La campagne électorale bretonne de Georges Pompidou

« Je vous demande de m'aider, de m'apporter votre concours dans cette campagne, autour de vous, auprès de vos amis, de m'apporter votre vote le 1er juin, et de me garder ensuite votre confiance. »1 Voilà qui est une déclaration classique de campagne électorale, dont l’auteur n’est personne d’autre que Georges Pompidou, chef de file de l’Union des démocrates pour la République (UDR).

Georges Pompidou, répondant à une journaliste. Collection particulière. Collection particulière.

Ce 22 mai 1969, le candidat gaulliste tente de convaincre les Rennais, dont le maire Henri Fréville n’est pas rallié à l’UDR, qu’il est celui qui est le plus légitime pour succéder au Général de Gaulle démissionnaire suite à l’échec du referendum « à propos de la loi sur la réforme régionale et du Sénat ». Une décision qu’il comprend : « L'ayant dit, s'y étant engagé, il l'a fait naturellement, lui » ; mais qu’il regrette : « qui n'a senti le vide ainsi créé ? » Pompidou place ainsi sa candidature sous l’égide de L’Homme du 18 juin dont il a été le Premier ministre entre 1962 et 1968. Candidat de la continuité, il se place comme le défenseur de la Ve République, en menaçant d’un possible retour de « l'impuissance, [de] l'incapacité de gouverner, quelle que soit la volonté des hommes, et même leur bonne volonté ». Au-delà d’une envolée lyrique, citant Victor Hugo : « Les chevaux de la mort se mettent à hennir et sont contents car l'âge éclatant va finir » ; l’agrégé de lettres prononce un discours somme toute des plus classiques pour un candidat de droite gaulliste. Les « éléments de langage » pompidoliens tournent en effet globalement autour des notions de « progrès », « d’ordre et [de] fermeté ».

Face à Georges Pompidou, pour cette deuxième élection présidentielle au suffrage universel direct, on ne trouve, comme lui, que des novices. François Mitterrand et Jean Lecanuet, anciens adversaires du Général en 1965, ne se représentent pas. Son principal concurrent n’est autre que le président de la République par intérim, Alain Poher. La gauche est quant à elle divisée entre les candidatures socialistes du maire de Marseille, Gaston Deferre, du communiste Jacques Duclos, de Michel Rocard pour le PSU, du révolutionnaire de la Ligue communiste Alain Krivine, ainsi que du « sans étiquette » Louis Ducatel. Epaulé par les gaullistes historiques d’un côté et des libéraux de Valéry Giscard d’Estaing de l’autre, Pompidou est le favori de l’élection. Un statut qu’il confirme au soir du premier tour : il récolte près de 45% des suffrages. Derrière, Alain Poher, avec 23%, est talonné par le tribun communiste Jacques Duclos et ses 21%. Gaston Defferre et Michel Rocard, les deux candidats socialistes, sont eux loin derrière et cumulent 8% des suffrages exprimés. Si aucun des candidats éliminés ne se rallie à sa candidature, la dynamique électorale est néanmoins clairement du côté de Georges Pompidou pour le second tour, celui-ci ayant lieu 15 jours plus tard.

Georges Pompidou, alors Président de la République, lors d'un discours à Beaune. Collection particulière.

Pour autant, Pompidou n’abandonne pas la campagne électorale. Loin de ne battre que des terres acquises à sa cause, il se rend même dans des régions qui penchent normalement à gauche. Ainsi, le 12 juin, il tient une réunion publique à Guingamp.2 C’est tout d’abord René Pleven, député des Côtes-du-Nord et président du Conseil général, qui est chargé de chauffer la salle. Quand vient son tour, Georges Pompidou martèle sans relâche le slogan de sa campagne : « Continuité et progrès ». Continuité de la vision gaullienne de la France et du pouvoir, mais surtout « progrès industriel, économique, social » qu’il appelle à être porté par « des hommes nouveaux » au sein d’un prochain gouvernement. Il se place en somme dans la peau du candidat de la rupture dans le respect de la tradition. Une posture gagnante puisqu’il est élu président de la République avec 58% des voix. Ses scores électoraux sont même supérieurs en Bretagne, où ils dépassent les 60% dans les départements du Finistère, du Morbihan, de l’Ille-et-Vilaine et de Loire-Atlantique. L’Ouest demeure encore à cette époque un bastion fort de la droite.

Thomas PERRONO

 

 

 

 

1 INA – L’Ouest en mémoire, « Discours de Georges Pompidou à Rennes », Bretagne actualités,  ORTF, 22 mai 1969, en ligne.

2 INA, « Monsieur Pompidou à Guingamp », JT 20h, 12 juin 1969, en ligne.