à de nombreuses sources inédites, soit sur des blogs personnels, soit sur des plates-formes spécifiques comme Europeana.

Mais, paradoxalement, ce sont peut-être les dépôts d’archives publics qui permettent d’accéder le plus aisément aux archives privées. En effet, ils ont aussi pour mission de collecter et de conserver des « archives d'origine privée, qu'elles émanent de personnes physiques ou morales, d'entreprises, d'associations ou d'organisations professionnelles et ceci sous la forme de don, de legs, de dépôt ou de dation, en vue de les mettre à la disposition des chercheurs ». Aussi est-ce pourquoi la série J est un véritable trésor, parfaitement défini par les Archives départementales du Finistère :

« On y trouvera donc un grande variété de documents, de l'expédition d'un acte notarié à un fonds d'entreprise, en passant par une correspondance familiale, des archives d'écrivains ou d'érudits, des dossiers de clients de notaires ou des menus de banquets ».

Impossible donc d’en livrer ici, en quelques lignes de surcroît, un détail exhaustif. Signalons néanmoins quelques exemples montrant cette richesse. Les Archives de Loire-Atlantique conservent les archives de la biscuiterie LU pour la période allant de la fin du XIXe à la moitié du XXe siècle (118 J et 202 J). D’un point de vue plus technique et culturel, le Finistère conserve le fonds de l'Aéro-club de Cornouaille (145 J). Pour une histoire politique, on signalera par exemple le Fonds de la fédération d'Ille-et-Vilaine du Parti Communiste Français à Rennes. Enfin, également aux Archives départementales d’Ille-et-Vilaine, on dépouillera avec attention le fonds du Comité d'Etudes et de Liaison des Intérêts Bretons classé en 30 J.

Carte postale. Collection particulière.

De par leur richesse, les archives privées sont incontournables. Cependant, aussi privées soient-elles, elles ne permettent pas toujours de pénétrer dans l’intimité ni des particuliers, ni des entreprises. En procédant préalablement au tri de ses propres archives, un donateur oriente ce qu’il veut que l’on retienne de son fonds. A l’historien alors de ne pas tomber dans le piège…

Yves-Marie EVANNO