Les « jolies colonies de vacances » de Brécéan : entre vie au grand air et découverte de la Bretagne

« Les jolies colonies de vacances
Merci maman, merci papa
Tous les ans, je voudrais que ça r'commence
You kaïdi aïdi aïda. »

La chanson est bien connue et rend nostalgiques la plupart des adultes qui partaient en « colo » à l’âge des têtes blondes. Plus encore ceux qui ont connu l’âge d’or des colonies de vacances, avant le milieu des années 1960. A cette époque, ils sont alors plusieurs millions à partir chaque année, grâce aux œuvres sociales des comités d’entreprises, ou aux associations issues des mouvements d’éducation populaire, à la montagne, à la campagne ou au bord de la mer. A ce titre, la Bretagne est une destination phare pour les colos, comme en témoigne le film « Brécéan, une colonie de vacances de l’été 1950 », issu des fonds d’archives des CEMÉA (Centres d'entrainement aux méthodes d'éducation active) et conservée au Pôle de conservation des archives des associations de jeunesse et d'éducation populaire (PAJEP) .

Le centre de Brécéan. Carte postale. Collection particulière.

Brécéan est « une propriété située toute proche de la mer », au bout de la plage du Nau au Pouliguen (44). D’après les crédits du film, la colonie de vacances, qui s’est installée dans les murs, est gérée à la fois par l’Etat, à travers la Mutuelle générale de l'Éducation nationale (MGEN), ainsi que par des associations de jeunesse et d'éducation populaire : la Jeunesse au plein air (JPA), la Fédération de la Seine des œuvres laïques (FSOL) et les CEMÉA. Avant la Seconde Guerre mondiale, les bâtiments sont visiblement la propriété de l'Armée, qui y installe un orphelinat pour enfants de militaires. En cet été 1950, ce sont « 133 petits parisiens […] qui viennent s’ébattre [à Brécéan] pendant deux mois ». Malgré le château de style néo-classique, Brécéan ressemble à n’importe quelle autre colo : dortoirs et réveil au son du hautbois sont de rigueur.

Côté activités, la colonie de vacances de Brécéan est dans la droite ligne des théories hygiénistes du XIXe siècle et des politiques initiées sous le Front populaire pour promouvoir les bienfaits de la vie au plein air. Les garçons les plus âgés se familiarisent, par exemple, avec le volley-ball. Les bains de mer et les jeux de plage trouvent, bien entendu, une large place dans la vie des enfants à Brécéan : « il y a ceux qui ne savent pas nager et qui apprennent », encadrés par des moniteurs et aidés par leurs petits camarades. On remarque au passage que si la mixité est la règle au sein de la colonie, filles et garçons ne se mélangent guère sur la plage : la thèque, le ballon prisonnier ou les jeux de construction avec le sable sont l’apanage des garçons quand les filles s’adonnent à la marelle. Seules la pêche à pied et la baignade semblent réunir tout le monde. La colonie de vacances est également l’occasion de développer des activités pédagogiques très liées aux mouvements d’éducation populaire : théâtre, chant, danse, tissage etc.

Pour autant, la vie en colonie de vacances ne se cantonne pas à Brécéan. Au cours de leur séjour, les enfants partent également à la découverte de la région. Un groupe de jeunes part ainsi camper « à la campagne près de la Roche-Bernard ». C’est l’occasion d’apprendre à être autonome, notamment « d’assurer sa subsistance » en faisant les courses : avec « 500 francs […] il faut acheter des pommes de terre, du beurre, du cidre, des fruits et du pain ». Une « grande excursion à travers la Bretagne » est également organisée. Les enfants arpentent ainsi le port de Saint-Nazaire, les marais de la Grande Brière, le centre historique de Vannes et embarquent pour une petite croisière sur le Golfe du Morbihan.

Au centre de Brécéan. Carte postale. Collection particulière.

Au-delà de l’aspect « souvenir de vacances » que peut avoir ce film pour les enfants qui ont fréquenté Brécéan au cours de l’été 1950, il faut garder à l’esprit que ce document est avant tout à but promotionnel, comme le dit très bien la voix off : « Si vous voulez connaître tous les jeux que l’on peut inventer sur une plage avec de bons amis et des moniteurs ingénieux, le mieux est encore que vous veniez avec nous l’année prochaine ». En effet, la démocratisation des vacances et la massification du tourisme familial deviennent, au fil des Trente glorieuses, une concurrence féroce pour les colonies de vacances.

Thomas PERRONO

 

 

 

 

 

 

 

1 Arch. dép. Val-de-Marne : PAJEP. « “Brécéan, une colonie de vacances de l’été 1950”, par la MGEN, la JPA, la FSOL, et les CEMÉA », en ligne.