À la rencontre des Algériens d’une « région tranquille ». Finistère, 1958

« Nous vivions pourtant si loin de l’horreur militaire… »1

Situé à la pointe de la péninsule armoricaine, le Finistère est en 1958 un département considéré comme étant « tranquille ». Mais ce qualificatif ne signifie pas pour autant que la question algérienne ne s’y pose pas avec une certaine acuité : s’ils sont relativement peu nombreux, les Algériens font l’objet d’une surveillance policière particulièrement resserrée. Pourtant, malgré ces conditions difficiles, des rencontres avec des Bretons se produisent.

Par Pierre-Jean LE FOLL-LUCIANI

 

 

Il y a 10 ans paraissait un ouvrage rassemblant 40 contributions sur les « expériences métropolitaines de la guerre d’indépendance algérienne »2. Dans leur introduction, Raphaëlle Branche et Sylvie Thénault défendaient l’intérêt des approches menées à l’échelle locale, notamment à travers les fonds des archives départementales, pour saisir « comment la guerre est entrée dans le quotidien des habitants de France », et comment « elle a pesé sur leurs opinions et sur leurs manières d’appréhender la situation »3. Elles y affirmaient aussi l’importance de « la césure de mai 1958 »4, plus forte encore dans les travaux sur la guerre en métropole que dans ceux portant sur la guerre en Algérie.

Pendant l'opération Jean Mermoz, le 15 novembre 1956. Collection particulière.

Dans le prolongement de ces approches, cet article s’intéresse aux expériences de ceux que je nommerai les « Algériens »5 du Finistère, c’est-à-dire à des acteurs que les autorités locales se plaisent à décrire comme une population « calme » vivant dans une « région tranquille ». Loin de l’Algérie et du théâtre des opérations militaires, loin des villes de France à forte population algérienne, loin des efforts d’encadrement et des actions politico-armées du Mouvement national algérien (MNA) et du Front de libération nationale (FLN), les Algériens de Bretagne comme des autres « régions tranquilles » sont pourtant frappés de plein fouet par le contexte de guerre. Nécessairement touchés par un conflit qui ensanglante leur terre natale et met en danger leurs proches restés au pays, ils sont de surcroît assignés à l’un des camps de la guerre par les autorités, parfois à leur corps défendant. Censés être des citoyens français de plein droit depuis les réformes de 1944 et de 1947, a fortiori lorsqu’ils résident en métropole, les Algériens sont de plus en plus traités comme des « citoyens diminués » à mesure que la guerre s’installe en France : suspectés et discriminés, ils sont soumis à un encadrement, à une surveillance, à une répression et à une violence d’État spécifiques qui atteignent des formes paroxystiques à partir de 19586. Mais la guerre affecte aussi les Algériens dans leurs relations avec la population majoritaire du département – que je désignerai comme « Français », « Finistériens » ou « Bretons »7. Cette population est elle aussi touchée par une guerre qui envoie combattre en Algérie sa jeunesse, percute des trajectoires individuelles et collectives et contribue à la recomposition du champ politique local. Loin de l’Algérie et, a priori, des Algériens, des Finistériens n’en vivent pas moins au contact de « Nord-Africains » de leur département, avec lesquels des interactions variables se recomposent durant la guerre.

Cette contribution se propose donc d’aller à la rencontre des Algériens du Finistère en 1958 – en tentant d’en dresser un « portrait » à partir des archives départementales –, et de questionner les relations entre Algériens et Bretons en confrontant le regard policier à une expérience singulière de rencontre entre des Algériens et des lycéens et lycéennes à Morlaix. Si on prendra pour focale centrale l’année 1958, cette réflexion s’inscrira dans le cadre chronologique plus large de la guerre d’indépendance (1954-1962) voire de l’après-Seconde Guerre mondiale, afin de mieux questionner les inflexions survenues lors de cette année charnière. On tentera de même de mettre en regard les expériences finistériennes avec un cadre breton ou hexagonal plus large afin d’interroger l’existence de singularités locales.

 

Être Algérien dans le Finistère en 1958

Une population peu nombreuse aux conditions de vie précaires

Dans le Finistère d’après-guerre, à une époque où la majorité des immigrés arrivant en France viennent d’Algérie8, la population algérienne est peu nombreuse, comme dans la plupart des départements de l’Ouest et les autres territoires peu industrialisés. S’il faut rester prudent face à ces chiffres, sur plus de 200 000 Algériens qui résideraient en France en 1951, seuls 2 000 vivraient dans les douze départements qui forment la IIIe région militaire (futures régions Bretagne, Pays de la Loire et Basse-Normandie). En 1958, alors qu’on compterait 320 000 Algériens en France, ils seraient environ 250 dans le Finistère, et fin 1960, les 430 Algériens représenteraient à peine 0,05% des 730 000 habitants du Finistère, contre environ 0,7% à l’échelle nationale9.

Enfants en costume traditionnel, dans le Finistère, 1958. Collection particulière.

Numériquement faible, la présence algérienne dans le Finistère connaît en outre d’importantes irrégularités depuis l’entre-deux-guerres. L’année 1958 fait ainsi partie des moments de creux, de même qu’à l’échelle nationale où elle est la seule année d’après-guerre où le nombre d’Algériens semble connaître un reflux10. Alors qu’ils étaient à peine quelques dizaines dans le département dans les années 1930, plusieurs centaines d’Algériens y vivent temporairement durant la Seconde Guerre mondiale : des civils travaillent à la construction des fortifications côtières exigées par les occupants11, puis plus d’une centaine de soldats algériens stationnent à Brest jusqu’au début des années 1950. Entre la sortie de guerre et l’indépendance de l’Algérie, la présence algérienne connaît de nouvelles fluctuations. Si l’on s’en tient à la ville de Brest – qui regroupe la majorité de la population algérienne –, les Algériens civils de plus de 16 ans y seraient environ 110 en juin 1947, 130 en juillet 1951, 430 en mai 1952, 180 en janvier 1953, 300 à la mi-1957, 160 en mars 1958, 200 en décembre 195812. À l’échelle du département, après les maximums atteints en 1952 (plus de 500), les années 1958-1959 marquent un creux : les Algériens adultes y seraient moins de 250 jusqu’en octobre 1959, mais de nouveau plus de 400 à partir de 196013. Les fortes chutes observées à la fin 1952 et à la fin 1957 s’expliquent par les difficultés de l’emploi qui, liées à la conjoncture locale, sont aggravées pour les Algériens. Non qualifiés, ils font en effet partie des premiers licenciés. En mai 1952, ils représentent ainsi environ la moitié de la centaine de débauchés d’une entreprise brestoise de travaux publics, alors qu’ils n’étaient, avant la phase de licenciements, que 16% des 600 ouvriers de l’entreprise14. Par ailleurs, les Algériens peinent de plus en plus à trouver du travail parce qu’ils subissent des discriminations exacerbées, à partir de 1954 et plus encore en 1958, par l’évolution de la guerre. À compter de 1954, les autorités indiquent à plusieurs reprises que la proportion de sans-travail et de chômeurs secourus, entre 10 et 25% des actifs, est plus importante parmi eux que parmi les Français15.

Ces irrégularités numériques s’expliquent par le type d’emplois qu’occupent ces migrants. Deux profils professionnels dominent. Le premier concerne la majorité des Algériens du Finistère, concentrés à Brest. Massivement illettrés, ils sont ouvriers non qualifiés dans les secteurs du bâtiment, des travaux publics et du carénage. En décembre 1957, alors que les Algériens ne sont pas plus de 0,05% de la population du département, les 148 ouvriers algériens représentent 5,5% de la population ouvrière du Finistère16. Toutefois, peu d’entre eux (de l’ordre de 15% fin 195917) sont employés régulièrement : leur embauche dépend de la reconstruction de Brest, dont le budget s’amenuise dans les années 1950, et de la présence de navires nécessitant des réparations. Les chiffres fournis par la Direction départementale du travail sont particulièrement évocateurs : en 1956 par exemple, les Algériens exerçant un travail dans le Finistère sont 336 en janvier et 206 en décembre18. En fonction des possibilités d’embauche, les arrivées et les départs du département peuvent être importants d’un mois à l’autre de l’année. En novembre 1957, une quarantaine de travailleurs algériens quittent ainsi Brest, faute d’emploi, vers des régions industrielles19. Les fiches de renseignements établies durant la guerre d’indépendance donnent un aperçu de cette mobilité parfois très importante. En témoigne l’exemple de M. L., né en 1924 à Bône (Annaba). Détenteur d’un certificat d’études en français et en arabe, marié à 18 ans, il s’engage dans l’armée française en juin 1944 et s’installe en France après sa démobilisation. Entre 1946 et 1958, années durant lesquelles il sera quatre fois condamné à quelques mois de prison pour vol, il vit et tente de travailler à Marseille, Caen, Alès, Valenciennes, Paris, Nantes, Alençon, Orléans puis Morlaix, où il prépare en 1958 un Certificat d’aptitude professionnelle (CAP) de peintre et travaille comme maçon20. Le second profil professionnel dominant, qui concerne une minorité d’Algériens (plus de 15% en 1958-195921), est celui de commerçants non sédentaires qui exercent sur les marchés ou au porte-à-porte, notamment dans les campagnes. Recensés comme « forains », « ambulants » ou « colporteurs », une partie d’entre eux sont des saisonniers qui vivent parfois entre le Finistère et l’Algérie depuis les années 1930. En 1951 par exemple, sur la trentaine d’Algériens résidant dans le Sud-Finistère, une dizaine quitte la France pour l’Algérie d’octobre à mars22. Au final, comme le notent les Renseignements généraux (RG) en 1959, la majorité des Algériens du Finistère, ouvriers ou commerçants, travaillent périodiquement et n’ont « aucune certitude pour l’avenir » : leurs « conditions d’existence restent précaires » et « leurs gains restent insuffisants pour leur permettre de venir en aide à leurs familles »23 restées en Algérie.

Ces profils témoignent à l’évidence des conséquences de la domination coloniale, et notamment de la sous-scolarisation des colonisés24. Mais les archives policières ne nous disent presque rien de ce que fut leur vie en colonie avant l’exil, même si elles s’interrogent parfois : existe-t-il des « démarcheurs » en Algérie qui feraient la promotion des possibilités d’emploi et de logement à Brest25 ? Plus que de « démarcheurs », les origines géographiques de ces migrants indiquent l’existence probable de réseaux migratoires plus ou moins informels à l’échelle de localités ou de familles. En novembre 1958 par exemple, sur 242 adultes algériens recensés dans le département, 73 sont originaires du département de Batna (dont une vingtaine de Barika) et 43 du département de Tizi-Ouzou26. Environ la moitié de ces Algériens viennent donc des Aurès et de Kabylie, régions rurales paupérisées, berbérophones et foyers anciens d’émigration dont les montagnes voient en outre se constituer les premiers maquis insurrectionnels et se déployer d’importantes opérations de l’armée française dès la fin 1954. Par ailleurs, en avril 1958, environ la moitié d’entre eux sont mariés et ont laissé leur famille au pays, ce qui correspond approximativement aux chiffres connus à l’échelle de la France27. Toutefois, à cette même date, environ 15 à 20% des hommes algériens du département – ce qui les place largement au-dessus des chiffres nationaux, de l’ordre de 3% – y vivent en famille avec une Française et des enfants issus de cette union (les moins de 16 ans issus d’unions algériennes et « mixtes » y sont alors environ 100, et plus de 140 en 1960-1961). Pour leur part, les Algériennes ne sont pas plus d’une quinzaine, soit environ 5% de cette population immigrée, jusqu’au début des années 1960, ce qui correspond à peu près aux chiffres connus à l’échelle de la France28. En-dehors des recensements, où elles sont comptabilisées comme « épouses », elles sont totalement invisibles dans les archives préfectorales.

A Brest, rue Jean Jaurès, à la fin des années 1950. Carte postale. Collection particulière.

Touchés par une importante précarité économique et par une incertitude quant à la durée de leur présence dans le Finistère, mais aussi par des discriminations, les Algériens peinent à trouver de bonnes conditions de logement. On ne trouve pas de bidonvilles dans le département, mais la proportion d’Algériens considérés par les autorités comme « mal logés » est de l’ordre de 20%, ce qui la place toutefois en-dessous de la moyenne nationale (supérieure à 50%29). Ces « mal logés », écrivent les RG en 1958-1959, vivent généralement dans des hôtels et des garnis « d’une façon misérable et dans des conditions très précaires »30, tout en payant un loyer élevé au regard à leurs revenus31. À Quimper, ils font parfois appel au centre d’accueil des Sans-Logis, géré par des catholiques mais fermé l’été et dont l’accueil cesse en 1960. Ils y occupent une dizaine de lits sur une vingtaine en 1958-1959, et se rendent au bureau d’aide sociale pour y prendre leurs repas, du moins lorsqu’il n’y est pas servi de porc, les RG affirmant qu’il leur arrive alors de voler pour se procurer de la nourriture32. Mieux logés, une dizaine d’entre eux résident chaque année dans les Centres de formation professionnelle pour adultes (CFPA) de Brest, Quimper et Morlaix, où ils préparent des CAP dans le bâtiment33. Les Algériens « correctement logés » vivent pour leur part dans des appartements et, surtout, dans le foyer d’hébergement des travailleurs nord-africains de Brest. Ce foyer existe depuis 1953, et son histoire s’inscrit d’une part dans celle des constructions provisoires de l’après-guerre  – dans lesquelles vivent en 1958 environ 20 000 Brestois, soit plus de 15% des habitants de la ville34 –, et d’autre part dans celle des foyers d’hébergement des Algériens de France. Au début des années 1950, une large majorité des Algériens de Brest réside dans les baraquements de l’Organisation nationale pour les cantonnements ouvriers de la Reconstruction (ONCOR), principalement dans la cité du Bouguen, où 80% des 400 Algériens de la ville vivent en avril 1952, mêlés à des ouvriers français, et sous le contrôle d’un gestionnaire français35. Mais en 1953, les autorités décident de regrouper les Algériens dans deux baraquements spécifiques, transformés en un « foyer nord-africain », dont la gestion est assurée par un Algérien élu par les résidents sous le contrôle des autorités. Le foyer du Bouguen compte ainsi en 1958 parmi les 132 « centres d’hébergement » pour Algériens mis en place par l’administration publique36.

Bien qu’elles soient considérées comme « correctes » dans les recensements, les conditions de vie dans ce « foyer nord-africain » font l’objet de critiques régulières de la part des résidents comme des autorités. Fin 1954-début 1955, alors que les deux baraquements du foyer ont une capacité de 124 lits (à raison de 4 lits par pièce), plus de 200 Algériens y résident, ce qui implique que plus de 80 d’entre eux couchent à même le sol ; par ailleurs, le foyer ne compte alors ni douches, ni cuisine37. En 1957 encore, malgré l’affectation de nouvelles baraques – qui permettront d’héberger jusqu’à 300 personnes cette année-là – et la réalisation de certains travaux (cuisine, douches), le foyer n’est pas chauffé durant l’hiver, et des résidents dénoncent l’absence de « désinfection des chambres pour détruire la vermine, punaises, puces etc. »38. Surtout, à partir de 1957, la précarité économique des résidents entraîne le non-paiement des loyers par une partie semble-t-il importante d’entre eux. Les factures ne pouvant être réglées, il arrive que l’électricité soit coupée39. À la fin 1957, le foyer enregistre une chute vertigineuse de ses effectifs : en quelques semaines, le nombre de résidents passe d’environ 200 à 80. Il atteindra environ 50 à la fin 1958, de même qu’à la fin 1959, plus de 75% des lits restant inoccupés40. La situation financière du foyer devient critique en 1958 : en décembre, seuls 9 résidents travaillent, et seuls 6 d’entre eux paient leur loyer, ce qui entraîne des mesures des autorités, qui envisagent d’expulser ceux qui ont des revenus mais ne paient pas leur loyer et décident finalement de les priver d’éléments de confort matériel et des réparations envisagées41. Comment expliquer cette rupture survenue fin 1957-début 1958 ? Pour les autorités locales, la désaffection du foyer est liée à la conjoncture économique : au chômage, les Algériens de Brest quittent en nombre le foyer et le département42. Toutefois, fin 1958, les Algériens de la ville se partagent pour moitié environ entre le foyer et d’autres logements, alors que jusqu’ici, le foyer hébergeait une majorité importante d’entre eux. Sans négliger la situation économique, deux autres hypothèses peuvent donc être avancées pour expliquer la désertion durable des lieux. D’une part, les conditions d’hébergement et la gestion du foyer, où, en avril 1958, l’installation électrique est encore considérée comme « dangereuse » et l’isolation défectueuse43. D’autre part, le ministère de l’Intérieur écrit début 1959 qu’à l’échelle nationale, « il est de notoriété que les contrôles de Police d’une part et l’emprise du FLN d’autre part sont dans une grande mesure à l’origine de la désaffection de certains foyers »44, les Algériens cherchant à vivre isolément pour éviter cette double pression. Or, la pression policière est particulièrement forte sur les résidents du foyer brestois à partir de septembre 1957, date de la découverte par la police que le gérant des lieux, Ahmed Daouadji, qui avait su jusqu’ici se montrer coopératif avec les autorités et « [manifestait] son attachement à la France »45, était devenu depuis quelque temps collecteur de fonds du FLN.

Une population « calme » dans une « région tranquille ». Le discours policier sur « l’état d’esprit » des Algériens du Finistère

« Le mutisme est toujours total et laisserait penser, si l’on n’était pas averti de la mentalité musulmane que les Algériens sont moins préoccupés que quiconque du sort de l’Algérie ou des effets de la guerre. S’il est vrai que le fatalisme entre pour une part dans cette attitude, ce n’est là qu’un des aspects d’un caractère oriental où se mêlent la peur, la méfiance, l’instinct de tromperie et le goût du secret. C’est dire combien il est difficile en la matière, sans sortir des généralités et sans se répéter continuellement, de définir un état d’esprit. À moins de tomber dans l’erreur en essayant d’imaginer cet état d’esprit à travers ses propres réactions. »46

Rédigé en juin 1961 par le préfet du Finistère, cet extrait de l’un des nombreux rapports consacrés durant la guerre d’indépendance à « l’état d’esprit » des Algériens appelle plusieurs commentaires. Le plus frappant est sans doute son vocabulaire orientaliste et colonial, qui présente, sous l’apparence d’un discours d’expert, un portrait essentialiste et dépréciatif des Algériens. Mais il témoigne aussi des difficultés bien réelles de l’administration locale – qui en est consciente – à appréhender les opinions et les aspirations des Algériens, alors que les demandes en provenance du ministère de l’Intérieur se font de plus en pressantes, surtout à partir de 1958. Les rapports de renseignements rédigés durant la guerre d’indépendance – et même dans les années qui l’ont précédée – sont de fait très redondants : ils peinent à rendre compte de l’observation de faits, à rapporter des propos ou à proposer des distinctions sociales ou politiques qui permettraient de dresser un tableau précis et nuancé de « l’état d’esprit » des quelques centaines d’Algériens du département. Comme souvent en la matière, ces rapports en disent plus sur leurs rédacteurs que sur celles et ceux qu’ils disent observer. Ils permettent donc avant tout de questionner les représentations et les catégories policières. Ils n’en proposent pas moins des éléments factuels intéressants pour appréhender les spécificités de la situation finistérienne. Ces deux dimensions nous intéresseront ici.

A Brest, vue de la rue de Siam reconstruitre, probablement à la fin des années 1950. Carte postale. Collection particulière.

Le discours policier sur les opinions et le comportement des Algériens est fortement influencé par les grilles de lecture racialistes et les stéréotypes racistes issus du monde colonial. À titre d’exemple, lorsqu’en avril 1959, les RG rendent compte de la situation des Algériens au CFPA de Quimper, alors que le directeur du centre affirme que les stagiaires algériens sont « courageux » ou « médiocres » dans les mêmes proportions que les stagiaires métropolitains, et qu’ils ne présentent donc aucune spécificité, le rédacteur du rapport ne peut s’empêcher d’écrire que les « médiocres » sont « enclins à la nonchalance de leur race »47. Cette interprétation racialiste des comportements est du reste induite par la construction préalable de la catégorie « Nord-Africains » – également présente dans les statistiques judiciaires48 –, la variable d’origine et ses supposées caractéristiques étant définies a priori comme des données fondamentales et non amendables. Décrivant le foyer du Bouguen, les autorités insistent ainsi sur « le manque d’hygiène »49 des résidents et affirment que cela ne saurait s’améliorer en raison du « mode de vie » et du « comportement » propres aux « Nord-Africains »50. Le préfet écrit pour sa part en septembre 1961 que

« cette catégorie de main-d’œuvre n’est pas recherchée par les employeurs en raison de son instabilité, de son manque d’ardeur au travail et de sa tendance marquée à vivre de la charité d’autrui. Au surplus elle est très souvent la cause de désordres sur les chantiers en raison de leur esprit revendicatif facilement porté à la violence. »51

Dès l’après-guerre, et a fortiori durant la guerre d’indépendance, la préoccupation principale des autorités quant à « l’état d’esprit » des Algériens a trait à leurs opinions et actions politiques, et à la manière de les contenir dans un cadre qui ne serait pas préjudiciable à l’ordre politique et social métropolitain et colonial. De la Libération à la veille de la guerre d’indépendance, dans le contexte de la Guerre froide et des luttes de décolonisation, ce sont surtout les rapports des Algériens au Parti communiste français (PCF), à la Confédération générale du travail (CGT) et au mouvement national algérien qui intéressent les autorités. Dans le Finistère, les services de renseignements affirment que les organisations syndicales et politiques françaises se désintéressent totalement des Algériens du département, exceptés le PCF et surtout la CGT. En 1954, la majorité des ouvriers algériens de Brest seraient inscrits à la CGT sans toutefois payer leurs cotisations, mis à part quelques dizaines d’adhérents dont l’un, Hafid Hammou, permanent syndical, serait chargé de les représenter à l’intérieur de la CGT52. Ce dernier serait également membre du PCF, qui regrouperait moins de dix adhérents algériens en 1954 et, comme un autre responsable syndical, Cherif Melikech, il est décrit comme exerçant une forte influence sur les autres ouvriers algériens, qui obéiraient à ses « consignes »53, sans que l’on sache si cela découle d’observations ou de stéréotypes coloniaux sur l’importance supposée du respect de l’autorité d’un « chef » chez les « musulmans ». Entre 1945 et 1954, les ouvriers algériens de Brest participent à divers mouvements sociaux, particulièrement lors des conflits de mars-avril 1952. À l’occasion de ces événements, les autorités reprennent à leur compte le poncif colonial d’« indigènes » dont les révoltes ne peuvent que découler d’une manipulation de la part d’« extrémistes » français qui « [exploitent] leur mécontentement »54 et les « [poussent] à provoquer des incidents avec le service d’ordre »55. De même, les protestations contre les conditions d’hébergement au Bouguen sont interprétées par les autorités comme le résultat de manipulations communistes – au prétexte que la CGT et le PCF les soutiennent parfois – ou d’inimitiés personnelles entre le gérant et des résidents, la possibilité d’une organisation politique autonome des Algériens semblant inenvisageable pour les RG56. Or, il est tout à fait frappant de constater que sur les six gérants ou candidats à la gestion du foyer du Bouguen choisis par vote ou soutenus par pétition par des résidents entre 1953 et 1962 se trouvent cinq individus identifiés par les RG comme (ex-)sympathisants nationalistes, communistes ou cégétistes, ce qui témoigne a minima d’une confiance des résidents envers des hommes capables de s’organiser et de défendre leurs intérêts57.

En région parisienne, lors d'une manifestation de la CGT pour la paix en Algérie. Crédit iconographique: L'Humanité.

Pour leur part, les mouvements nationalistes algériens ne semblent pas être organisés dans le département avant 1953. Tout au plus les RG notent-ils à trois ou quatre reprises des propos anticolonialistes ou antiracistes qu’auraient tenus des Algériens devant des informateurs ou le cas tout à fait isolé d’un marchand ambulant de 27 ans de Morlaix abonné en 1947 à l’organe de l’Union démocratique du Manifeste algérien (UDMA), Égalité58. Pour le reste, les RG notent régulièrement avant 1954 que les Algériens se montrent peu communicatifs sur les questions politiques, et même qu’ils semblent indifférents à la situation de leur pays d’origine, dont ils ne peuvent recevoir de nouvelles écrites, par lettre ou par la presse, la grande majorité d’entre eux étant illettrés. Dans le Sud-Finistère, ils ajoutent que peu nombreux et dispersés, les Algériens ne sauraient s’organiser politiquement en tant que tels59. Ce n’est qu’en janvier 1953 que la première section d’un mouvement nationaliste se serait implantée à Brest après le passage d’un émissaire parisien du Mouvement pour le triomphe des libertés démocratiques (MTLD), principal parti nationaliste algérien. Cette section, sur le positionnement de laquelle les RG ne s’interrogent pas à l’heure où le parti est au bord de la scission entre « centralistes » et « messalistes », serait animée par trois ouvriers dont certains sont sympathisants ou membres du PCF (Hafid Hammou, Cherif Melikech, Mohammed Rebbati), et aurait une existence quasi-clandestine se bornant à des réunions privées suivies aux domiciles de militants par une dizaine de personnes60. Cette activité semble prendre fin après la dissolution du MTLD par le gouvernement français au lendemain du déclenchement de l’insurrection, en novembre 1954, sans que les membres de la section ne paraissent basculer dans l’activité clandestine au service de l’un des deux héritiers du parti, le MNA et le FLN61.

La guerre d’indépendance ne marque pas de rupture dans le regard des autorités sur les opinions des Algériens, si ce n’est que les rapports sur leur « état d’esprit » connaissent une forte inflation du fait des demandes du gouvernement, de plus en plus fortes à partir de 1958. Leurs rédacteurs notent régulièrement leur incapacité à pénétrer les opinions des Algériens. « [Rien] ne permet de se faire une idée exacte de leurs sentiments sur les changements survenus en Algérie »62, notent les RG en juin 1958 à propos des Algériens du département, en précisant en août 1959 qu’« [il] est certain que les événements d’Algérie marquent profondément la colonie Musulmane, mais, par prudence, semble-t-il, chacun s’abstient de les commenter »63. En 1955-1956, les RG de Brest signalent qu’un ouvrier nationaliste de 19 ans organiserait en privé des commentaires des événements, et ceux de Quimper indiquent que des Algériens écoutent des émissions de radio en langue arabe ou, pour les rares lettrés, s’informent dans la presse locale64. Mais dans ces deux cas comme dans l’ensemble des autres rapports, les services de renseignements ignorent tout de ce qui se dit dans les conversations privées ou de ce qui est retenu et pensé des informations médiatiques. Les manifestations de rue – auxquelles les Algériens ne semblent pas participer, notamment en mai 1958 – et les nombreuses consultations électorales de l’année 1958 ne leur sont pas d’une plus grande utilité : visiblement absents lors des réunions électorales, les Algériens ne sont pas plus de 10 à 20% à être inscrits, et pas plus de 50% à voter parmi les inscrits65. Les conversations que tentent d’avoir des agents ou des informateurs des RG avec des Algériens sont tout aussi infructueuses, ce qui entraîne parfois des considérations racialistes sur « la relative bonne foi de la mystérieuse âme orientale » d’Algériens qui chercheraient toujours à « abonder dans le sens de l’interlocuteur et [à] tirer le meilleur parti possible de la conversation »66.

Remplis d’incertitudes, les services de renseignements ne se font toutefois aucune illusion sur les sentiments politiques des Algériens. Dès mars 1956, les RG notent que s’ils semblent « indifférents aux événements d’Afrique du Nord […] en réalité leur sympathie va toute aux rebelles »67, idée réaffirmée constamment durant la guerre d’indépendance. Et s’ils tentent de diffuser parmi eux des publications favorables à l’Algérie française, c’est sans beaucoup de conviction et sans aucune prétention à mener une « action psychologique » comparable à celle mise en œuvre en Algérie où dans les territoires métropolitains à forte concentration algérienne. En octobre 1959 par exemple, les RG se félicitent du « respect intégral » par les Algériens de l’affiche reproduisant un discours du général de Gaulle apposée dans le foyer des Sans-Logis de Quimper, tout en précisant que cela les « rassure, sinon sur leurs sentiments véritables, du moins sur ceux qu’ils professent à l’égard des autorités »68. La position des autorités semble être la suivante : s’il va de soi que les Algériens sont acquis à la cause de la décolonisation et de l’indépendance – dont ils souhaitent un avènement rapide, qui mettrait fin à la guerre et au danger qui pèse sur leurs familles restées au pays –, l’important est qu’ils n’agissent pas depuis le Finistère au sein du MNA et du FLN.

Tract. Collection particulière.

Sur ce point, les services de renseignements sont formels : les tentatives de pénétration du MNA et du FLN parmi les Algériens du Finistère, principalement à Brest, se montrent très difficiles et souvent infructueuses tout au long de la guerre d’indépendance, alors qu’elles semblent plus efficaces à Lorient ou à Rennes69. L’existence de militants ou de sympathisants des deux mouvements ne fait toutefois pas de doute. En 1956-1957, c’est à travers les plaintes déposées par des Algériens agressés ou menacés de mort qu’ils apparaissent. En février 1956, quatre hommes en auraient ainsi agressé un autre qui refusait de cotiser pour le MNA, et deux des agresseurs sont suspectés d’avoir obtenu des versements relativement importants, dont certains auraient déjà été expédiés dans la région de Barika dont ils sont originaires70. Par la suite et jusqu’à la fin de la guerre, plusieurs Algériens porteront plainte contre d’autres ayant tenté de les forcer à cotiser pour le FLN71. En janvier 1957, moment de la grève de 8 jours lancée par le FLN, plusieurs non-grévistes sont également menacés de mort72. Cette grève semble être la seule grève nationaliste à être massivement suivie par les Algériens de Brest, sans que l’on sache dans quelles conditions les ouvriers ont décidé de la suivre73. La principale affaire concernant le FLN se produit en septembre 1957 à Brest : 57 personnes sont alors entendues – dont 16 reconnaissent avoir versé de l’argent aux collecteurs du FLN par peur de représailles –, et dix ouvriers, désignés comme membres de la cellule brestoise du FLN, sont jugés en février 195874. Le démantèlement, comme d’autres arrestations ultérieures, s’est effectué à la suite de délations venant d’Algériens, et les autorités sont persuadées que la grande majorité des Algériens de Brest « [ont vu] avec satisfaction appréhender […] la minorité d’éléments extrémistes qui les rançonnait »75. La présence – passagère ou non – d’individus liés ou soupçonnés d’être liés au FLN est signalée entre 1958 et 1961, et plusieurs sont arrêtés sans être semble-t-il parvenus à mener à bien leurs tentatives de collecte ou de réorganisation du Front76. Deux d’entre eux, visiblement déconsidérés par nombre d’Algériens de Brest, sont (curieusement ?) condamnés pour des crimes de droit commun commis en 1957 : l’un pour l’agression d’un couple de Français et le viol de l’épouse – élément qu’il nie en affirmant avoir eu des rapports sexuels réguliers et consentants avec elle –, l’autre pour le meurtre de sa concubine française – mais il retrouvera rapidement la liberté et participera à la reconstitution du FLN à Brest en 196277. Ce n’est en effet qu’après la signature des accords d’Évian (mars 1962) que l’existence d’une organisation FLN, visiblement reconstituée avec l’aide de cadres envoyés d’Amiens et de Rennes, est signalée avec certitude. Alors que les précédentes tentatives se limitaient semble-t-il à la collecte de fonds – aucune propagande du FLN n’étant par exemple signalée parmi les Algériens –, l’organisation de 1962, qui collecte toujours des fonds, tente visiblement d’agir sur le plan « moral » et éducatif (interdiction de boire, de fumer, des jeux d’argent, incitation à travailler, alphabétisation), ce qui aurait entraîné diverses tensions avec les Algériens de Brest et l’ouverture d’une procédure contre son principal responsable, Mouldi Laieb, déjà condamné à une peine de prison pour son activité politique à Rennes en 196078. Cette section du FLN agit enfin au grand jour le 5 juillet 1962, en célébrant l’indépendance algérienne et l’« amitié entre les peuples français et algérien » à la Maison des syndicats de Brest, en présence de représentants des partis de gauche et des syndicats et de « presque toute la colonie nord-africaine de l’arrondissement de Brest »79.

Cette faible implantation du FLN dans le Finistère résulte-t-elle d’un intérêt limité de l’organisation pour les Algériens du département, ou du peu d’empressement de ces derniers à rejoindre le Front ? On peut évoquer plusieurs facteurs pour expliquer les efforts semble-t-il limités du FLN pour s’y implanter : le petit nombre d’Algériens, et surtout la faible proportion parmi eux de travailleurs disposant de revenus réguliers pouvant alimenter les fonds de l’organisation – qui restent la priorité de la Fédération de France du FLN –, mais aussi le caractère doublement périphérique – sur le plan économique et géographique – de la Bretagne au regard des préoccupations du Front, la région se trouvant loin des centres industriels à forte population algérienne ainsi que des frontières stratégiques permettant d’exfiltrer des militants ou des fonds vers l’étranger80. On peut ajouter que l’absence de présence affirmée dans le Finistère de tout mouvement anticolonialiste algérien avant la guerre constitue un obstacle objectif à l’implantation du FLN, de même que la surveillance et la répression dont font l’objet les Algériens politisés ou soupçonnés de l’être. Certains de ces facteurs sont signalés par les autorités, qui ajoutent que plusieurs tentatives d’implantation se sont heurtées à des réticences et à des délations de la part des Algériens de Brest, que des responsables du FLN jugeraient par ailleurs indignes de confiance en raison de l’« ivrognerie » répandue parmi eux81.

Dans un bar. Sans lieu ni date. Collection particulière.

On comprend dès lors pourquoi les rapports rédigés durant la guerre d’indépendance, et particulièrement les nombreux rapports trimestriels sur la « population musulmane » produits par divers services à partir de 1958, décrivent quasi-systématiquement la population algérienne comme une population « calme » et le Finistère comme une « région tranquille », à l’image de la majeure partie de l’Ouest de la France. Cependant, à partir de 1958, le ministère de l’Intérieur, relayé par les préfets, alerte les administrations des départements réputés « tranquilles » sur la fragilité de cette situation. En raison même de leur « tranquillité », plusieurs départements faiblement peuplés d’Algériens attirent en effet diverses catégories d’Algériens engagés dans un camp du conflit en cours, après les opérations de répression menées sur l’ensemble du territoire métropolitain en 1957 : d’une part, des « partisans de [la] cause [française] par trop menacés ailleurs », notamment des informateurs de la police qui fuient les représailles du FLN ; d’autre part, des « agents terroristes brûlés, venus se faire oublier dans une région encore tranquille »82, c’est-à-dire des membres du FLN qui fuient la police. À ces deux catégories s’ajoutent des membres du MNA menacés de mort par le FLN, comme ce militant arrivé à Quimper en février 195883, et des membres du FLN interdits de séjour dans leur département d’origine, notamment après leur libération de prison ou de camp d’internement84. Quatre anciens détenus d’une prison du Nord, âgés de 26 à 30 ans et originaires de la même commune de Kabylie, s’installent ainsi au foyer du Bouguen à Brest en septembre 1959 et se mettent à la recherche d’un travail85. Ces mouvements migratoires font craindre aux autorités l’implantation du FLN dans de nouvelles régions et l’extension de violences inter-algériennes dans des lieux jusqu’ici épargnés86. Ils entraînent par ailleurs des tensions entre administrations, les autorités des départements d’origine recommandant aux « réfugiés » certains départements sans en avertir les autorités ni se soucier des possibilités d’embauche et d’hébergement sur place. Les RG de Quimper enquêtent ainsi en mai 1960 auprès des services parisiens à propos d’Ali M. pour vérifier les déclarations qu’il a faites à la police. Ouvrier à l’origine d’une opération de police contre le FLN en région parisienne, il gagne la Bretagne sur conseil de la police et s’installe dans un village du centre Finistère chez la mère d’un hôtelier de région parisienne, où il se fait passer pour « Alain M. », sans modifier son patronyme dont les sonorités peuvent lui permettre de se prétendre Corse87.

Une population suspectée, encadrée, surveillée et contrôlée. L’inflexion de 1958

Malgré son « calme » supposé – dont se félicitent les autorités locales –, la population algérienne est constamment suspectée. Cette suspicion se manifeste par la surveillance très étroite dont elle fait l’objet et par le type de questionnements que les services de renseignements se posent à son égard. Mais les Algériens du Finistère perçoivent aussi directement leur statut de suspect à travers les contrôles policiers qu’ils subissent de manière très régulière. Sur l’ensemble de ces éléments, l’année 1958 marque une nette inflexion.

Avant d’analyser cette inflexion dans la surveillance et les méthodes « hard » du contrôle physique, signalons les difficultés de la seule tentative d’encadrement « soft » de la population algérienne par les autorités : la création du foyer nord-africain du Bouguen à Brest. On a vu qu’en 1953, les autorités ont décidé de regrouper les Algériens dans des baraquements spécifiques où ils ne seraient plus mêlés à des Français et pourraient choisir un gestionnaire algérien. Comment expliquer cette décision ? Lorsqu’ils ont à argumenter auprès de la hiérarchie administrative pour obtenir des subventions et défendre le maintien du foyer, le sous-préfet et le préfet avancent des arguments liés à l’ordre public. D’une part, écrit le sous-préfet fin 1954, « [la] cohabitation avec les ouvriers européens n’allait pas sans inconvénients et les interventions de la police [devenaient] de plus en plus fréquentes »88, notamment à la suite de heurts entre des résidents algériens et le gérant français89. D’autre part, insistant sur les conséquences heureuses de la création de ce foyer, le préfet écrit en février 1958 que « l’expérience avait été fertile afin de soustraire des Nord-Africains à l’influence du Parti Communiste »90. Faisant écho au ministère de l’Intérieur, qui affirmait en mai 1951 que la question du logement était une clé pour éviter de faire des Algériens des « antifrançais »91, le préfet affirme en 1958 que l’aide au fonctionnement de ce foyer peut permettre de « ne pas précipiter les membres de la colonie nord-africaine de la région brestoise dans les voies de la rébellion »92. En septembre 1954, cette attention des autorités se manifeste par la création de l’Association brestoise pour l’hébergement des Nord-Africains, qui se fixe pour objectif d’assurer une « aide matérielle et morale » et d’« améliorer [les] conditions d’hébergement »93. Cette association, qui ne comporte pas d’Algérien, regroupe des militaires, des policiers, des chefs d’entreprises, un responsable de la Caisse d’allocations familiales et des fonctionnaires de la sous-préfecture et du ministère du Logement et de la Reconstruction, qui suivent de très près le fonctionnement des lieux et valident l’élection du gérant par les résidents. Cette association compte ainsi en 1958 parmi les 135 associations dites d’action sociale à destination des Algériens de métropole subventionnées par le ministère de l’Intérieur, qui leur assigne un objectif politique94. Cependant, les difficultés de l’association explosent à partir de la fin 1957 : entre l’arrestation du gérant pour participation au FLN, le non-paiement des loyers et la désertion massive du foyer, l’échec de l’encadrement est patent. Le foyer est toutefois maintenu en vie par les subventions ministérielles, uniquement renouvelées pour des raisons de « maintien de l’ordre public »95 : le ministère de l’Intérieur affirme que l’optique de « charité pure » adoptée par l’association après 1957 est « en contradiction absolue avec toutes [ses] recommandations » et avec ce qu’il nomme l’« assistance aux travailleurs »96, pensée comme un projet de disciplinarisation sociale et politique des Algériens.

Contrôle de police, sans lieu ni date. Carte postale. Collection particulière.

Parallèlement à ce que les autorités vivent comme un échec de l’encadrement par « l’action sociale », les méthodes de surveillance, de contrôle et de répression directs des Algériens du Finistère sont renforcées à partir du début de l’année 1958, ce qui a déjà été souligné par des études à l’échelle parisienne et nationale et explique pourquoi les sources sont plus nombreuses à compter de cette date97. L’administration des « Nord-Africains » de France plonge ses racines dans l’entre-deux-guerres, et se manifeste par l’existence de structures spécifiquement chargées de les administrer ainsi que par l’utilisation de la catégorie « Nord-Africains » et de ses diverses variantes par les structures classiques. Lorsque démarre la guerre d’indépendance, les fonctionnaires finistériens de la Direction départementale du travail, de la police, de la gendarmerie et de l’administration (sous-)préfectorale sont déjà familiers de cette catégorie98. Mais l’année 1958 marque un seuil dans la volonté de connaissance et de contrôle de la population algérienne. Le ministère de l’Intérieur et ses relais locaux, les préfets de région (Inspecteurs généraux de l’administration en mission extraordinaire, IGAME), auxquels sont rattachés depuis 1952 des Conseillers techniques des affaires musulmanes (CTAM) venus d’Algérie, exigent en effet des préfets des départements – y compris « tranquilles » – des recensements très précis accompagnés de rapports détaillés sur « l’état d’esprit » des Algériens. À partir d’avril 1958, le préfet du Finistère adresse ainsi à l’IGAME de Rennes des rapports trimestriels rédigés à partir de rapports et de statistiques établis par les sous-préfets, les RG, la police et la gendarmerie. À compter de cette même date, les IGAME de toutes les régions doivent adresser chaque mois un rapport au Service de coordination des informations nord-africaines (SCINA, créé en 1955), qui transmet ses propres rapports au Service des affaires musulmanes et de l’action sociale du ministère de l’Intérieur99. Ce dernier organise fin 1958 une première réunion nationale des CTAM, durant laquelle les interlocuteurs civils et militaires bretons s’expriment d’ailleurs peu100. De son côté, la IIIe région militaire rédige à partir de janvier 1958 des synthèses bimensuelles sur les « activités séparatistes »101. À cette réorganisation du renseignement s’ajoute un renforcement des « contrôles inopinés » de police, exigé par le préfet du Finistère en janvier 1958102.

L’été 1958 marque une nouveau seuil dans la suspicion, la surveillance et le contrôle du fait de l’ouverture d’un « second front » par le FLN en métropole et du surplus de légitimité que ces actions armées offrent à des revendications policières déjà anciennes de traitement différencié des Algériens : en août, l’Organisation spéciale (OS) attaque des militaires et des policiers (déjà ciblés début 1958) et des infrastructures économiques stratégiques (notamment pétrolières)103. La crainte que ce « second front » ne gagne la Bretagne s’exprime dès juin 1958104. Et si les autorités semblent se concentrer prioritairement sur les Algériens venus d’autres départements – dont on craint qu’ils soient des « terroristes » envoyés par le FLN –, leurs mesures s’appliquent à l’ensemble des Algériens. La surveillance est considérablement renforcée à partir d’août 1958, mois durant lequel des barrages de gendarmerie et de police sont placés sur les routes et contrôlent systématiquement les automobilistes « nord-africains », dont les véhicules ont été au préalable recensés par la police105. En septembre, cinq policiers sont affectés au contrôle des trains en provenance de Paris et de Lyon en gare de Quimper. Ils devront questionner et fouiller « tout individu d’origine Nord-Africaine » et sommer ceux n’étant pas recensés dans l’agglomération de les accompagner au commissariat. Deux des agents devront se tenir le « pistolet chargé sans cran de sûreté, placé dans l’étui à revolver, la main sur la crosse du pistolet »106. En octobre sont lancées des enquêtes concernant l’éventualité de vols de schémas dans les armoires de signalisation ferroviaire, tandis que les autorités s’assurent qu’aucun Algérien n’est employé par des entreprises travaillant pour la SCNF107. En 1960, de nouvelles craintes de sabotages, renforcées par la saisie sur un responsable de l’OS du FLN à Paris d’une carte de Bretagne où semblent être indiqués des points stratégiques, apparaîtront à Brest – où la gendarmerie étudie la possibilité d’actions d’« hommes grenouilles » « volontaires de la mort » pour saboter le porte-avions Clémenceau – ou à Concarneau – où la négligence d’un docker qui a laissé une échelle dans le dépôt des pétroles du port fait immédiatement craindre un sabotage du FLN –, mais aucun attentat ne se produira dans le département et aucun potentiel « terroriste » n’y sera identifié108.

Le porte-avions Clemenceau. Carte postale. Collection particulière.

Pour les Algériens du Finistère, les conséquences de cette inflexion sécuritaire sont immédiates et durables. À titre d’exemple, en août 1958, 154 contrôles sont effectués sur des automobilistes ou des voyageurs algériens, et 244 dans les dix premiers jours d’octobre 1960. Lors des deux dernières semaines d’août 1958, alors qu’ils ne sont pas plus de 240 dans le département, 107 Algériens sont interpelés pour un contrôle d’identité, contre 38 en deux semaines en janvier 1958 – période que le préfet considérait déjà comme un moment d’intensification des contrôles109. Plus nombreux qu’avant l’été 1958, ces contrôles, auxquels s’ajoutent des perquisitions parfois lancées le même matin sur l’ensemble des domiciles des Algériens d’une ville (notamment à Brest et Quimper) en 1958-1959110, donnent lieu à des centaines de fiches individuelles de renseignements qui permettent d’alimenter un vaste fichier constamment mis à jour111. Cette pression policière pèse donc fortement sur le quotidien des Algériens, a fortiori si elle s’exerce publiquement et déborde sur des membres de leur famille. C’est ce que dénonce A. A. dans une lettre au préfet du Finistère en mars 1961. Ancien militaire de l’armée française, concubin (ou époux ?) d’une Bretonne d’origine et en charge de quatre enfants, cet ancien militant du MTLD, que 33 pétitionnaires du foyer du Bouguen souhaitaient voir devenir leur gérant en juin 1957, accompagne régulièrement sa compagne pour vendre sur les marchés :

« La Gendarmerie me contrôle mes papiers d’identité très souvent chose qui est tout à fait normal vu la situation actuelle, mais je ne comprends pas que dès qu’ils me voyent avec mon amis on la contrôle pour ses papiers de foraine ce serait normal s’il y avait un contrôle pour tous les forains ou au moins pour une partie mais non ? il est vraiment injuste qu’elle soit toujours la seule à être controlée les autres forains que ce soyent Français ou étrangers n’ont jamais aucun contrôle, vous me comprendrez très bien car sur les marchés des campagnes en plein milieu de marché ça [mot illisible] les curieux, ça nous empêche de travailler car vu que nous sommes les seuls tous les gens nous remarquent et ma foi pour qui nous prend on peut être pour des suspects nous sommes vraiment très gênée de la situation. »112

Conscients du caractère discriminatoire et humiliant de ces opérations de police, les RG de Quimper indiquent en août 1959 que des Algériens affirment « discrètement » leur déception et leur « rancœur » de ne pas être traités comme la population métropolitaine113.
Cette pression pèse aussi sur les lieux de vie et de sociabilité spécifiquement dédiés ou particulièrement fréquentés par les Algériens. À partir de 1958, le sous-préfet de Brest indique que les quelques cafés attirant des Algériens ayant subi de nombreux contrôles de police, la « clientèle nord-africaine » ne fréquente en nombre aucun endroit, et que la police a « [évité] ainsi que se créent des abcès de fixation qui sont souvent à l’origine d’incidents graves et de propagandes subversives »114. Cette remarque fait écho à une note du ministère de l’Intérieur diffusée en mars 1959 à propos des foyers d’Algériens. Reprochant à ces foyers « de regrouper ces travailleurs entre eux, de favoriser ainsi leur tendance à se replier sur eux-mêmes […], à maintenir leur particularisme et à […] vivre comme des étrangers au sein de la population française », il envisageait la possibilité d’y admettre des « ouvriers français de souche et étrangers » afin de « contrecarrer cette constitution de petites cellules, impénétrables, […] génératrices d’aigreur et d’agressivité dans la mesure où, se sentant minoritaires, ils font des complexes d’infériorité »115. Le rapport des autorités à ces foyers reste ainsi ambigu : présentant pour elles l’avantage de regrouper nombre d’Algériens en un seul lieu où ils peuvent être aisément surveillés, ils sont perçus comme des « abcès » portant en eux la promesse de désordres sociaux et politiques. Quoi qu’il en soit, le foyer brestois du Bouguen est comme on l’a vu déserté par les Algériens à partir de la fin 1957, phénomène auquel la pression policière – perquisitions et contrôles – n’est probablement pas étrangère.

La suspicion à l’égard des Algériens a par ailleurs des conséquences économiques directes à Brest, port militaire, à la fin 1958. Dès août 1956, des instructions interministérielles préconisaient de contrôler le personnel « nord-africain » des entreprises de Défense nationale116, et en 1958, les autorités notent la tendance des employeurs de nombreux secteurs, notamment pétroliers, à ne plus recruter et à licencier les Algériens, par méfiance mais aussi du fait des absences dues aux gardes à vue et autres contrôles policiers117. À Brest, dès 1955, l’amiral préfet maritime renforce la surveillance de la cinquantaine d’Algériens employés par une dizaine d’entreprises dans l’Arsenal, par crainte de sabotages118. Mais c’est en décembre 1958 qu’une mesure de discrimination radicale est décidée par les autorités militaires : l’accès aux navires de guerre est interdit à tout Algérien. Le carénage étant l’une de leurs principales activités, une protestation est immédiatement rédigée au nom des résidents algériens par le gérant du foyer du Bouguen, Layachi Dehimi, qui dénonce un « racisme (aveugle) » et un « esprit de domination » en contradiction avec les paroles égalitaristes et « [enthousiasmantes] » du général de Gaulle119. L’Association brestoise pour l’hébergement des Nord-Africains, présidée par le dirigeant d’une entreprise de carénage, se joint au préfet du Finistère pour protester auprès du ministère des Armées et du préfet maritime. Les tensions entre les autorités civiles et militaires sont importantes sur ce point : pour les premières, le chômage et le sentiment d’injustice provoqués par ces discriminations risquent d’être préjudiciables à l’ordre public, et elles tentent de convaincre les autorités militaires que ce risque est plus sérieux que celui d’actions armées dans une ville où le FLN ne parvient pas à s’implanter120. Ces protestations restent toutefois vaines jusqu’à la fin de guerre d’indépendance, même si des autorisations provisoires de travailler sur les navires de guerre sont délivrées à des Algériens début 1960121.

 

Des points de rencontres entre Finistériens et Algériens ?

Les relations entre Algériens et Breton.ne.s au prisme des archives policières

Après le 13 mai 1958, des scènes de « fraternisation » entre Algériens et Français sont organisées par l’armée en Algérie. Une partie des autorités – surtout militaires – semble sincèrement croire en la possibilité d’un « rapprochement » entre les deux populations dans le cadre de l’Algérie française, et cette croyance gagne la métropole, où des rapports évoquent une « détente » au printemps 1958, particulièrement dans les relations des Algériens avec la police122. En septembre, le ministre de l’Intérieur affirme que pour construire ces rapports « fraternels », la population de métropole doit témoigner aux Algériens qu’ils sont des « citoyens à part entière »123. Ces vœux se heurtent rapidement à d’autres considérations : après la vague d’attentats de l’été 1958, les CTAM évoquent à l’échelle nationale une « hostilité certaine à l’égard des musulmans » de la part de la « population française de souche »124.

Vue de Quimper dans les années 1950. Carte postale (détail). Collection particulière.

Qu’en est-il dans le Finistère ? Dès juin, le préfet note que « la population métropolitaine n’a fait aucun pas vers une plus grande compréhension pour la petite minorité musulmane ». Il ajoute qu’« [elle] a continué à observer à son égard la tolérance qu’elle a toujours montrée, sans plus »125. Cette idée d’une « tolérance » ou, plus fréquemment, de rapports qui seraient « corrects » « sans être véritablement cordiaux »126, c’est-à-dire dénués d’« animosité »127, amène parfois les RG à établir des comparaisons à l’avantage de la Bretagne, comme en 1959 : « Les éléments [algériens] qui viennent des grands centres se plaisent généralement à dire que c’est en Bretagne que la population les voit avec le plus de sympathie »128. Cependant, ces mêmes rapports affirment que « [dans] l’ensemble […] les milieux métropolitains évitent les contacts avec les Nord-Africains »129. Ces considérations ne vont pas sans poser de problème en raison des généralisations sur lesquelles elles reposent et de l’utilisation a priori d’une catégorisation « communautaire » pour étudier des relations interindividuelles. Il est toutefois possible, à travers ces sources policières, de proposer certaines distinctions qui gagneraient à être interrogées par des témoignages ou des sources privées émanant d’Algériens et de Français.

À lire les archives, il semblerait qu’avant comme pendant la guerre d’indépendance, pour un nombre important d’Algériens, les relations avec des Français se limitent au cadre professionnel. « Les algériens se fréquentent entre eux », écrivent ainsi les RG de Brest en 1953, « sachant que les français de la métropole ne souhaitent pas de relations avec eux »130. Pour les ouvriers, si les autorités locales notent parfois l’« estime » que leur porteraient leurs collègues131, dans le Finistère comme au niveau national, les contacts semblent cesser « à la sortie de l’atelier »132. Quant aux marchands ambulants, ils ne semblent pas avoir de relations autres que celle de commerçant à client. En 1954 toutefois, les RG indiquent que parmi les saisonniers habituels du Sud-Finistère, certains « se sont familiarisés avec la langue bretonne, ce qui leur permet des contacts plus étroits dans les campagnes, où la population est en général très méfiante vis-à-vis de ceux qu’elle considère comme des étrangers »133. Cette connaissance du breton, si elle est avérée, ne saurait s’être réalisée par les simples contacts furtifs du porte-à-porte, et suppose l’existence de lieux de sociabilité communs. Sur ce point, les archives restent relativement silencieuses. Au détour d’un rapport de police, on apprend toutefois que tel propos à teneur politique d’un Algérien a été tenu au café, qu’un autre a été aperçu à la sortie du cinéma d’une petite commune discutant avec deux communistes français, ou que des ouvriers brestois et des élèves de l’école d’agriculture de Bréhoulou jouent dans des équipes de football de Brest et de Fouesnant, où leurs coéquipiers et le public des rencontres sportives leur témoigneraient une certaine sympathie134. Et même si cela reste rare, certains rapports indiquent en 1954 comme en 1958 de bonnes relations entre Algériens et Brestois – notamment communistes – dans les quartiers ouvriers du Bouguen et du Polygone135.

Surtout, le fait que 15 à 20% des Algériens du département soient en couple avec une Française entre 1958 et 1962 – chiffres considérables au regard des moyennes nationales, mais qui semblent comparables à ceux d’autres régions à faible densité algérienne136 –, et qu’une centaine d’enfants soient nés de ces unions, cadre mal avec l’idée selon laquelle les « contacts » extra-professionnels entre Algériens et Français seraient limités voire inexistants, d’autant plus que les Algériens sont majoritairement employés dans des secteurs masculins137. Pour flirter, avoir des relations sexuelles occasionnelles, devenir concubin voire se marier, il faut à l’évidence avoir la possibilité de lier connaissance. Prenons l’exemple de M. A., ouvrier dans l’automobile dont le « comportement pro-français » semble lui avoir attiré les foudres du FLN à Paris, et qui rencontre une Bretonne lors d’une convalescence à Nice. Le couple s’installe à Concarneau en 1958, se marie en 1959 et donne naissance a une petite fille en 1960138. Mais en-dehors de leur lieu de résidence – généralement dans des baraquements brestois –, on ne saura rien de la soixantaine d’autres couples, et notamment de la réception de ces unions par leur entourage ou du devenir de leurs enfants, si ce n’est à travers quelques considérations culturalistes des services de police. En 1957, les RG de Brest écrivent ainsi qu’un Algérien de 40 ans, est « marié à une Française métropolitaine et, de ce fait, est tenu à l’écart par ses camarades »139, tandis que le préfet affirme en 1959 qu’« [étant] donné le caractère particulier des conjoints [musulmans], on compte peu d’unions harmonieuses »140.

A Brest, la préfecture maritime, probablement dans les années 1950. Carte postale. Collection particulière.

L’idée d’une population algérienne « tolérée » mais en quelque sorte ignorée par les Finistériens disparaît parfois au profit de l’idée d’une méfiance voire d’une hostilité. C’est le cas lorsqu’est questionnée l’attitude du voisinage du foyer du Bouguen à Brest. Avant la création du foyer, les heurts entre ouvriers algériens et français étaient semble-t-il fréquents dans le quartier141. S’ils se font rares après 1953, les voisins du foyer n’en partageraient pas moins « une méfiance latente »142 envers les Algériens, qui serait tantôt en sommeil143, tantôt éveillée, en fonction de l’existence d’incidents impliquant des Algériens. Ces incidents, souvent liés à la consommation d’alcool et mettant aux prises des Algériens – ceux mettant aux prises des Algériens et des Français étant « véritablement l’exception »144 – seraient à l’origine d’un « sentiment d’insécurité »145. Il en irait de même à Quimper, où les RG écrivent qu’« il est un fait que la population se passerait de leur voisinage, comme à Locmaria-Quimper par exemple, où les Musulmans, hébergés aux Sans-Logis, se montrent parfois turbulents, surtout lorsqu’ils se trouvent en état d’ébriété »146. Ces rapports sont symptomatiques de la grille de lecture raciale de la police : alors que les sentiments d’anxiété ou d’agacement face à des voisins perçus comme violents ou bruyants sont d’une grande banalité, ils sont interprétés comme étant dirigés contre les Algériens, et non contre des voisins. Cette grille de lecture est véhiculée par la presse locale, qui précise systématiquement l’origine « nord-africaine » des individus impliqués dans des faits divers, ce qui provoque parfois des communiqués rédigés par des Algériens pour enjoindre la population à ne pas faire de l’acte d’un individu qui se trouve être Algérien l’acte de tous les Algériens147. Il reste difficile de savoir jusqu’à quel point cette grille de lecture est partagée dans la population.

Il est plus aisé de trouver des manifestations explicites de racisme à l’encontre des Algériens, que les autorités désapprouvent d’ailleurs souvent malgré leur politique sécuritaire qui le légitime et en dépit de leur propre tendance à véhiculer des interprétations racialistes. La guerre, le colonialisme, et l’expérience qu’en ont certains Finistériens jouent un rôle évident dans l’expression de ce racisme. À plusieurs reprises, la police rapporte des incidents provoqués par des Bretons ayant combattu ou vécu en Algérie. À titre d’exemple, à partir de 1956, un camp de vacances établi par la préfecture de la Seine à Keridreuff (Pont-Croix) accueille une cinquantaine d’ouvriers algériens durant le mois d’août ; lors du bal du 15 août 1956, un incident est provoqué par un instituteur anciennement en poste en Algérie et par un sous-officier en permission, qui s’en prennent verbalement aux vacanciers algériens148. Le même mois, un caporal de l’infanterie coloniale se bat avec deux Algériens dans un bar de Brest149. Fin 1959, le préfet affirme que « certains patrons ont signalé au service de la main-d’œuvre que les jeunes ouvriers ayant servi dans l’Armée, en Algérie, sont hostiles à l’embauchage des Algériens musulmans dans leurs entreprises », mais il ajoute qu’il s’agit peut-être « uniquement d’un prétexte de la part des patrons qui ne recherchent pas l’emploi d’une main-d’œuvre réputée pour son manque de courage et son instabilité »150. S’ils sont mis en avant par les autorités, les anciens appelés ou coloniaux bretons ne sont de fait pas les seuls à exprimer leur racisme. En 1956, des ouvriers algériens de Brest sont régulièrement insultés sur les chantiers, ce qui provoque la publication dans la presse d’un communiqué rédigé par le gérant du foyer du Bouguen. Dans le Sud-Finistère, les marchands ambulants se plaignent au même moment de leurs difficultés croissantes à vendre au porte-à-porte, qu’ils interpréteraient comme une conséquence de la guerre151. Après les attentats de l’été 1958, le préfet évoque une « population européenne […] qui se montre nerveuse et risque, au cas où la situation s’aggraverait, de devenir franchement hostile »152. Du fait de ces attentats, les hôtels acceptent de moins en moins d’Algériens – dont la seule présence ferait fuir les clients français –, et les RG donnent le cas d’« un Algérien, traqué par le FLN, et plus ou moins venu se réfugier à Rosporden (où il avait des chances de trouver du travail) [qui] a préféré quitter la région devant l’attitude des commerçants, qui hésitaient même à lui servir à manger »153. Ces constats n’empêchent pas les autorités de relativiser voire de nier à l’occasion les « discriminations raciales » à l’embauche en accusant les Algériens d’être « ni sérieux, ni courageux […] très instables et peu disciplinés »154. Constatés, regrettés ou relativisés par les autorités, le racisme et les discriminations envers les Algériens ne font en définitive aucun doute, et s’ils restent difficiles à quantifier, leur expression ouverte semble bien s’accentuer durant la guerre. Toutefois, l’idée d’une rupture provoquée par la guerre puis par les attentats de 1958 doit être relativisée. En 1952 déjà, le maire de Brest et le préfet du Finistère mettaient par exemple en garde le gouvernement contre le « danger que constitue pour la tranquillité de [la] Ville l’afflux incessant de travailleurs Nord-Africains »155, en mettant notamment en avant les craintes qu’ils inspireraient aux ouvriers français156, tandis qu’en 1953, les RG de Brest indiquaient que « peu de propriétaires [consentaient] à louer des chambres [aux Nord-Africains], leur reprochant souvent leur manque de propreté »157.

L'hôtel Aux voyageurs de Brest au début des années 1950. Carte postale (détail), collection particulière.

Qu’en est-il des rencontres entre Algériens et Finistériens au sein d’espaces associatifs, syndicaux ou politiques ? Les uns et les autres ne fréquentent visiblement pas d’associations communes, y compris les associations d’anciens combattants, qui ne recherchent pas l’adhésion des Algériens et les privent ainsi de leur soutien pour obtenir des droits liés à leur qualité d’anciens militaires158. Les seules associations qui semblent être au contact d’Algériens sont des structures charitables « d’obédience catholique »159 dans le domaine de l’hébergement et de l’assistance alimentaire à Quimper, ou dans celui de l’alphabétisation à Brest. Mais pour les autorités – sans que l’on sache si elles s’appuient sur des propos que leur auraient tenus des bénévoles catholiques –, les Algériens décourageraient « les bonnes volontés susceptibles de leur venir en aide »160 par une agressivité à l’égard des religieuses, un non-respect des lieux d’hébergement et un refus de se rendre aux cours d’alphabétisation, qui auraient entraîné en 1960-1961 la fermeture du foyer des Sans-Logis de Quimper et la cessation de la proposition de cours161. Dans le champ politique et syndical, alors que des adhérents à la CGT et au PCF étaient signalés avant la guerre d’indépendance, le préfet écrit en 1961 que « [les] syndicats ou partis d’extrême gauche ignorent la présence dans le Finistère d’une communauté algérienne trop peu nombreuse et si peu évoluée pour présenter un intérêt politique », en précisant : « [on] se fera facilement le champion de la défense des Musulmans mais on ne fera aucun effort pour établir des contacts humains ou alors on tombera dans un paternalisme démodé »162. À aucun moment de la guerre les autorités ne signalent de tentatives des partis de gauche d’entrer en contact avec les Algériens ou, par exemple, de condamner les contrôles policiers ou les discriminations. Les RG affirment par ailleurs qu’étant donnée l’absence de tout « contact suivi entre [la population algérienne] et les métropolitains »163, aucun Finistérien n’est susceptible de venir en aide au FLN – les seules enquêtes en cette direction étant menées à la demande des services parisiens à propos de Bretonnes vivant à Paris164. Lors de la fête pour l’indépendance et l’« amitié entre les peuples français et algérien » organisée par le FLN le 5 juillet 1962 à Brest, le responsable du Front aurait certes remercié les partis et syndicats présents pour leur aide apportée à la « libération du peuple algérien », mais il aurait aussi invité la centaine d’Algériens présents « à se réconcilier avec la communauté européenne en vue d’une franche collaboration »165. À en croire ces archives, la mobilisation des mouvements de gauche contre la guerre ne se serait donc pas accompagnée dans le Finistère d’une volonté de tisser des liens avec des Algériens. D’autres sources permettent toutefois d’appréhender des relations que les autorités paraissent avoir ignorées.

Une autre fraternisation. Des Algériens et des lycéen.ne.s à Morlaix

Mariannick Ledan naît à Morlaix en 1943, à quelques jours du bombardement allié du 29 janvier 1943, durant lequel elle manque de mourir : sa maison se trouve au pied du viaduc, sur ce qui deviendra la place des Otages, nommée ainsi en mémoire des 59 Morlaisiens déportés en décembre 1943 par les occupants nazis en représailles d’une action armée menée par un résistant communiste contre le Foyer du soldat allemand. Comme bien d’autres enfants de la guerre, les récits familiaux, locaux ou nationaux de l’occupation, de la résistance et des violences nazies contribuent dès son jeune âge à structurer sa vision du monde – même si c’est presque fortuitement qu’elle apprendra que ses parents transportaient du matériel destiné à un maquis de la région dans le fond de sa poussette, action que sa mère lui présentera comme un fait banal : « c’était rien, tout le monde faisait ça ! »166. Une dizaine d’années après sa naissance, c’est une autre guerre et ses échos locaux qui bouleversent son rapport au monde, de même que celui d’un petit groupe de lycéennes et de lycéens dont elle fait partie et qui entreprend d’agir pour l’Algérie et les Algériens depuis Morlaix.

Vue de Morlaix au début des années 1950. Carte postale (détail), collection particulière.

Interrogée sur son enfance, Mariannick Ledan insiste sur les espaces de « liberté » qu’elle a su se créer ou s’approprier, avant tout engagement politique, dans sa famille, à l’école ou dans le scoutisme, en dépit des normes de genre et d’un encadrement religieux qui auraient pu la contenir dans un rôle social stéréotypé. Après le décès de son père alors qu’elle est âgée de 5 ans, elle est élevée par sa mère, secrétaire de mairie puis comptable à la chambre de commerce, et sa grand-mère qui, originaire de Plougouven, tient un café à Morlaix. Et si son jeune frère, qui vit avec trois femmes, se sent « investi d’un rôle protecteur », elle peut compter à l’adolescence sur la confiance de sa mère pour sortir et être « très libre ». Cette liberté, la jeune femme l’entretient au sein des Scouts de France, où elle devient cheftaine vers 1957 et encadre les activités de garçons entre 9 et 12 ans. Bien qu’elle ait été élevée dans la religion catholique, cette entrée en scoutisme résulte davantage de la logique sociale ambiante que d’une vocation religieuse, puisqu’elle se définit assez vite comme agnostique. À quelques reprises, elle organise avec un ami chef de troupe aux Éclaireurs de France des jeux communs aux deux mouvements. Cette expérience prend fin devant la désapprobation de leurs responsables respectifs face à cet « œcuménisme » ayant qui plus est le tort de mêler des chefs scouts des deux sexes. Il y a néanmoins là un lien avec son engagement politique. Son ami éclaireur, le lycéen André Breton – qu’on retrouvera parmi les fondateurs d’un Comité antifasciste contre l’Organisation armée secrète (OAS) à Morlaix en janvier 1962167 –, s’engage en effet avec elle sur la question algérienne. À l’inverse, son responsable scout, l’ancien résistant Michel Le Bars, de quinze ans son aîné, commerçant puis journaliste à Ouest-France, est partisan de l’Algérie française et désapprouve son engagement, l’interpelant lors des manifestations pour la « paix en Algérie » pour tenter de la dissuader d’y participer.

Mariannick Ledan dit aussi avoir trouvé un « grand climat de liberté » chez les Filles du Saint-Esprit, à Notre Dame du Mur, davantage qu’au lycée public où elle redoublera sa Terminale en 1962. Elle se souvient de religieuses « hors-normes » et « remarquables », qui nouent des « rapports chaleureux » avec leurs élèves et encouragent leur liberté de pensée et leur curiosité intellectuelle en organisant des séances de cinéma, en autorisant l’affichage de journaux – y compris L’Humanité – dans les salles de classe et en acceptant de débattre de l’actualité, tout en autorisant leurs élèves à organiser dans les locaux de l’établissement des fêtes de fin d’année avec les garçons des classes de Terminale mixtes. C’est auprès de certaines de ces enseignantes, bien plus que parmi les autres adultes de son entourage, qu’elle dit avoir trouvé une oreille attentive et bienveillante lorsqu’elle fait état en classe de ses troubles concernant la guerre menée par l’armée française en Algérie.

Comment cette guerre fait-elle apparition dans la vie d’une jeune Morlaisienne des années 1950 ? Par la presse et la radio, d’abord, mais aussi par la famille : la belle-sœur d’une tante et sa famille vivent à Bône (Annaba), et leurs parents de Morlaix se montrent « inquiets pour eux ». Mariannick Ledan se souvient aussi d’avoir surpris deux conversations en 1956-1957 : la première entre des clients du café de sa grand-mère, qui désapprouvaient la « lâcheté » de jeunes appelés s’étant coupé un doigt pour ne pas avoir à rejoindre l’Algérie ; la seconde entre son parrain, déclarant que « pour un Français tué, on devrait tuer dix fellaghas », et sa grand-mère, lui rétorquant, indignée, « parce que pour vous, un Algérien vaut dix fois moins qu’un Français ! ». Mais comme beaucoup de jeunes de France qui s’engagent sur la question algérienne sans politisation préalable, ce sont surtout les méthodes de l’armée française, sur lesquelles la jeune femme tente de s’informer, qui la jettent dans un trouble profond. Les années 1957-1958, qui voient éclater publiquement la question de la torture, sont à ce titre charnière, entre le début de l’affaire Maurice Audin et la parution de La Question d’Henri Alleg168. Marquée par les récits des tortures de la Gestapo et par cette « mémoire de la résistance »169 qui caractérise nombre d’acteurs du mouvement d’opposition à la guerre et/ou de soutien aux nationalistes algériens, Mariannick Ledan fait une « dépression nerveuse » durant son année de Seconde, en 1958-1959, qu’elle explique par son impuissance et sa colère face au « déni des adultes qui [les] entouraient ». Ces derniers restent incrédules face aux documents qu’elle leur montre sur les violences de l’armée française, qu’ils qualifient de « propagande », quand ils ne désapprouvent pas les jeunes lors des manifestations de rue.

Ses préoccupations rejoignent alors celles d’une poignée de jeunes du lycée public avec lesquels elle constitue un groupe informel nourri par de longues discussions et qui se donne pour premier objectif de s’informer et d’informer sur ce qui se produit en Algérie. Dans un contexte de censure de la presse et des ouvrages jugés attentatoires à la sûreté de l’État – dont les archives de la sous-préfecture de Morlaix se font l’écho170 –, l’enjeu est de taille. Glanant les informations qui filtrent dans la presse quotidienne régionale, dans des périodiques nationaux plus ou moins engagés sur la question algérienne et dans des ouvrages et journaux interdits qu’ils parviennent à se procurer, le groupe, dont certains membres sont adhérents ou sympathisants du PCF, de la Jeunesse étudiante chrétienne (JEC) ou des courants qui donneront naissance en 1960 au Parti socialiste unifié (PSU), reçoit notamment l’aide d’un étudiant en géographie à Rennes, Emmanuel Le Roch, plus âgé qu’eux et futur membre du PSU, qui leur fournit de la documentation. Mariannick Ledan se souvient notamment des récits de soldats publiés à partir de 1957 dans Témoignage chrétien et de photographies témoignant des tortures infligées à des Algériens. Des membres du groupe reçoivent aussi des informations de la part d’appelés de leur entourage, traumatisés par les violences qu’ils ont dû pratiquer ou subir en Algérie. Fort de cette documentation, le groupe confectionne des affiches, se poste parfois dans les Halles pour y interpeler les Morlaisiens, barre les affiches électorales de slogans hostiles à la guerre et participe à des manifestations ainsi qu’à des meetings pour la « paix en Algérie » et contre les dangers de « fascisation » en France. À Morlaix, ces meetings et manifestations, qui regroupent les organisations de gauche, se déroulent en présence de quelques dizaines à quelques centaines de personnes, principalement après le 13 mai 1958, après la « semaine des barricades » de janvier 1960 et au début 1962, et sont parfois entravés par des interdictions préfectorales171. Mariannick Ledan se souvient aussi d’une action d’éclat menée par les garçons du groupe en février 1962, après le massacre du métro Charonne : l’inscription le long du viaduc de Morlaix d’un « Charonne, 8 morts, de Gaulle assassin ».

Lors du massacre de Charonne. Crédit iconographique: http://etudescoloniales.canalblog.com.

Alors que les appareils des partis de gauche peinent à franchir ce pas, cet engagement pour la « paix en Algérie » et contre l’OAS s’articule chez ces jeunes à une réflexion sur le colonialisme, alimentée par les écrits de Francis Jeanson et de Frantz Fanon. Mariannick Ledan se souvient de la venue à Morlaix, à l’été 1958, des parents de sa tante vivant en Algérie. Au contact de cette famille, et notamment à travers les propos du père – ancien « collabo » engagé au printemps 1958 dans les Comités de salut public et, plus tard, activiste au sein de l’OAS – et d’un des fils – avec lequel un flirt sera engagé mais rapidement avorté pour des raisons politiques –, elle découvre avec « horreur » le racisme colonial répandu chez les Français d’Algérie, qui révolte aussi des appelés morlaisiens de retour d’Algérie. Anticolonialistes, les membres de son groupe s’interrogent sur les actions qu’ils peuvent mener, là où ils se trouvent, pour soutenir les Algériens. Alors qu’ils souffrent de n’être pas pris au sérieux par les adultes et se sentent isolés dans leur ville de moins de 20 000 habitants, ils optent pour une démarche très concrète : aller à la rencontre des Algériens de Morlaix, lier connaissance avec eux, et se mettre en quelque sorte à leur service.

D’après la feuille de recensement transmise chaque trimestre au préfet par le commissariat de police de Morlaix, 5 à 17 Algériens résident à Morlaix entre mai 1958 et mars 1962, mais leur nombre ne dépasse pas 8 hommes jusqu’au début 1960, date à laquelle au moins une famille est recensée. Signe d’une instabilité observée à l’échelle du département, en 1958-1959, les chiffres varient d’un mois à l’autre, et durant le troisième trimestre 1958, on compte par exemple 4 arrivées et 6 départs d’Algériens172. Tous sont recensés comme travaillant, mais en-dehors de deux d’entre eux – Hafid Adelaziz, professeur de physique-chimie syndicaliste et responsable de la SFIO, et un ancien militaire qui occupe durant quelques mois fin 1957 le poste de veilleur de nuit à la Manufacture des Tabacs173 –, les archives ne nous renseignent pas sur leur profession. Mariannick Ledan se souvient d’un ouvrier équarrisseur et d’autres exerçant des métiers par intermittence, comme ouvrier agricole ou éboueur. La plupart d’entre eux vivent ensemble ou se fréquentent : en 1958-1959, la majorité des Algériens sont recensés comme élèves au CFPA, dans lequel ils résident ; les autres, qui deviennent majoritaires à partir de 1960 (plus aucun ne réside au CFPA début 1962), sont logés « par eux-mêmes », notamment en café ou garnis174.

La rencontre entre le groupe de jeunes et ces Algériens résulte de la volonté des jeunes, et elle ne va pas de soi. Les premiers ont une quinzaine d’années, les seconds la trentaine ; ils ne résident pas dans les mêmes quartiers, et n’ont pas le terreau sociologique commun que peuvent partager les ouvriers ou les étudiants algériens et français des villes industrielles ou universitaires ; ils ne peuvent non plus se rencontrer à travers les structures associatives, syndicales ou partisanes, qui se désintéressent visiblement des Algériens de la ville. Volontariste, cette rencontre rompt d’après Mariannick Ledan avec l’attitude ambiante des Morlaisiens à l’égard des Algériens, jusqu’ici isolés et comme « invisibles » :

« On était comme les autres : ils étaient invisibles pour nous. Mais à partir du moment où on a parlé de la guerre d’Algérie, on s’est dit il y a des Algériens, alors on a cherché à discuter avec eux. […] Je me revois avec Ahmed et des copains [français], place des Otages. C’était peut-être à l’occasion de la Foire Haute, parce qu’il y avait les manèges et tout. On a commencé à discuter comme ça, de manière assez informelle. Parce qu’on était un peu curieux de savoir. Et eux étaient bien contents que quelqu’un leur parle. Et ça a commencé comme ça. »

Elle se souvient d’avoir perçu ces hommes comme étant « un petit peu méfiants, au départ », puis de la construction progressive d’une confiance mutuelle, au gré de discussions dans les rues de la ville ou au café. Les jeunes leur parlent de leur opposition à la guerre, ce qui touche visiblement ces hommes, qui s’attachent à eux et se livrent parfois furtivement :

« Ils avaient un vécu certainement très douloureux. Ils nous ont dit : on ne peut pas vous raconter ce qui s’est passé là-bas. […] Des membres de leurs familles ont été tués à l’occasion de la guerre. Alors on ne sait pas trop : est-ce que c’est le FLN, est-ce que c’est l’armée ? […] Il y en a un qui m’a dit : ma femme et mes enfants… – Mais ils sont où ? – Ils sont morts. Mais il est pas rentré dans les détails, et nous on voulait pas… ils nous disaient ce qu’ils voulaient, on n’allait pas les interroger non plus. »

Évoquant ceux dont elle a été le plus proche, Mariannick Ledan se souvient d’hommes qui semblaient soumis à Morlaix à la double pression de la police et du FLN. Convoqués au commissariat, ils demandent au groupe de jeunes, qui sentent leur peur, de les accompagner, et bien que cela semble échapper aux autorités, l’un d’entre eux, « Z », visiblement craint par les autres, collecte des fonds pour le FLN : lorsque les jeunes effectuent des collectes pour aider les Algériens, ces derniers leur demandent d’acheter directement ce dont ils ont besoin plutôt que de leur donner de l’argent qu’ils seraient contraints de remettre à « Z ». En-dehors de ce dernier, un seul de ceux que Mariannick Ledan a fréquentés semble être un militant du FLN. Accompagné à Paris par une amie du groupe en octobre 1961, il participe certainement à la manifestation du 17 octobre, et ne donne plus de signe de vie par la suite, ce qui laisse penser aux jeunes – qui ont eu des échos du massacre par le frère de Mariannick Ledan, élève infirmier et membre d’un comité anti-OAS à Épinay – qu’il a été tué par la police.

Morlaix à la fin des années 1950. Carte postale. Collection particulière.

À Morlaix, où le FLN semble être représenté par un seul individu dont l’unique charge est probablement de récolter des fonds, la question de l’aide aux nationalistes, dont les jeunes débattent théoriquement lorsqu’ils apprennent à partir de 1958-1959 l’existence de réseaux métropolitains de soutien au FLN, ne se pose pas directement. Leur appui matériel aux Algériens n’en est pas moins pensé par ces jeunes comme un acte politique, même s’il emprunte au répertoire de l’action sociale : achat de vêtements, écriture de courriers, assistance lors de démarches administratives ou de recherches d’emploi, etc. À l’hiver 1960-1961, une dizaine d’Algériens sont mis à la porte de leur logement. Mariannick Ledan et son ami Jean-Paul Cousse demandent aux responsables des Scouts de France de leur ouvrir provisoirement leur local. L’aumônier, qu’elle qualifie de « franquiste », se montre réticent, mais cède finalement devant la pression des scouts, tandis que les jeunes effectuent une collecte fructueuse auprès des lycéens dont ils porteront l’excédent, refusé par les Algériens, à une œuvre de charité catholique. Cet épisode est l’occasion d’une rencontre improbable :

« Il faisait très froid, il neigeait ; j’attendais avec Ahmed et Abdul au pied de ma maison qu’on nous remette la clé du local des scouts. Ma grand-mère rentrait et m’a dit : Tu ne les laisses pas dehors, fais les monter, qu’ils viennent manger à la maison. Ce fut la première rencontre de ma grand-mère avec Ahmed et Abdul. Elle a tout fait pour les mettre à l’aise. Je l’entends encore dire : Mes pauvres garçons, c’est dur en Algérie ! Je ne sais pas de quoi nous avons parlé, de la pluie et du beau temps, mais c’était une grand-mère qui leur parlait. Ma mémé était une femme très bonne, bienveillante, ouverte aux autres. Pour elle, qui allait à la messe presque chaque jour, l’Évangile n’était pas un livre mort. Pour mémé, considérer l’autre rencontré, quel qu’il soit, comme un frère, allait de soi. Il est arrivé qu’Ahmed et Abdul rencontrent ma grand-mère au marché le samedi, ils lui portaient alors ses deux sacs en cuir chargés de nourriture. »175

L’ensemble de son entourage n’est pas aussi bienveillant. Mariannick Ledan rapporte qu’un oncle, considérant qu’elle « tournait mal » en fréquentant ces Algériens, lui avait dit qu’elle risquait de se faire violer, ce à quoi elle se souvient avoir répondu : « il y a des gens comme toi qui pincent les fesses des filles, mais eux, ils l’ont jamais fait ! ». Ces stéréotypes sexistes et racistes, qui indiquent combien son engagement perturbe les normes des rapports sociaux de sexe, contrastent fortement avec son expérience – même si elle doit un jour se défaire d’un geste déplacé de « Z », qu’elle n’apprécie pas, par un coup de genou :

« Il y avait beaucoup de respect. Et de l’affection aussi. Je parlais souvent avec l’aumônier de la JEC, l’abbé Abiven, de la guerre d’Algérie, des Algériens de Morlaix. Il était très sensibilisé et a demandé à les rencontrer. Il m’a dit ensuite : Mais dis donc, Ils ont une admiration pour toi, t’es la Sainte Vierge ! Les Algériens n’avaient pas l’habitude de rencontrer de jeunes Français et d’échanger avec eux, encore moins avec une gamine française comme moi. Il n’y avait pas de malentendus dans notre rencontre, c’était des rapports très sains. C’est à cet aumônier qu’ils ont dit qu’une bagarre avait éclaté à cause de moi : Z a tenu des propos désobligeants à mon égard et il s’est fait casser la figure.
Eux aussi voulaient la fin de cette guerre. Ils étaient très désabusés, n’avaient pour certains plus de contacts, peut-être plus de famille en Algérie. Pour eux, tout avait déjà été joué. Ils étaient des déracinés. Ahmed souhaitait travailler ailleurs qu’à l’équarrissage une fois la paix revenue, il ne supportait plus les odeurs nauséabondes qui lui collaient à la peau. Au cours du printemps 1963, Abdul m’a demandé de répondre pour lui à une offre d’emploi à Jersey, pour travailler à la récolte des oignons. Il y est parti. La personne qui l’employait m’a adressé une lettre en son nom pour me confirmer qu’il était bien arrivé et que tout allait bien. »176

L’engagement algérien du groupe de jeunes Morlaisiens prend fin à l’été 1962, lorsque pour célébrer l’indépendance et le départ comme coopérant en Algérie d’un militant du PSU, les Algériens organisent avec leurs jeunes amis une fête autour d’un couscous. Que sont devenus les Algériens de Morlaix et les jeunes de ce groupe ? Mariannick Ledan, devenue étudiante à Rennes puis enseignante d’histoire-géographie en Mayenne, l’ignore, mais elle conclut ainsi son évocation de ces années de guerre : « cette vie qu’on a vécue en même temps, elle était très forte ». Cette séquence de vie intense, animée par un groupe politique informel articulant politisation anti-impérialiste et action locale, bousculant les normes de genre et reposant sur des « alliances inédites et [des] rencontres improbables »177, n’est pas sans évoquer la vie que mèneront nombre de militants de Bretagne et d’ailleurs durant les années 1968. À l’image de bien d’autres jeunes des années 1950-1960, les années algériennes de Mariannick Ledan constitueront au-delà de 1968 la matrice de ses engagements futurs, conjuguant sur le même modèle actions de sensibilisation et manifestations concrètes de solidarité, au sein de l’association Sarajevo-Mayenne lors de la guerre de Bosnie comme au sein du Réseau éducation sans frontières dans les années 2010178.

Morlaix, au début des années 1960. Carte postale. Collection particulière.

Pour les Algériens du Finistère, l’année 1958 marque donc une série d’inflexions, sans que le 13 mai ne constitue d’ailleurs un seuil particulièrement significatif, les changements les plus importants débutant en général fin 1957 et s’accélérant à partir d’août-septembre 1958. La première inflexion consiste en une précarisation croissante de leurs conditions de vie : touchés depuis la fin 1957 par une vague de sous-emploi accentuée par des discriminations à l’embauche qui augmentent après les attentats de l’été 1958, les Algériens connaissent une chute de leurs effectifs et une transformation de leurs conditions de logement, plus instables que par le passé, le foyer brestois qui concentrait jusqu’ici la majorité d’entre eux n’en attirant plus désormais qu’un nombre réduit. La seconde inflexion concerne leur traitement par les autorités, et particulièrement par la police : soumis à une suspicion croissante accentuée par des opérations nationales et locales de répression politique en 1957, les Algériens font l’objet d’une surveillance, d’un contrôle et d’un fichage sans précédent à partir du début 1958, et ce malgré la faible implantation des organisations nationalistes dans le département. La troisième inflexion, plus ambivalente, concerne leurs relations avec les Finistériens : promue après le 13 mai par les autorités comme un moment de « fraternisation », l’année 1958 se caractérise à la fois par une expression semble-t-il plus ouverte de la méfiance, du racisme et des discriminations, et par la possibilité de rencontres inédites en raison de la politisation anti-guerre d’une frange minoritaire de la population dont une partie encore plus marginale, à Morlaix et peut-être ailleurs, commence à s’intéresser à eux. Ces trois inflexions apparaissent au final comme les variations d’un thème qui se joue à l’échelle de la France métropolitaine, les quelques particularités finistériennes et plus largement bretonnes étant partagées avec d’autres régions dites « tranquilles ». Une tranquillité toute relative, on l’a dit, pour une population algérienne sans cesse rattrapée par le contexte de guerre et dont les expériences mériteraient d’être saisies plus finement à travers d’autres sources, tant les archives policières peinent à rendre compte de relations quotidiennes qui furent sans doute bien plus complexes et diverses qu’elles ne le laissent penser.

Pierre-Jean LE FOLL-LUCIANI

Agrégé et docteur en histoire contemporaine. Ancien élève de l'ENS Lyon. Chercheur-associé, Université Rennes 2.

 

 

 

 

 

 

1 GLENMOR, « Apocalypse », La coupe et la mémoire, 33 tours, Arfolk, 1979.

2 BRANCHE, Raphaëlle, THENAULT, Sylvie (dir.), La France en guerre, 1954-1962. Expériences métropolitaines de la guerre d’indépendance algérienne, Paris, Autrement, 2008, 506 p. Dans le prolongement de cet ouvrage a eu lieu les 11-12 février 2014 une journée d’études sur « La guerre d’indépendance algérienne. Échelles métropolitaines » à la BDIC (Nanterre).

3 Ibid., p. 6.

4 Ibid., p. 11-12.

5 À partir de 1944, rompant avec le statut (et la dénomination) d’« indigènes », les autorités françaises désignent juridiquement les colonisés comme des « Français musulmans d’Algérie ». Dans leurs rapports écrits, les autorités du Finistère emploient divers termes pour les désigner : Français-Musulmans, musulmans, Nord-Africains, Français de souche nord-africaine, citoyens français d’Algérie, mais aussi Algériens.

6 Cf. BLANCHARD, Emmanuel, La police parisienne et les Algériens (1944-1962), Paris, Nouveau Monde, 2011, 448 p. Il emprunte l’expression « citoyens diminués » au Parti communiste français.

7 Dans les documents ayant trait à leurs relations avec les Algériens, les autorités du Finistère désignent les non-Algériens par diverses dénominations plus ou moins coloniales : métropolitains, Européens, Français de souche européenne, Français, autochtones et, plus rarement, Bretons.

8 NOIRIEL, Gérard, Immigration, antisémitisme et racisme en France (XIXe-XXe siècle). Discours publics, humiliations privées, 2007, Paris, Fayard, 2014, p. 518, 537.

9 Arch. dép. Finistère : 31 W 481, courrier du préfet à la présidence du Conseil (service de l’Algérie et des départements d’outre-mer), 17 juillet 1951 ; 117 W 7, « L’action sociale menée en faveur des travailleurs algériens dans la métropole », conférence de presse du ministre de l’Intérieur, 12 septembre 1958 ; 117 W 9, courrier du préfet au ministère de l’Intérieur (service des affaires musulmanes), 22 septembre 1960 ; Blanchard, Emmanuel, La police parisienne et les Algériens…, op. cit., p. 231-235.

10 BLANCHARD, Emmanuel, La police parisienne et les Algériens…, op. cit., p. 234-235.

11 Arch. dép. Finistère : 145 W 66, rapports des Renseignements généraux (RG) de Quimper, 4 février 1953 et 3 décembre 1954.

12 Arch. dép. Finistère : 31 W 481, note de renseignements, 19 juin 1947 ; 145 W 66, rapport des RG de Brest, 10 janvier 1953 ; 117 W 15, « Recensement et état d’esprit de la population Nord-Africaine dans le Finistère, 1958-1962 ». La ville accueille aussi des militaires qui ne semblent pas se mêler aux civils, comme ces 300 marins qui y sont instruits en 1960 (145 W 59, rapport des RG de Brest, 21 octobre 1960).

13 Arch. dép. Finistère : 117 W 9, rapport des RG de Quimper, 2 novembre 1959 ; 117 W 15, rapport trimestriel de la sous-préfecture de Brest sur l’action sociale à l’égard de la population musulmane, août 1960. Ces rapports seront par la suite cités sous le nom de « rapport trimestriel », avec le nom du service l’ayant rédigé.

14 Arch. dép. Finistère : 31 W 481, rapport des RG de Brest, 13 mai 1952.

15 Arch. dép. Finistère : 145 W 66, rapport des RG de Brest, 30 mars 1954 ; 117 W 9, rapport des RG de Quimper, 2 novembre 1959, et courrier du préfet au ministère de l’Intérieur (service des affaires musulmanes), 22 septembre 1960 ; 117 W 15, rapport trimestriel de la sous-préfecture de Brest, mars 1961.

16 Arch. dép. Finistère : 117 W 66, courrier de l’Inspecteur général de l’administration en mission extraordinaire (IGAME) au préfet, 24 décembre 1957.

17 Arch. dép. Finistère : 117 W 15, rapport trimestriel de la préfecture, 1er trimestre 1960.

18 Arch. dép. Finistère : 7 W 17, « Direction départementale du travail : main d’œuvre nord-africaine, états de mouvements, affaires diverses, 1945-1956 ».

19 Arch. dép. Finistère : 145 W 66, rapport des RG de Brest, 18 décembre 1957.

20 Arch. dép. Finistère : 145 W 66, rapport des RG de Brest, 7 août 1959.

21 Arch. dép. Finistère : 117 W 9, rapport des RG de Quimper, 2 novembre 1959.

22 Arch. dép. Finistère : 31 W 481, rapport des RG de Quimper, 30 juin 1951.

23 Arch. dép. Finistère : 117 W 15, rapport trimestriel des RG de Quimper, 28 mai 1959.

24 Lorsqu’en 1958, le gouvernement décide de promouvoir à des postes de la fonction publique des Algériens diplômés ou qualifiés, les RG affirment que seuls trois Algériens du Finistère répondent à ce profil (Arch. dép. Finistère : 117 W 7, rapport des RG de Quimper, 6 décembre 1958).

25 Arch. dép. Finistère : 31 W 481, rapport des RG de Brest, 16 avril 1952.

26 Arch. dép. Finistère : 117 W 15, « statistiques des Nord-Africains » de la gendarmerie, 25 novembre 1958.

27 Arch. dép. Finistère : 117 W 15, rapport trimestriel des RG de Quimper, 30 avril 1958 ; 117 W 7, conférence de presse du ministre de l’Intérieur, déjà citée, 12 septembre 1958.

28 Arch. dép. Finistère : 117 W 15, « Recensement et état d’esprit de la population Nord-Africaine dans le Finistère, 1958-1962 » ; COHEN, Muriel, « Des familles invisibles. Politiques publiques et trajectoires résidentielles de l’immigration algérienne (1945-1985) », thèse d’histoire sous la direction de FOURCAUT, Annie, Paris 1, 2013, p. 10 et 56-60.

29 Arch. dép. Finistère : 117 W 7, conférence de presse du ministre de l’Intérieur, déjà citée, 12 septembre 1958. Les rapports trimestriels établis à partir de 1958 indiquent parfois que trois ou quatre Algériens tout au plus vivent en « bidonvilles », mais rien n’est dit sur leur localisation (117 W 15).

30 Arch. dép. Finistère : 117 W 15, rapport trimestriel des RG de Quimper, 29 août 1959.

31 Arch. dép. Finistère : 117 W 15, rapport trimestriel des RG de Quimper, 30 avril 1958.

32 Arch. dép. Finistère : 117 W 9, rapports des RG de Quimper, 14 janvier et 7 octobre 1959.

33 Arch. dép. Finistère : 117 W 7 et 9, rapports des RG de Quimper, 7 avril et 7 octobre 1959.

34 Arch. dép. Finistère : 117 W 9, courrier du sous-préfet de Brest au préfet, 18 juin 1958.

35 Arch. dép. Finistère : 31 W 481, rapport des RG de Brest, 16 avril 1952.

36 Arch. dép. Finistère : 117 W 7, conférence de presse du ministre de l’Intérieur, déjà citée, 12 septembre 1958.

37 Arch. dép. Finistère : 117 W 9, courriers du sous-préfet de Brest au ministère de l’Intérieur (sous-direction de l’Algérie), 15 octobre 1954, et du président de l’Association brestoise pour l’hébergement des travailleurs nord-africains au préfet, 29 mars 1955.

38 Arch. dép. Finistère : 117 W 9, courrier du commissariat central de Brest au préfet, 28 mai 1957.

39 Arch. dép. Finistère : 145 W 66, rapports des RG de Brest, 19 janvier et 11 avril 1957.

40 Arch. dép. Finistère : 145 W 66, courrier du préfet à l’IGAME, 16 décembre 1957 ; 117 W 9, courriers du préfet au Conseiller technique des affaires musulmanes (CTAM) pour la IIIe Région, 17 février 1958, et au vice-amiral, préfet maritime de la IIe région, 22 octobre 1959 ; 117 W 15, rapport trimestriel de la sous-préfecture de Brest, 30 avril 1958.

41 Arch. dép. Finistère : 117 W 9, courrier du colonel Faucher, maire adjoint de Brest, au nom de l’Association brestoise pour l’hébergement des travailleurs nord-africains, au secrétaire d’État à la Marine nationale, 18 décembre 1958, et compte-rendu de la réunion du conseil d’administration de cette association, 4 décembre 1958 ; 117 W 15, rapport trimestriel de la préfecture, 1er trimestre 1959.

42 Cf. Arch. dép. Finistère : 117 W 9, courrier du préfet à l’IGAME, 23 janvier 1959.

43 Arch. dép. Finistère : 117 W 15, rapport trimestriel de la sous-préfecture de Brest, 30 avril 1958.

44 Arch. dép. Finistère : 117 W 9, note du ministère de l’Intérieur (service des affaires musulmanes), 6 mars 1959.

45 Arch. dép. Finistère : 145 W 66, rapport des RG de Brest, 26 février 1954.

46 Arch. dép. Finistère : 117 W 15, rapport trimestriel de la préfecture, 27 juin 1961.

47 Arch. dép. Finistère : 117 W 7, rapport des RG de Quimper, 7 avril 1959.

48 Cf. Arch. dép. Finistère : 117 W 10-12, « condamnations de Nord-Africains » (1955-1963).

49 Arch. dép. Finistère : 117 W 15, rapport trimestriel de la préfecture, 27 juin 1961.

50 Arch. dép. Finistère : 117 W 15, rapport trimestriel de la préfecture, 19 janvier 1963.

51 Arch. dép. Finistère : 117 W 15, rapport trimestriel de la préfecture, 7 septembre 1961.

52 Arch. dép. Finistère : 145 W 66, rapport des RG de Brest, 26 novembre 1954.

53 Arch. dép. Finistère : 145 W 66, rapports des RG de Brest, 26 février et 30 mars 1954.

54 Arch. dép. Finistère : 31 W 481, rapport des RG de Brest, 16 avril 1952.

55 Arch. dép. Finistère : 31 W 481, rapport du préfet au ministre de l’Intérieur, 11 avril 1952.

56 Arch. dép. Finistère : 145 W 66, rapports des RG de Brest, 30 mars et 26 novembre 1954, 6 août 1956.

57 Arch. dép. Finistère : 145 W 66, rapports des RG de Brest, 1er, 8 juin et 28 décembre 1957.

58 Arch. dép. Finistère : 31 W 481, rapport des RG de Brest, 26 juin 1947.

59 Arch. dép. Finistère : 31 W 481, rapport des RG de Quimper, 17 février 1946, et note de renseignements, 19 juin 1947.

60 Arch. dép. Finistère : 145 W 66, rapports des RG de Brest, 26 février et 12 mars 1954.

61 Arch. dép. Finistère : 145 W 66, « Recensements des opérations de police contre les nationalistes algériens (MTLD) » transmis par les RG de Brest au préfet, 18 janvier 1955. Un ex-militant du MTLD est toutefois trouvé en possession de documents du MNA lors d’une perquisition effectuée le 22 décembre 1954 (« liste de Nord-Africains suspects », commissariat central de Brest, 15 juin 1957).

62 Arch. dép. Finistère : 117 W 15, rapport trimestriel des RG de Quimper, 4 juin 1958.

63 Arch. dép. Finistère : 117 W 15, rapport trimestriel des RG de Quimper, 29 août 1959.

64 Arch. dép. Finistère : 145 W 66, rapport des RG de Brest, 10 octobre 1955, et note des RG de Quimper, 9 février 1956.

65 Arch. dép. Finistère : 117 W 15, rapport trimestriel des RG de Quimper, 3 décembre 1958 ; 145 W 58, synthèse de la IIIe région militaire sur les activités séparatistes algériennes, 15 décembre 1958. Ces derniers rapports seront cités par la suite sous le nom de « synthèse de la IIIe région militaire ».

66 Arch. dép. Finistère : 117 W 15, rapport trimestriel de la préfecture, 21 mars 1961.

67 Arch. dép. Finistère : 145 W 66, rapport des RG de Quimper, 14 mars 1956.

68 Arch. dép. Finistère : 117 W 9, rapport des RG de Quimper, 7 octobre 1959.

69 Arch. dép. Finistère : 145 W 58, synthèses de la IIIe région militaire, 1958-1962.

70 Arch. dép. Finistère : 145 W 66, rapports du commissariat central et des RG de Brest, 19 février et 6 mars 1956.

71 Cf. Arch. dép. Finistère : 145 W 66, note du commissariat central de Brest, 5 novembre 1957 ; 145 W 59, rapport des RG de Brest, 15 février 1960.

72 Arch. dép. Finistère : 145 W 66, « liste de Nord-Africains suspects », commissariat central de Brest, 15 juin 1957.

73 Arch. dép. Finistère : 145 W 66, rapport des RG de Brest, 7 février 1957.

74 Arch. dép. Finistère : 145 W 66, rapports des RG de Brest, 7, 20 septembre et 6 novembre 1957, 16 et 27 janvier 1958.

75 Arch. dép. Finistère : 117 W 15, rapport trimestriel des RG de Quimper, 30 avril 1958.

76 Arch. dép. Finistère : 145 W 66, rapport des RG de Brest, 10 avril 1958 ; 145 W 58, synthèse de la IIIe région militaire, 15 novembre 1958 ; 117 W 15, rapports trimestriels de la sous-préfecture de Brest, 1er décembre 1959 et 2 mars 1960 ; 145 W 59, rapport des RG de Brest, 19 février 1960.

77 Arch. dép. Finistère : 145 W 66, rapports du commissariat central et des RG de Brest, 3 et 6 juin 1957 ; 145 W 59, rapport des RG de Brest, 5 juillet 1958.

78 Arch. dép. Finistère : 117 W 15, rapports trimestriels de la sous-préfecture de Brest, mai, septembre 1962 et janvier 1963.

79 Arch. dép. Finistère : 145 W 67, rapport des RG de Brest, 6 juillet 1962.

80 Le maillage territorial du FLN témoigne de cette périphéricité, la Bretagne s’inscrivant en 1960-1961 dans de très vastes wilayas couvrant environ un quart puis plus de la moitié de la France.

81 Arch. dép. Finistère : 117 W 9, rapports des RG de Quimper, 14 janvier et 7 octobre 1959 ; 117 W 15, rapport trimestriel de la sous-préfecture de Brest, 6 décembre 1960.

82 Arch. dép. Finistère : 145 W 66, courrier du préfet aux sous-préfets, 15 janvier 1958.

83 Arch. dép. Finistère : 145 W 58, synthèses de la IIIe région militaire, 15 et 28 février 1958.

84 Arch. dép. Finistère : 117 W 15, rapport trimestriel de la préfecture, 1er trimestre 1960.

85 Arch. dép. Finistère : 117 W 7, rapport des RG de Brest, 15 septembre 1959.

86 Arch. dép. Finistère : 145 W 59, courrier du ministre de l’Intérieur aux IGAME, 1er avril 1958.

87 Arch. dép. Finistère : 145 W 59, rapport des RG de Quimper, 13 mai 1960.

88 Arch. dép. Finistère : 117 W 9, courrier du sous-préfet de Brest au ministère de l’Intérieur (sous-direction de l’Algérie), 15 octobre 1954.

889 Arch. dép. Finistère : 31 W 481, rapport des RG de Brest, 26 septembre 1953.

90 Arch. dép. Finistère : 117 W 9, courrier du préfet au CTAM pour la IIIe Région, 17 février 1958.

91 Arch. dép. Finistère : 31 W 481, courrier du préfet au commissaire des RG de Brest, 18 juillet 1951.

92 Arch. dép. Finistère : 117 W 9, courrier du préfet au CTAM pour la IIIe Région, 21 mai 1958.

93 Arch. dép. Finistère : 117 W 9, courrier du sous-préfet de Brest au ministère de l’Intérieur (sous-direction de l’Algérie), 15 octobre 1954.

94 Arch. dép. Finistère : 117 W 7, conférence de presse du ministre de l’Intérieur, déjà citée, 12 septembre 1958.

95 Arch. dép. Finistère : 117 W 15, rapport trimestriel de la préfecture, 21 mars 1961. Les mêmes propos étaient tenus par le préfet au ministère de l’Intérieur (service des affaires musulmanes) le 10 septembre 1959 (145 W 67).

96 Arch. dép. Finistère : 117 W 9, courrier du ministre de l’Intérieur au préfet, 6 mai 1961.

97 Cf. BLANCHARD, Emmanuel, La police parisienne et les Algériens…, op. cit., p. 289-391.

98 Voir par exemple les dossiers spécifiquement consacrés aux « Nord-Africains » avant 1954 par la Direction départementale du travail (Arch. dép. Finistère : 7 W 17) et les RG (31 W 481).

99 Arch. dép. Finistère : 145 W 59, courrier du ministre de l’Intérieur aux IGAME, 1er avril 1958 ; 117 W 15.

100 Arch. dép. Finistère : 117 W 14, compte-rendu de la réunion nationale des CTAM des 9 et 10 octobre 1958.

101 Arch. dép. Finistère : 145 W 58, « Activités séparatistes algériennes. Synthèses régionales (1958-1962) ».

102 Arch. dép. Finistère : 145 W 66, courrier du préfet aux sous-préfets, 15 janvier 1958.

103 Cf. DJERBAL, Daho, L’Organisation Spéciale de la Fédération de France du FLN. La lutte armée en France, Alger, Chihab, 2012, 436 p. ; BLANCHARD, Emmanuel, La police parisienne et les Algériens…, op. cit., p. 362-374.

104 Arch. dép. Finistère : 145 W 58, synthèses de la IIIe région militaire, 1958 ; 145 W 67, « Été 1958, Action terroriste du FLN, Prévention des sabotages, Protection de la population, Surveillance des milieux suspects ».

105 Arch. dép. Finistère : 145 W 67, communication téléphonique du commandant de gendarmerie au préfet, 13 octobre 1958 ; 143 W 6, directives du préfet aux sous-préfets, à la gendarmerie et à la police, 20 août 1959.

106 Arch. dép. Finistère : 145 W 67, note de service du commissariat de la Sécurité publique, Quimper, 12 septembre 1958.

107 Arch. dép. Finistère : 145 W 67, rapport du chef du service départemental des RG au préfet, 18 octobre 1958.

108 Arch. dép. Finistère : 145 W 59, rapport du commissaire chef de secteur de Rennes à l’IGAME, 9 juin 1960 ; fiche de renseignements de la gendarmerie, 8 mars 1960 ; rapport du commissariat de police de Concarneau au procureur de la République de Quimper, 25 novembre 1960.

109 Arch. dép. Finistère : 145 W 66, rapport du préfet à l’IGAME, 3 février 1958 ; 145 W 58, synthèse de la IIIe région militaire, 31 août 1958 ; renseignements statistiques de la IIIe région militaire pour la période du 1er au 15 octobre 1958 ; 117 W 15, rapport du commissaire principal du service départemental des RG au préfet, 12 septembre 1960 ; 145 W 59, rapport des RG de Quimper, 7 octobre 1960.

110 Arch. dép. Finistère : 145 W 66, rapports des RG de Brest, 22 avril 1958 et 10-11 août 1959, des RG de Quimper, 7 août 1959, et du commissaire principal de la Sécurité publique de Quimper, 14 octobre 1959.

111 Arch. dép. Finistère : 145 W 66, « Renseignements statistiques divers relatifs à la surveillance des milieux nord-africains et à la répression des menées séparatistes, commissariat de la Sécurité publique, circonscription de Quimper (1957-1958) », et dossiers des RG sur les « Nord-Africains » (1953-1957, 1958, 1959) ; 145 W 59, « Activités séparatistes, Mouvements des Nord-Africains, contrôles ».

112 Arch. dép. Finistère : 145 W 59, lettre manuscrite de A. A. au préfet, Brest, 12 mars 1961. Sur A. A., voir 145 W 66, rapport des RG et note de renseignements du commissariat central de Brest, 1er juin 1957.

113 Arch. dép. Finistère : 117 W 15, rapport trimestriel des RG de Quimper, 29 août 1959.

114 Arch. dép. Finistère : 117 W 15, rapport trimestriel de la sous-préfecture de Brest, 30 avril 1958.

115 Arch. dép. Finistère : 117 W 9, note du ministère de l’Intérieur (service des affaires musulmanes), 6 mars 1959.

116 Arch. dép. Finistère : 117 W 9, courrier du préfet au vice-amiral, préfet maritime de la IIe région, 22 octobre 1959.

117 Arch. dép. Finistère : 117 W 14, compte-rendu de la réunion nationale des CTAM des 9 et 10 octobre 1958.

118 Arch. dép. Finistère : 145 W 66, rapport des RG de Brest, 5 janvier 1955.

119 Courrier de Layachi Dehimi au sous-préfet de Brest cité dans Arch. dép. Finistère : 117 W 9, compte-rendu de la réunion du conseil d’administration de l’Association brestoise pour l’hébergement des travailleurs nord-africains, 4 décembre 1958.

120 Arch. dép. Finistère : 117 W 9, courriers du colonel Faucher, maire adjoint de Brest, au nom de l’Association brestoise pour l’hébergement des travailleurs nord-africains, au secrétaire d’État à la Marine nationale, 18 décembre 1958, et du préfet au vice-amiral, préfet maritime de la IIe région, 22 octobre 1959.

121 Arch. dép. Finistère : 117 W 15, rapport trimestriel de la sous-préfecture de Brest, 31 mai 1960 ; 117 W 9, courrier de la Direction départementale du travail et de la main d’œuvre au préfet, 20 juillet 1960.

122 Arch. dép. Finistère : 117 W 14, compte-rendu de la réunion nationale des CTAM des 9 et 10 octobre 1958. Les synthèses de la IIIe Région militaire ont tendance à présenter des relations s’améliorant entre Algériens et Français durant l’année 1958, idée absente des rapports des autorités civiles du Finistère (145 W 58).

123 Arch. dép. Finistère : 117 W 7, conférence de presse du ministre de l’Intérieur, déjà citée, 12 septembre 1958.

124 Arch. dép. Finistère : 117 W 14, compte-rendu de la réunion nationale des CTAM des 9 et 10 octobre 1958.

125 Arch. dép. Finistère : 117 W 15, rapport trimestriel de la sous-préfecture de Brest, 15 juin 1958.

126 Arch. dép. Finistère : 117 W 15, rapport trimestriel des RG de Quimper, 28 mai 1959.

127 Arch. dép. Finistère : 117 W 15, rapport trimestriel de la préfecture, 1er trimestre 1959.

128 Arch. dép. Finistère : 117 W 15, rapport trimestriel des RG de Quimper, 28 mai 1959.

129 Arch. dép. Finistère : 117 W 15, rapport trimestriel de la préfecture, 1er trimestre 1959.

130 Arch. dép. Finistère : 145 W 66, rapport des RG de Brest, 10 janvier 1953.

131 Arch. dép. Finistère : 117 W 15, rapport trimestriel de la sous-préfecture de Brest, 30 avril 1958.

132 Arch. dép. Finistère : 117 W 14, compte-rendu de la réunion nationale des CTAM des 9 et 10 octobre 1958.

133 Arch. dép. Finistère : 145 W 66, note d’information des RG de Quimper, 3 décembre 1954.

134 Arch. dép. Finistère : 117 W 7, « Action en faveur des élèves musulmans de l’École d’agriculture de Bréhoulou, 1959-1962 » ; 117 W 15, rapports trimestriels de la sous-préfecture de Brest et des RG de Quimper, 28 février et 11 mars 1959 ; 145 W 59, rapport des RG de Quimper, 5 octobre 1960.

135 Arch. dép. Finistère : 145 W 66, rapport des RG de Brest, 26 février 1954 ; 117 W 15, rapport trimestriel des RG de Quimper, 30 avril 1958.

136 Cf. DE GEYER, Sven, « Les Algériens de métropole dans les zones à l’écart de la bataille de France », in BRANCHE, Raphaëlle, THENAULT, Sylvie (dir.), La France en guerre, 1954-1962…, op. cit., p. 104. Ces unions « mixtes » concerneraient environ 3% des Algériens de France dans les années 1950 (COHEN, Muriel, « Des familles invisibles… », op. cit., p. 10).

137 Signalons que l’hypothèse de rapports homosexuels entre un Algérien et un Français est sous-entendue dans un rapport des RG de Quimper du 18 avril 1961 (Arch. dép. Finistère : 117 W 7).

138 Arch. dép. Finistère : 117 W 7, courrier du commissaire de police de Concarneau au préfet, 26 juillet 1960.

139 Arch. dép. Finistère : 145 W 66, rapport des RG de Brest, 20 septembre 1957.

140 Arch. dép. Finistère : 117 W 15, rapport trimestriel de la préfecture, 4e trimestre 1959.

141 Arch. dép. Finistère : 117 W 9, courrier du sous-préfet de Brest au ministère de l’Intérieur (sous-direction de l’Algérie), 15 octobre 1954.

142 Arch. dép. Finistère : 117 W 15, rapport trimestriel de la préfecture, 3e trimestre 1959.

143 Cf. par exemple Arch. dép. Finistère : 117 W 15, rapport trimestriel de la sous-préfecture de Brest, 25 novembre 1958.

144 Arch. dép. Finistère : 117 W 15, rapport trimestriel des RG de Quimper, 8 décembre 1959.

145 Arch. dép. Finistère : 117 W 15, rapport trimestriel de la sous-préfecture de Brest, 30 avril 1958.

146 Arch. dép. Finistère : 117 W 15, rapport trimestriel des RG de Quimper, 8 décembre 1959.

147 Arch. dép. Finistère : 145 W 66, rapports du commissariat central et des RG de Brest, 3 et 6 juin 1957.

148 Arch. dép. Finistère : 145 W 66, rapport des RG de Quimper, 24 août 1956.

149 Arch. dép. Finistère : 145 W 66, rapport des RG de Brest, 11 août 1956.

150 Arch. dép. Finistère : 117 W 15, rapport trimestriel de la préfecture, 4e trimestre 1959.

151 Arch. dép. Finistère : 145 W 66, rapports des RG de Brest et de Quimper, 24 mai et 16 août 1956.

152 Arch. dép. Finistère : 117 W 15, rapport trimestriel de la préfecture, 15 septembre 1958.

153 Arch. dép. Finistère : 117 W 15, rapport des RG de Quimper, 22 octobre 1958.

154 Arch. dép. Finistère : 117 W 9, rapport des RG de Quimper, 7 octobre 1959.

155 Arch. dép. Finistère : 31 W 481, courrier du maire de Brest au directeur de l’Office du travail, 29 avril 1952.

156 Arch. dép. Finistère : 31 W 481, rapport du préfet au ministère de l’Intérieur, 28 avril 1952.

157 Arch. dép. Finistère : 145 W 66, rapport des RG de Brest, 10 janvier 1953.

158 Arch. dép. Finistère : 31 W 481, rapport des RG de Brest, 3 juillet 1951 ; 117 W 15, rapport des RG de Quimper, 22 octobre 1958.

159 Arch. dép. Finistère : 117 W 15, rapport trimestriel de la préfecture, 21 mars 1961.

160 Arch. dép. Finistère : 117 W 15, rapport trimestriel de la sous-préfecture de Brest, 3 mars 1961.

161 Arch. dép. Finistère : 117 W 15, rapports trimestriels de la sous-préfecture de Brest, 3 mars, 7 juin et novembre 1961.

162 Arch. dép. Finistère : 117 W 15, rapport trimestriel de la préfecture, 21 mars 1961.

163 Arch. dép. Finistère : 145 W 66, rapport des RG du Finistère, 8 juin 1959.

164 Arch. dép. Finistère : 145 W 59, demande de renseignements de la direction des RG de Paris aux RG de Quimper, 29 avril 1960 ; rapports des RG de Quimper, 31 août et 27 septembre 1960.

165 Arch. dép. Finistère : 145 W 67, rapport des RG de Brest, 6 juillet 1962.

166 Entretien avec Mariannick Roy (née Ledan), 29 juillet 2017. Sauf indication, les citations qui suivent sont extraites de cet entretien.

167 Arch. dép. Finistère : 124 W 164, dossier « Mouvements anti-OAS (décembre 1961-juin 1962) ».

168 Sur la centralité de la question de la torture dans l’engagement de nombreux acteurs anti-guerre à partir de 1957-1958, cf. THENAULT, Sylvie, Histoire de la guerre d’indépendance algérienne, Paris, Flammarion, 2005, p. 135-150, et GOBIN, Charlotte, « Genre et engagement : devenir ''porteur.e de valises'' en guerre d'Algérie (1954-1966) », thèse d’histoire sous la direction de SCHWEITZER, Sylvie, université Lyon 2, 2017, p. 123-132.

169 EVANS, Martin, The Memory of Resistance: French Opposition to the Algerian War (1954-1962), Oxford, Berg Publishers, 1997, 268 p.

170 Plusieurs notes rendent compte de la saisie de journaux dont L’Express, France-Observateur et L’Humanité dans la ville. Cf. par exemple Arch. dép. Finistère : 143 W 6, rapport des RG de Brest, 28 juin 1958.

171 Arch. dép. Finistère : 124 W 164, rapport du sous-préfet de Morlaix au préfet, 4 février 1960, et dossier « Mouvements anti-OAS (décembre 1961-juin 1962) » ; 117 W 18, dossier « Interdiction de réunions et cortèges, 1960 » (à propos de la journée du 28 juin 1960 pour la « paix en Algérie »).

172 Arch. dép. Finistère : 117 W 15, fiches de recensement transmises au préfet par le commissaire de Morlaix (1958-1962).

173 Arch. dép. Finistère : 117 W 7, rapport des RG de Quimper, 6 décembre 1958 ; 145 W 66, rapport des RG de Brest, 5 décembre 1957. Sur la trajectoire de Hafid Abdelaziz, marié à une Française et père de trois enfants, voir la notice rédigée par Jacques Girault : http://maitron-en-ligne.univ-paris1.fr/spip.php?article9630 (mise en ligne le 10 octobre 2008, modifiée le 26 novembre 2017).

174 Arch. dép. Finistère : 117 W 15, fiches de recensement transmises au préfet par le commissaire de Morlaix (1958-1962).

175 Courrier de Mariannick Roy (née Ledan) à l’auteur, 2 octobre 2017.

176 Idem.

177 ZANCARINI-FOURNEL, Michelle, Les luttes et les rêves. Une histoire populaire de la France de 1685 à nos jours, Paris, La Découverte, 2016, chapitre 17 (« Le moment 68 »), p. 811.

178 Sur le lien entre ses engagements algériens et bosniaques – partagés avec Francis Jeanson –, voir l’entretien avec Mariannick Roy (née Ledan) en bonus du DVD du documentaire de DE GRISSAC, Catherine et VRIGNON, Bernard, Francis Jeanson. Itinéraire d’un intellectuel engagé, 2011.