« Remonter le temps » avec l’IGN

Les cartes et photographies aériennes anciennes sont de formidables sources. Semblables à des failles spatio-temporelles, elles permettent à l’historien et le généalogiste qui souhaitent s’y engouffrer d’observer l’évolution du territoire au cours du temps. Point de vaisseau spatial pour ce voyage au travers les âges mais un très utile portail de l’IGN, remonterletemps.ign.fr, outil qui mérite d’être connu tant ses possibilités sont nombreuses.

Un portail simple d'accès, à l'interface agile et offrant de nombreuses possibilités de recherche.

Petit frère du colossal Géoportail, Remonter le temps propose à l’utilisateur de visualiser des cartes anciennes : carte de Cassini du XVIIIe siècle, cartes d’État-major (1820-1866) et cartes IGN à l’échelle 1:50 000 datant de 1950. On y trouve également près de 3 millions de photographies aériennes qui couvrent l’ensemble du territoire français sur la période 1950-1965. Mais l’originalité de ce nouveau portail, qui en fait assurément tout son intérêt pour l’historien, c’est la possibilité de comparer ces données anciennes avec les photographies aériennes les plus actuelles.

Cet outil de comparaison de données cartographiques est très simple d’utilisation. Une fois que l’utilisateur a choisi les données qu’il souhaite comparer (cartes, photographies) ; il peut sélectionner la méthode de comparaison. La première option proposée, le « double affichage », met en parallèle une même zone avec des données différentes. Une loupe est aussi à disposition pour venir superposer la seconde donnée sur la première à un endroit précis. Autrement, des découpages horizontal et vertical permettent de glisser entre les différentes couches de données.

Pour le généalogiste, le principal intérêt est la possibilité de remonter facilement le temps d’un lieu attaché à une histoire familiale, et ce jusqu’au XVIIIe siècle ! En revanche, aucune donnée n’est disponible à propos de la propriété foncière. Les plans du cadastre napoléonien ne font pas partie des données disponibles. Dommage, mais gageons que cela devienne possible à l’avenir…

L’historien, quant à lui, trouve ici un formidable outil pour étudier l’évolution du territoire. D’un clin d’œil, en comparant les photographies aériennes des années 1950-60 et actuelles, les opérations de remembrement se révèlent, comme ici au sud-est du bourg d’Amanlis, dans la campagne rennaise. Les petites parcelles constellées d’arbres ont depuis laissé place à des champs beaucoup plus grands et à une végétation beaucoup plus regroupée. En zone urbaine également, l’étalement urbain saute aux yeux. Par exemple, les limites sud de la ville de Rennes ont été considérablement été repoussées entre 1952 et aujourd’hui. On constate sans détour l’artificialisation de la campagne par la création d’infrastructures : rocade et centre commercial Alma notamment. En cela, c’est également un bon moyen pour les professeurs d’histoire et géographie d’aborder la problématique de la périurbanisation.

La pointe des blagueurs à Larmor-Plage, dans le Morbihan: illustration de la balnéarisation du bord de mer.

On notera enfin, l’existence de deux initiatives similaires à l’échelle de la Bretagne historique. Le site GéoBretagne permet de comparer les photographies aériennes à soixante années d’écart entre la première campagne systématique menée par l’IGN en 1952 et aujourd’hui, pour les départements des Côtes-d’Armor, Finistère, Ille-et-Vilaine et Morbihan. Le département de Loire-Atlantique n’en est pas pour autant laissé pour compte, grâce au portail Vu du ciel porté par le Conseil départemental.  Ce dernier permet notamment de pouvoir étudier finement l’évolution du territoire sur la période la plus contemporaine, puisque les données des campagnes de photographies aériennes de 1999, 2004, 2009 et 2012 sont à notre disposition. Bref, même sans DeLorean à notre disposition, remonter le temps n’a jamais paru aussi facile…

Thomas PERRONO