Les sources des dommages de la Seconde Guerre mondiale

La Bretagne subit de nombreux dommages durant la Seconde Guerre mondiale. Les combats et, surtout, les bombardements aériens réduisent à l’état de ruine tout ou partie de nombreuses villes (Brest, Lorient, Saint-Nazaire, Saint-Malo... mais également Bruz, en Ille-et-Vilaine). En raison de l’ampleur des dégâts et des préjudices qu’ils causent à l’économie, mais aussi aux particuliers, l’État décide dès 1940 de créer dans chaque département une direction des dommages de guerre. L’objectif est alors de recenser, d’indemniser et de hiérarchiser les besoins pour reconstruire le plus rapidement possible. Ces documents constituent de formidables sources pour celui qui s’intéresse à l’histoire de la Seconde Guerre mondiale et à celle de la reconstruction. Le généalogiste et l’historien de l’art y trouveront également de précieuses informations.

Carte postale. Collection particulière.

Pour se repérer dans les fonds, le chercheur profite de l’harmonisation des plans de classement décidée dès 1947 par le ministère de la Reconstruction et de l’Urbanisme. Ce plan est par la suite conforté par les Archives de France dans la circulaire n°63-7 du 7 février 1963. Il prévoit un classement en trois parties :

  • les documents liés au fonctionnement administratif de la direction départementale (réglementation, comptabilité…), toujours très utiles à l’historien.
  • les dossiers individuels regroupant les procédures dites « priorité nationale » qui sont déterminées « soit en fonction du montant élevé de l'indemnité à régler, soit en fonction du rôle particulier joué dans le relèvement de l'économie nationale par la branche industrie ou de commerce en cause » comme le rappelle le directeur des Archives de France en 1963. Ces archives sont d’autant plus précieuses qu’elles mettent en avant les secteurs désignés comme étant prioritaires par l’État.
  • les autres dossiers individuels traités sur le plan départemental.

Cette dernière partie, la plus volumineuse, est très certainement celle qui intéressera le plus les généalogistes. En effet, à partir du fichier nominatif, il est particulièrement aisé d’accéder au dossier d’une personne préalablement identifiée. Les dossiers sont dissociés selon cinq catégories : habitations des particuliers ; bâtiments et éléments d'exploitations agricoles ; bâtiments et éléments d'exploitations industrielles et commerciales (qui comprend un sous-groupe composé des sociétés d'armement et des bateaux de pêche) ; bâtiments et éléments d'exploitation des services publics (dont des monuments historiques) ; mobiliers1.

On trouve dans chaque dossier l’évaluation du sinistre, les plans et projets de reconstruction et de réparation, les – éventuels – permis de construire et certificats de conformité, ainsi que les devis et règlements financiers. On y découvre parfois aussi des photographies de l’état des bâtiments avant-guerre, ou suite à leur destruction.

Malheureusement, de nombreuses éliminations sont autorisées à la fin des années 1960 après règlement des dédommagements. Si certains dossiers sont détruits dans leur intégralité (dossiers d'allocations d'attente), d’autres sont échantillonnés (dossiers agricoles, dossiers mobiliers)…  Dans certains départements particulièrement sinistrés, comme dans le Morbihan, près d’un kilomètre linéaire de documents auraient ainsi été produits par l’administration jusque dans les années 1970. Il n’en demeure plus que 360 mètres, désormais conservés aux Archives départementales, soit une perte de l’ordre des deux tiers.

La cathédrale de Saint-Malo, sans date. Photographie. Collection particuière.

Ces recherches sont facilitées par l’accessibilité sans restriction des archives. Pour une estimation plus complète – et plus visuelle – les fonds de la direction départementale des dommages de guerre peuvent être complétés par les photographies aériennes réalisées par la mission photographique du ministère de la Reconstruction et de l’Urbanisme après 1944.

Yves-Marie EVANNO

 

 

1 La grande majorité des dossiers concernant le mobilier (meubles, vélos…) ont néanmoins été éliminés dans les années 1960.