L’Echo du Finistère et l’émergence du mouvement breton

Le 9 décembre 1905, un nouvel hebdomadaire fait son apparition dans le Finistère. Alors que les parlementaires s’apprêtent à voter la loi de séparation des Eglises et de l’Etat, L’Echo du Finistère promet d’emblée qu’il ne participera pas aux débats qui divisent les Bretons. Dès lors, le journal assure qu’il « ne sera l’organe d’aucun parti, le porte-parole d’aucune coterie » afin de « montrer qu’en dehors des questions politiques qui divisent, il y en a d’autres sur lesquelles tout le monde peut et doit s’entendre »1.

Une mise en page résolument austère. Gallica / Biblioyhèque nationale de France.

Dès son deuxième numéro, l’hebdomadaire tient sa promesse. Alors qu’il rend compte du vote de la loi de séparation des Eglise et de l’Etat, il invite ses lecteurs à « s’abstraire de toute idée préconçue, et de faire taire pour un moment le sentiment religieux ou antireligieux » afin d’examiner « sans passion les histoires et les faits »2. Si les analyses livrées par ses journalistes ne sont jamais totalement dénuées de subjectivité, il faut néanmoins reconnaître qu’elles se distinguent de celles l’on retrouve dans la plupart des journaux bretons. Ainsi, au plus fort de la crise des Inventaires, L’Echo du Finistère parvient à conserver un traitement factuel de la situation. Le 10 mars 1906, il précise tout simplement que « les inventaires se poursuivent partout dans le Finistère, en général les recteurs refusent d’ouvrir les portes et l’agent de l’inventaire se retire », tout en rappelant que « partout les fidèles ont témoigné par leur affluence, combien ces opérations leur tenaient à cœur et les indignaient »3.

Pour autant, il ne faudrait pas concevoir L’Echo du Finistère comme un journal dépourvu de visées politiques. Lancé par le journaliste régionaliste Alfred Lajat, l’hebdomadaire soutient que les « habitants d’une même région » ont « des intérêts communs » et qu’ils doivent se « défendre contre les dangers qui [les] menacent »4. Se faisant porte-parole de cette cause, la rédaction promet, dès son premier numéro, de « défendre et augmenter la fortune de la région, en aidant au développement de l’agriculture, de l’industrie et du commerce »5.

Au fil des années, le journal, que l'on peut consulter en quelques clisc sur le portail Gallica de la Bibliothèque nationale de France, continue de clamer son attachement à la Bretagne en publiant, notamment, des textes en breton. Dans ses vœux pour l’année 1910, Alfred Lajat réaffirme de manière encore plus insistante ses ambitions. Il souhaite que ses lecteurs puissent « s’émanciper un peu des liens de fer de la fausse éducation que la plupart de nous avons reçue, éducation, qui nous déracine, nous arrache à nos morts et à notre terre, pour faire de nous des cosmopolites, des Européens », afin de mieux appréhender « la somme de bonheur réel que Dieu leur a réservée ».6

Carte postale. Collection particulière.

A ce titre, L’Echo du Finistère constitue une formidable source pour celles et ceux qui s’intéressent à l’émergence du mouvement breton. Mais là n’est pas l’unique intérêt de cet hebdomadaire puisqu’il offre en effet une alternative séduisante à La Dépêche de Brest. Malheureusement, L’Echo du Finistère s’arrête subitement le 28 décembre 1912, après seulement 361 numéros.

Yves-Marie EVANNO

 

 

 

1 « Aux lecteurs », L’Echo du Finistère, 9 décembre 1905, p. 1.

2 « La Loi de Séparation des Eglises et de l’Etat », L’Echo du Finistère, 16 décembre 1905, p. 1.

3 « La loi de Séparation », L’Echo du Finistère, 10 mars 1906, p. 1.

4 « Aux lecteurs », L’Echo du Finistère, 9 décembre 1905, p. 1.

5 Ibid.

6 « Vœux de nouvel an », L’Echo du Finistère, 1er janvier 1910, p. 1.