Coupe de France 1965, la première victoire – en deux temps – du Stade rennais

Paris, Parc des Princes, 23 mai 1965. Georges Pompidou, Premier ministre, et Maurice Herzog, Haut-commissaire à la Jeunesse et aux Sports, font partie des quelques 40 000 spectateurs venus assister à la finale de la Coupe de France qui oppose le Stade rennais UC à l’UA Sedan-Torcy1. Avant le match, les deux entraîneurs livrent leurs sentiments au micro du jeune journaliste Thierry Roland2. Le Sedanais Louis Dugauguez ne tarit pas d’éloges sur ses adversaires :

« Le Stade rennais c’est une, sinon la meilleure équipe, française du moment. Elle bénéficie de joueurs très côtés, puisque dernièrement on a mis sept joueurs en équipe de France et elle a un jeu collectif qui est vraiment admirable. »

Jean Prouff, l’entraîneur des Rouges et Noirs s’attend à « un très bon match » étant donné le jeu tourné vers l’offensive des deux équipes.  

Le Stade rennais brandit la Coupe de France en 1965. Archives Ouest-France.

A l’entrée des joueurs, « Dora », le sanglier mascotte du club ardennais, explore la pelouse en compagnie de « Rodrigue », le cochon fétiche des Bretons. Dans les tribunes, les jeux de mots fleurissent sur les banderoles : « Sédan la poche pour Rennes » et les Bretons arborent leurs chapeaux ronds. « Les Sedanais sont beaucoup plus rapide en ce début de match. La défense rennaise cafouille » : 1-0 pour Sedan dès la onzième minute, puis 2-0 quatre minutes plus tard. « A la quinzième minutes du match, il semble bien que la coupe soit sedanaise ». Heureusement pour les Rennais, juste avant la mi-temps, « après deux contres favorables », le milieu André Ascensio trompe le gardien adverse. L’espoir est permis pour les Rouges et Noirs. A la 61e minute, l’attaquant vedette du Stade rennais, Daniel Rodighiero, reprend de la tête un centre de Marcel Loncle. Les deux équipes sont à égalité et le restent jusqu’à la fin du temps réglementaire et de la prolongation : « les deux équipes se retrouveront donc mercredi soir ou jeudi après-midi, toujours au Parc des Princes ». En effet, la règle est alors de rejouer un match qui se conclut par un match nul. Tout du moins jusqu’en 1970 quand un match entre Hull City et Manchester United se dénoue par une séance de tirs au but.

Bis repetita placent, le mercredi 26 mai. Les 22 joueurs – seul changement, Brucato remplace Cédolin en défense centrale rennaise – foulent à nouveau la pelouse parisienne pour tenter de remporter la Coupe de France. A nouveau, ce sont les Sedanais qui ouvrent le score sur penalty à la 20e minute. Mais les Rennais marquent par trois fois au cours de la seconde mi-temps : Rodighiero à la 47e, Loncle sur une reprise de volée à la 77e et à nouveau l’incontournable Rodighiero à la 86e minute sur penalty. Cette fois-ci, après deux finales perdues en 1922 et 1935, le Stade rennais tient son premier trophée après 210 minutes de match. La joie des Rouges et Noirs est immense quand « Maurice Herzog remet à Yves Boutet [le capitaine rennais] la Coupe de France de football »3.

« Pour les stadistes rennais et leur entraîneur, Jean Prouff, cette coupe, c'est la récompense d'une merveilleuse saison […] Les Rennais effectuent un tour d'honneur en exhibant cette coupe avec laquelle ils flirtèrent sans jamais la séduire. »

Au-delà du Parc des Princes, c’est toute la Bretagne qui s’enthousiasme. Le 28 mai, Le Télégramme de Brest titre : « Pour la première fois, la Coupe de France à un club breton ». Lors de leur retour à Rennes, le dimanche suivant, les joueurs sont acclamés :

« Dans les rues et sur les places, une énorme foule, sur les balcons ou sur les trottoirs, ovationne les footballeurs rennais. Chacun veut la toucher cette coupe. Et alors des scènes inimaginables se déroulent sous les yeux des stadistes rennais, stupéfaits par cet accueil délirant. 60, 80, 100 000 personnes peut-être venant de Brest, de Lorient, de Saint-Brieuc, de Concarneau, de tous les coins de Bretagne, apportent là un témoignage de sympathie et d'admiration. L'ambiance qui est, de mémoire de rennais, on ne se souvient guère d'un pareil enthousiasme. Il n'est pas un Breton, je crois, qui ne s'est pas senti, plus ou moins directement concerné par cet évènement sportif. »

Les joueurs célèbrent la Coupe de France avec leurs supporters à Rennes. Archives Ouest-France.

Invités au Pré-Botté, la rédaction rennaise du journal Ouest-France, les joueurs rennais ne sont pas les seuls conviés à la fête. En effet, les Canaris du FC Nantes sont également présents pour célébrer leur titre de champion de France 1964-1965. Le lendemain, le quotidien rennais titre : « Nantais, champion de France 1964-1965, et Rennais, vainqueurs de la Coupe, ont fêté ensemble leurs récents succès ». A l’époque, les Rouges et Noirs et les Jaunes et Verts règnent sans partage sur le football breton : le Stade brestois, l’En Avant Guingamp, le FC Lorient, ou le Stade briochin ne sont encore que de modestes équipes régionales. Des petits poucets auxquels la Coupe de France donne l’occasion de s’acclimater au haut niveau, comme les Briochins lors de l’édition suivant la victoire des Rennais, ou bien les Guingampais lors de la saison 1972-1973. Quant au Stade rennais, le club remporte une deuxième Coupe de France en 1971, face à l’Olympique lyonnais. Une longue disette s’installe ensuite, puisqu’il faut attendre 2019 – et deux finales perdues lors de derbys bretons face aux Guingampais en 2009 et 2014 – pour que la Coupe de France rejoigne à nouveau les bords de la Vilaine.

Thomas PERRONO

 

 

 

 

 

1 INA. « Football. Finale de la Coupe de France : Rennes-Sedan », Sports dimanche, ORTF, 23/05/1965, en ligne.

2 INA. « Football. Avant la Coupe », JT 20h, ORTF, 21/05/1965, en ligne.

3 INA, L’Ouest en mémoire. « Le Stade rennais remporte la Coupe de France de football », Bretagne actualités, ORTF, 27/05/1965, en ligne.