Un bon plan pour les étudiant.e.s

D’un aspect plus classique que l’ouvrage franco-allemand publié sous la direction de Nicolas Beaupré, Gerd Krumeich, Nicolas Patin et Arndt Weinrich, le manuel que propose Alexandre Lafon aux éditions Armand Colin n’en est pas moins un volume qui rendra de riches services à de nombreux étudiants devant plancher sur la Première Guerre mondiale1. Optant pour une approche résolument chronologique, là où André Loez adopte un plan plus thématique dans son manuel publié en 2014 aux éditions de La Découverte, l’ouvrage a l’immense intérêt de replacer le combat au centre du propos.

Carte postale. Collection particulière.

Une telle affirmation pourra d’ailleurs paraitre étonnante à qui n’est pas totalement familier avec l’historiographie de la Grande Guerre. Pourtant, il est un fait que le déroulement opérationnel du conflit n’est pas au centre des préoccupations, celles-ci se focalisant pour l’essentiel, en France, sur la question de la ténacité des combattants (p. 80). Or ce qui relève bien d’un oukase jeté à l’encontre d’une histoire militaire perçue comme périmée nous semble particulièrement dommageable car en définitive, comment comprendre un objet aussi immense que 14-18 si on n’en maîtrise pas les bases opérationnelles ? C’est bien cette réalité qui, d’ailleurs, nous avait ici-même conduit à souligner l’importance de l’étude que Rémy Porte consacre à l’épineuse question de la rupture du front pendant la Première Guerre mondiale.

Classique dans son intitulé puisque que chronologique, le plan retenu par Alexandre Lafon pour ce manuel n’en est pas moins le reflet singulier d’un auteur connu pour ses travaux sur la camaraderie des poilus. A la différence d’un John Horne dont on connait le plaidoyer en faveur d’un « long 1915 »2, il joint les années 1915 et 1916 dans un même troisième chapitre, intercalé entre « l’entrée en campagne » et une séquence 1917-1918 caractérisée par la « lassitude », puis la « remobilisation » et la « victoire ». On pourra toujours argumenter sur la pertinence d’un tel découpage chronologique, celui-ci accordant peut-être une place excessive à une année 1917 trop souvent présentée comme un tournant, il n’en demeure pas moins que le propos reste toujours équilibré.

En préambule de son ouvrage, Alexandre Lafon avance que le choix chronologique ayant conduit la composition de ce petit manuel lui paraît « le mieux permettre de saisir la manière dont la France et les Français ont vécu la guerre » (p. 11). Là est sans doute une assertion qu’il serait possible de débattre pendant des heures, dans un sens comme dans l’autre d’ailleurs. Il n’en demeure pas moins que ce synthétique ouvrage permet de comprendre le déroulement fin du conflit, préambule indispensable à tout approfondissement ultérieur sur la séquence 1914-1918. En cela, il est un outil pédagogique qui mérite l’attention.

Erwan LE GALL

LAFON, Alexandre, La France de la Première Guerre mondiale, Paris, Armand Colin, 2016.

 

 

 

1 LAFON, Alexandre, La France de la Première Guerre mondiale, Paris, Armand Colin, 2016. Afin de ne pas surcharger inutilement l’appareil critique, les références à cet ouvrage seront dorénavant indiquées dans le corps de texte, entre parenthèses.

2 HORNE, John (Dir.), Vers la guerre totale, le tournant de 1914-1915, Paris, Tallandier, 2010, p. 79.