Les Presses universitaires de Rennes en accès libre sur Book OpenEdition

Les Presses universitaires de Rennes occupent assurément une place à part dans le paysage éditorial français. D’abord sous la direction de Pierre Corbel puis sous celle de Cédric Michon, elles se sont imposées en l’espace d’une trentaine d’années comme un bastion incontournable du paysage académique. Ces colonnes en sont d’ailleurs une belle illustration puisque, régulièrement, elles se font l’écho d’un ouvrage – toujours de grande qualité – publié par cette vénérable maison. Mais le problème est qu’avec plus de 280 publications par an, il est difficile, pour ne pas dire impossible, de profiter de tous ces ouvrages : il faudrait pour cela un budget particulièrement conséquent, sans compter des rayonnages de bibliothèque très extensifs. Heureusement, le salut vient encore une fois d’internet… associé à une politique aussi novatrice qu’audacieuse.

Une référence incontournable à installer d'urgence dans ses favoris.

Le constat est limpide : hors phénomènes d’édition par définition exceptionnels, la durée marchande de vie d’un volume, et encore plus s’il s’agit d’actes de colloque, est limitée. Dès lors, c’est un cercle vicieux qui s’enclenche : pour garantir une certaine rentabilité de l’opération éditoriale, les tirages sont diminués ce qui, mécaniquement, restreint la diffusion. Quand on sait combien ces volumes collectifs sont précieux pour l’élaboration des connaissances et le débat intellectuel, on mesure aisément qu’il y a là un véritable problème quant à la diffusion du savoir. On ne peut donc que se réjouir de voir le nombre d’ouvrages publiés par les Presses universitaires de Rennes disponibles gratuitement sur la plateforme Books OpenEdition dépasser les 600 références.

Depuis plusieurs années, l’éditeur breton met régulièrement à la disposition du plus large public, en accès complètement libre, bon nombre de ses publications aujourd’hui épuisées mais épistémologiquement toujours d’actualité. Parmi les disciplines bénéficiaires de cette politique particulièrement bienvenue – et d’autant plus remarquable si on la compare aux tarifs exorbitants pratiqués par certains éditeurs de revue comme Elsevier – l’histoire se taille une place de choix, avec plus d’une centaine de références issues de la célèbre collection éponyme dirigée par Frédéric Chauvaud, Florian Mazel et Jacqueline Sainclivier.

Autant le dire de suite, il s’agit d’une véritable mine d’or qui ravira le plus grand nombre, des chercheurs patentés en quête d’une référence bibliographique un peu ancienne aux étudiants en passant bien entendu par les simples curieux. Il y en a pour tous les goûts, tous les styles et pour toutes les périodes : des biographies comme celle magistrale de René Pleven par Christian Bougeard publiée en 1994, des monographies comme celle que Michel Lagrée, Patrick Harismendy et Michel Denis consacrent au grand quotidien régional L’Ouest-Eclair, ou encore de grandes fresques comme celle d’Annie Crépin sur le service militaire en France, de la guerre de Sept ans à Verdun, ou la remarquable somme de Jean Le Bihan sur les fonctionnaires intermédiaires au XIXe siècle.  Pour celles et ceux qui s’intéressent à la Seconde Guerre mondiale, on ne peut que conseiller le classique La résistance et les Français, actes d’un colloque tenu à Rennes en 1994 ou Les Bretons au lendemain de l’occupation, version publiée en 1999 de la thèse de Luc Capdevila. L’histoire rurale est présente avec le remarquable Campagnes de l’Ouest publié en 1999 sous la direction d’Annie Antoine mais la façade maritime n’est pour autant pas oubliée, par l’intermédiaire notamment de la superbe synthèse de Jean-Crhistophe Fichou sur les gardiens de phares.

Parcourir les rayonnages de cette bibliothèque virtuelle peut aisément donner le vertige tant on mesure l’immensité de qu’il reste à lire, la multiplicité des références qu’on ignore car on a raté leur sortie ou, peut-être pire encore, l’ampleur de ce qu’il faudrait compulser une nouvelle fois. Grâce aux Presses universitaires de Rennes, c’est désormais possible gratuitement et en quelques clics. Seul le temps disponible pourra encore s’opposer à notre soif de connaissance et on mesure dès lors combien une telle mise à disposition sur la plateforme Books OpenEdition contribuera assurément à une meilleure diffusion de la connaissance. De quoi, espérons-le, inciter d’autres Presses universitaires à suivre le mouvement, celui-ci prouvant que l’écran n’est nullement l’ennemi du livre. Bien au contraire puisqu’il peut même le régénérer.

Erwan LE GALL