Autour de l'offensive du 25 septembre 1915. En tranchées avec le 47e régiment d’infanterie

 

La démarche monographique en ce qu’elle se place au plus près des archives compte assurément parmi les moyens permettant de renouveler les connaissances, tout particulièrement en histoire militaire. C’est ainsi que l’exemple du 47e régiment d’infanterie de Saint-Malo lors de l’offensive du 25 septembre 1915 révèle les importantes faiblesses dont souffre alors l’Armée française, tant sur le plan humain que tactique.

 

Par Erwan LE GALL

 

 

L’histoire militaire, au sens classique du terme, pour ne pas dire périmé, est essentiellement faite de fougueuses batailles, d’assauts sanglants et de gestes héroïques, comme un miroir de cette furia francese tant exaltée lors des manœuvres de la Belle époque. Loin de mourir avec la guerre industrielle, ce genre se renouvelle au cours des années 1920 puisqu’il faut bien célébrer le poilu : c’est en effet lui que l’on crédite de la victoire, et non les pièces d’artillerie toujours plus puissantes, les nids de mitrailleuses sans cesse plus performants ou encore les tanks indestructibles1. L’historique officiel du 47e régiment d’infanterie (RI), petit opuscule publié en 1920 à Saint-Servan, en est à cet égard un parfait exemple2.

Pourtant, aujourd’hui, il apparait que pour saisir au mieux l’expérience des combattants de la Grande Guerre, les temps morts, les périodes de calme voire les à-côtés du conflit sont tout aussi essentiels que les sommets de violence3. Plus encore, face au gigantisme d’une armée française qui mobilise près de 8 millions d’hommes au cours de la Première Guerre mondiale, le recours à la monographie régimentaire, l’unité étant alors prise dans une dimension indiciaire, s’impose comme un excellent outil permettant de renouveler une histoire bataille de la Grande Guerre qui ne semble que modérément atteinte par la fièvre éditoriale engendrée par le centenaire. En effet, examiner une particule élémentaire telle que le 47e RI lors de l’offensive du 25 septembre 1915 permet de mettre en évidence les graves lacunes humaines mais aussi doctrinales des troupes commandées par le généralissime Joffre. Or cette démarche nous semble d’autant plus nécessaire que l’année 1915 fait bien souvent figure de parent pauvre de l’historiographie, étant sans doute moins vendeuse d’un point de vue mémoriel et éditorial que ne peuvent l’être 1914 et 1916, constellées de noms aussi prestigieux que la Marne, Verdun ou encore la Somme. Pourtant, du fait notamment d’ambitieuses politiques publiques de numérisation, nombreuses sont les archives à n’avoir jamais été aussi aisément accessibles à l’historien, offrant par la même occasion de multiples et nouvelles perspectives d’analyses.

Carte postale. Collection particulière.

Permettant de contourner l’opacité de la source classique de l’histoire militaire que sont les journaux des marches et opérations (JMO), les registres matriculaires du recrutement du 47e RI révèlent une armée française considérablement diminuée par la violence ordinaire de la guerre et la politique de récupération. Il en résulte un problème humain d’autant plus important qu’il ne fait que souligner les graves lacunes tactiques dont souffre l’emploi des troupes au moment de passer à l’assaut. Ainsi, au final, loin d’assurer la percée que chacun souhaite décisive, la grande offensive du 25 septembre 1915 ne fait que rendre plus prégnante les difficultés de départ.

 

A l’ombre des sources : une guerre silencieuse mais réelle

Après de rudes combats en Artois4 puis un bref intermède dans les environs d’Amiens, le 47e RI occupe du 19 août au 21 septembre 1915 des tranchées situées entre Saint-Thomas-en-Argonne et Servon5, en Champagne. Tenues pour négligeables par l’historique officiel de l’unité, peu documentées par le JMO, ces journées sont pourtant essentielles en ce qu’elles révèlent la violence ordinaire de la Première Guerre mondiale, réalité comme tenue à l’ombre des sources, occultée par les grandes batailles et, en l’occurrence, l’offensive du 25 septembre.

L’an I de la guerre

Comme en août 1914, le 47e RI demeure une particule élémentaire de la gigantesque organisation qu’est l’Armée française de 1914-1918 et son arrivée dans le secteur de Saint-Thomas ne résulte nullement d’une décision du lieutenant-colonel Bühler commandant l’unité6. Le 10e corps d’armée de Rennes est en effet relevé d’Artois par le 12e de Limoges pour participer à la prochaine offensive d’automne, mouvement qui mobilise une logistique impressionnante puisque les hommes sont transportés « par autos pour les troupes à pied, par voie de terre pour les troupes montées, courriers et équipages »7. C’est sans doute cette position très subalterne dans l’organigramme qui explique que les poilus ne sont la plupart du temps pas au courant des décisions qui sont prises pour eux par les échelons supérieurs. Ainsi, lorsque le 47e RI reçoit le 31 juillet l’ordre de quitter ses cantonnements après quelques jours passés dans les environs d’Amiens, le rédacteur du JMO note que cela est « pour une destination inconnue »8.

Cette ignorance contraste singulièrement avec l’importance prise, en un an de campagne, par le renseignement opérationnel. En effet, contrairement à Charleroi ou à la Course à la mer, le 47e RI dispose à la veille de monter en ligne d’informations à propos du terrain qu’il s’apprête à occuper, un phénomène qui avait déjà pu être décelé au cours du printemps 1915 où des reconnaissances sont organisées pour repérer les tranchées autour du Labyrinthe9. Quelques semaines plus tard, en août 1915, la 40e brigade reçoit de la 252e brigade lors de son arrivée en Champagne un croquis extrêmement précis du secteur qu’elle doit occuper10, ce qui parait non seulement témoigner d’une certaine institutionnalisation de ce type de pratiques mais aussi d’une réelle prise en compte de l’importance du terrain. Celui-ci apparait d’ailleurs formidablement complexe, les positions ennemies étant très rapprochées, notamment dans l’Est du secteur. Sans doute est-ce d’ailleurs cela qui justifie, au moins pour partie, la constitution de trois « lignes de précaution », un dispositif inédit pour le 47e RI puisque les tranchées qu’il occupait précédemment en Artois en étaient dépourvues. On sait en effet que c’est à cette époque qu’à la suite des Allemands le commandement français théorise le concept de défense en profondeur11, doctrine qui ici se matérialise manifestement par ces « lignes de précaution ». Ajoutons de surcroît que cet intitulé n’est pas sans faire référence aux réserves lexicales imposées par Falkenhayn, le chef de l’état-major général allemand, interdisant « de désigner les lignes arrière par les termes suivants : tranchée de repli, tranchée de contre-attaque, tranchée défensive, tranchée de protection »12.

Croquis du secteur de Saint-Thomas tel que fourni à la 40e brigade par la 252e.

Un tel ordre dit bien le prisme déformant que peuvent constituer les archives. Ainsi, bien que relativement silencieuses sur la période qui précède la montée en ligne du 47e RI, les sources ne doivent pour autant pas induire en erreur. Si l’unité stationne pendant quelques jours, du 17 au 25 juillet 1915, dans un cantonnement de « repos » à Hauteville, localité située à l’ouest d’Arras, entre Avesnes-le-Comte et Wanquetin, cette expression ne doit pas être considérée littéralement. Il ne s’agit d’un cantonnement « de repos » que si on le compare aux rigueurs des tranchées. Dans la journée du 15 juillet 1915, le 25e RI qui a remplacé le 47 en ligne doit en effet endurer un bombardement qui bien que « lent » et « intermittent » est « extrêmement précis » et cause des pertes sérieuses : 11 tués et 26 blessés13. Les hommes, eux, sont durement sollicités comme en témoigne le rédacteur du JMO du 47e RI qui s’empresse de faire suivre la mention « repos » des expressions « Exercices – Instruction – Travaux de propreté », qui toutes semblent bien décrire l’activité réelle des poilus14.

Un nouveau combat

Jusqu’au 19 août 1915, les hommes du 47e RI sont employés à des travaux de deuxième ligne, en réserve de leurs compagnons d’armes du 2e RI qui eux sont en première15. Bien que situés légèrement en retrait, les poilus n’en sont pas moins exposés à de graves dangers. Blessé le 15 août 1915, Désiré Lefeuvre en est un bon exemple puisqu’il doit subir l’amputation du bras droit16. Ensuite, à partir du 19 août 1915, et ce jusqu’au 21 septembre 1915, le régiment de Saint-Malo relève son homologue de Granville et se livre lui aussi à de nombreux travaux d’aménagements du secteur. Faussement calme, la période appelle un certain nombre de remarques.

La première, essentielle, concerne l’activité des fantassins. Parmi les nombreux « travaux d’aménagement du secteur » entrepris à cette période par le 47e RI, les archives font état de 8 « nouveaux boyaux de communication » ainsi que d’un « ouvrage fermé pour deux compagnies » situé sur la côte 163, chantier dont les plans sont conçus par le génie et exécutés par les fantassins du 47e RI17. Sans doute anodin de prime abord, cet élément témoigne pourtant d’une certaine pratique interarmes qui, indéniablement, contraste avec la situation qui prévalait quelques mois auparavant, au début de l’hiver 1914-1915. En effet, c’est bien à une spécialisation croissante des troupes que l’on assiste, mouvement qui impacte l’armée française dans son ensemble en conférant, dans le cas présent, au génie un rôle de conception et à l’infanterie la lourde tâche de la réalisation18. Ce qui pourrait s’apparenter à une certaine forme d’organisation scientifique du travail parait ici bien symbolisé par le chef de bataillon de l’état-major du génie de la IIIe armée à qui est confié la direction des travaux dans le secteur de Saint-Thomas19. Mais cette évolution influe également sur la structure même du 47e RI. En effet, en application de l’ordre du général Joffre du 18 août 1915, l’unité est dotée d’un peloton de sapeurs dont le commandement est confié au chef de peloton Delastelle20. Secondé dans sa tâche par l’adjudant Lecorre de la 8/47e RI, un sous-officier à propos de qui nous ne disposons d’aucun élément, Adrien Delastelle est un militaire ayant effectué jusqu’alors toute sa carrière au sein de l’unité, d’abord en tant que conscrit entre 1903 et 1905, puis  en tant que sous-officier. Originaire de Lessay dans la Manche, il est un fils d’agriculteur que le conseil de révision extirpe de sa condition d’employé de bureau. Vraisemblablement investi dans les œuvres postscolaires de l’unité, comme semble l’indiquer la Médaille d’argent du ministère de l’Instruction publique et des Beaux-Arts qu’on lui décerne le 22 juillet 1914, il parait correspondre en tous points à la définition du « bon élément ». Sergent-major lors de la mobilisation générale, il est promu adjudant le 6 septembre 1914 puis est blessé le 5 octobre 191421. Preuve donc de l’importance accordée à ce peloton de sapeurs, son commandement est confié à un homme de confiance qui, par ailleurs, est promu quelques jours plus tard au rang de sous-lieutenant22.

Dans une sape au nord de Vienne-le-Chateau, en Argonne. BDIC: VAL 130.D2014.

Car il convient de ne pas s’y tromper. Ce peloton de sapeurs n’est pas un groupement symbolique, d’apparat, au sein de l’unité. Il s’agit d’une création qui témoigne assurément de la prise en compte de l’évolution de la nature même du champ de bataille, espace où la pelle a désormais autant d’utilité, si ce n’est plus, que la baïonnette. C’est en effet en termes de combat que doit se comprendre l’activité de ces sapeurs, à qui l’on adjoint d’ailleurs une section de bombardiers23. Le rédacteur du JMO de l’unité est sur ce point sans équivoque puisque les travaux entrepris par le 47e RI depuis le 19 août 1915 sont considérés comme étant « offensifs »24. Ajoutons d’ailleurs qu’il ne s’agit pas là d’un cas unique puisque les rapports quotidiens du 2e bureau du 10e corps d’armée témoignent d’une réelle crainte des mines allemandes, notamment sur les lignes tenues pas la 20e division. Il est vrai que dans certaines sapes, on « entend des bruits très forts » qui laissent envisager le pire25. Aussi, il convient de nuancer l’impression de faible activité militaire qui émane, à cette époque, de la lecture du JMO du 47e RI : s’il n’y a pas d’attaques ou de coups de mains mentionnés, l’activité n’est pas nulle, bien au contraire.

Faux calmes et vrais morts

Là est d’ailleurs la seconde remarque qu’appelle la période allant du 19 août au 21 septembre 1915 puisqu’il apparait en effet essentiel de se garder de l’impression de « calme » qui peut émaner de la lecture de cette source. De part et d’autres de la ligne de front, on ne cesse de s’observer comme en témoignent les rapports quotidiens du 2e bureau du 10e corps d’armée mais également les tirs de l’artillerie allemande sur les parallèles de départ nouvellement percées, « dans le but vraisemblable de faire des réglages »26. De plus, il est à noter que le rédacteur du JMO de la 20e division semble employer un champ lexical plus suggestif que celui de son homologue du 47e RI en ce qui concerne l’activité des artilleurs allemands. Le 24 août, le bombardement est ainsi décrit comme « assez violent » même si concentré sur l’arrière des tranchées27. Plus tard, il est question d’une « activité marquée des deux artilleries » puis d’une « violente canonnade allemande »28. De même les calibres employés paraissent très diversifiés : du simple mortier le 3 septembre aux gros obus quatre jours plus tard29. Le 15 septembre, il est même question de mines30. Par ailleurs, on sait que lors des mois d’août et septembre 1915 les reconnaissances aériennes cherchant à déterminer l’emplacement exact des positions ennemies se multiplient à un rythme particulièrement soutenu dans le secteur31.

Il en résulte donc une situation qui contraste grandement avec ce que dépeint le JMO du 47e RI, source qui ne déplore qu’une seule perte pour la période : la blessure du capitaine Beaudoin commandant la 6e compagnie, atteint d’un éclat d’obus alors que lui et ses hommes sont occupés à des « travaux de creusement de boyaux de communication »32. Or, en reprenant les données collectées dans le thésaurus des morts pour la France du 47e RI, on obtient 38 noms dont 29 renvoient à des individus tués à l’ennemi ou décédés des suites de blessures ou de maladie contractées dans le secteur de Saint-Thomas33. Considérant qu’il y a peu de probabilités pour qu’un homme qui aurait été blessé au printemps 1915 en Artois soit évacué vers une formation sanitaire de Champagne, il est donc possible d’avancer sans trop de risque d’erreurs que tous ces décès sont liés au séjour que le 47e RI effectue dans ces parages entre le 19 août et le 21 septembre 1915. Il en résulte un bilan contrastant singulièrement avec l’impression laissée par la lecture du JMO de l’unité. En observant attentivement les données relatives à ces morts pour la France, on remarque que non seulement 8 de ces individus sont âgés de 23 ans ou moins, ce qui correspond au recrutement théorique de l’armée d’active tel qu’il est fixé par la loi de trois ans, mais que, de surcroit, 13 sont âgés de plus de 30 ans. Or, au regard de ce même texte, ces individus auraient dû servir sous l’uniforme d’une unité de la territoriale. Symbolique est à cet égard le cas d’Henry Auffray, né le 1er octobre 1880 à Rennes : bien que sa fiche matricule fasse état d’un passage théorique dans la territoriale en 1914, il est en réalité tué à l’ennemi le 30 août 1915 au Ravin des pommiers, sous l’uniforme du 47e RI34.

Le Ravin des pommiers à la fin du mois de novembre 1915. BDIC: VAL 130. T654.

L’explication de cette moyenne d’âge élevée, par rapport aux normes en vigueur jusqu’à l’été 1914, réside dans les terribles pertes des premières semaines de la campagne et de l’immense effort qu’il a fallu produire pour garnir les rangs décimés à Charleroi, Guise ou encore au sud d’Arras. Un des moyens pour ce faire aurait été de s’affranchir du strict cadre régional du recrutement et de puiser dans d’autres départements que ceux des Côtes-du-Nord, de l’Ille-et-Vilaine et de la Manche mais les chiffres montrent que si cette solution a probablement été retenue, ce changement de politique ne porte pas encore ses fruits au début du mois de septembre 191535. En effet, parmi les 29 morts que déplore le 47e RI à la suite de son passage en tranchées dans le secteur de Saint-Thomas entre le 19 août 1914 et le 21 septembre 1915, l’essentiel des victimes naît sur le territoire de la 10e région militaire et provient d’un bureau de recrutement situé dans les Côtes-du-Nord, en Ille-et-Vilaine ou dans la Manche. Certes, le Corrézien Antoine Puydebois arrive le 25 juin 1915 au 47e RI en provenance du 100e RI, en même temps que le Flamand Antoine Derycke qui, lui, est transféré du 84e RI, une unité tenant garnison à Avesnes-sur-Helpe, Le Quesnoy et Landrecies36. Pour autant, ces entorses au recrutement régional sont encore trop peu nombreuses pour peser sur la réalité démographique des rangs, encore massivement rattachés à la 10e région militaire.

Au final, c’est donc éprouvé que se présente le 47e RI à la veille de la grande offensive du 25 septembre 1915, fatigué par une activité assurément plus intense que ne suggère la documentation disponible et diminué par des pertes plus importantes que ne veulent bien le dire le JMO.

 

La quantité face à la qualité ?

Or, ces morts posent de facto la question de leur remplacement puisque, quoi qu’il advienne, les rangs doivent être garnis et les postes pourvus pour participer à la grande offensive du 25 septembre 1915. Ce faisant, ils révèlent une armée française d’autant plus faible que les choix tactiques opérés se révèlent désastreux.

Récupérer le potentiel

En consultant les fiches matricules des 29 fantassins du 47e RI morts pour la France entre le 19 août et le 21 septembre 1915, et dont le décès est directement imputable aux opérations du secteur de Saint-Thomas, on mesure en effet combien c’est, au final, l’abaissement des critères physiques de sélection qui parait avoir été choisi pour regarnir les rangs. Définie par P. Boulanger comme étant le rappel massif de personnes exemptées, ajournées ou affectées dans le service auxiliaire en les versant dans des unités combattante afin de combler rapidement les pertes des premières semaines de campagne37, la politique de récupération a des conséquences qui sont clairement visibles sur les rangs du 47e RI en ce début de mois de septembre 1915. En effet, sur les 29 morts du corpus que l’unité déplore sur la période, 10 présentent un parcours médical jugé avant le 31 juillet 1914 incompatible avec le service armé38. Tel est le cas par exemple de Paul Gautier. Natif du Gouray dans les Côtes-du-Nord, il est incorporé le 16 novembre 1904 en tant que soldat de 2e classe au 5e RI dans le cadre de son service militaire puis est réformé le 24 février 1905 par la commission spéciale de réforme de Falaise pour « ectopie testiculaire droite douloureuse ». Renvoyé dans ses foyers, il est alors rayé des contrôles jusqu’à ce que le Conseil de révision d’Ille-et-Vilaine le classe, le 24 décembre 1914, « bon pour le service armé »39.

Carte postale. Collection particulière.

Bien entendu, il est difficile d’affirmer que tous ces soldats ne sont pas aptes à servir dans une unité d’active telle que le 47e RI. Classé dans la 5e partie de la liste en 1913 pour « faiblesse », Louis Sylvestre est incorporé au 47e RI le 9 septembre 1914 en tant que soldat de 2e classe mais les archives ne nous permettent malheureusement pas de déterminer si effectivement cet homme est alors en mesure de porter les armes40. Il n’échappera en effet à personne que non seulement la « faiblesse » reste une pathologie particulièrement floue mais que, de surcroît, celle-ci peut être évolutive, tant du point de vue de la physiologie du patient que du regard du praticien. J. Maurin ne dit d’ailleurs pas autre chose lorsqu’il rappelle « l’importance conjoncturelle des infirmités et maladies »41. Néanmoins, un certain nombre de cas paraissent particulièrement structurels, y compris au regard du non-spécialiste de la chose médicale qu’est l’historien du fait militaire, ce qui tendrait à confirmer que c’est en abaissant les critères de sélection que le 47e RI parvient à regarnir ses rangs. Louis Tropée est ainsi reconnu apte au service armé en décembre 1914 après avoir pourtant été examiné en 1905 et 1906 par deux commissions qui toutes deux prononcent la réforme au vu d’un dossier médical particulièrement lourd : l’intéressé est en effet atteint d’adénite cervicale double (il s’agit d’une inflammation de ganglions dans la gorge) et d’hypertrophie du cœur42. De même, ce sont des problèmes cardiaques qui conduisent Guillaume Le Dily à être exempté de service militaire en 1908. Rappelé à l’activité le 15 février 1915, il décède moins de 7 mois plus tard, tué à l’ennemi sous l’uniforme du 47e RI le 11 septembre 191543. Enfin, que dire du cas de Joseph Le Guyader ? Ce cultivateur natif de Bégard, dans les Côtes-du-Nord, est incorporé le 27 novembre 1913 au régiment de Saint-Malo mais, du fait d’une « myopie supérieure à 6 dioptries », ce qui correspond à une vision inférieure à 1/20e, est affecté au service auxiliaire. Pourtant, c’est bien en l’hôpital Valmy de Sainte-Menehould qu’il décède le 14 septembre 1915, des suites de blessures de guerre44. En d’autres termes, c’est un quasi aveugle qui est envoyé renforcer les rangs du 47e RI à la suite d’un versement dans le service armé qu’il est par ailleurs impossible de dater, la fiche matricule de l’intéressé ne comportant pas cette information. Dès lors,  se pose la question de savoir si le cas de Joseph Le Guyader est représentatif de la troupe du 47e RI en ce début du mois de septembre 1915, ce qui reviendrait peu ou prou à ériger l’unité en une cohorte d’éclopés. En l’absence de document permettant d’avoir une idée précise du nombre de soldats présents à cette époque, et accessoirement de leur identité afin de pouvoir déflorer leur dossier médical, il est bien entendu difficile d’être définitif. De plus, il semble hasardeux d’affirmer que la blessure fatale de Joseph Le Guyader découle directement de sa vision défaillante : un obus de gros calibre n’opère pas de distinction parmi les poilus qu’il fauche en s’abattant sur une tranchée ennemie et rien ne permet au vu des archives dont on dispose de certifier que ce n’est pas un tel projectile qui conduit au décès de ce soldat. A l’inverse, il n’est pas anodin de constater qu’Antoine Puydebois décède le 29 août 1915 des suites d’une « pneumonie contractée au cours de la campagne » alors que, précisément, ce Corrézien né en 1880 est ajourné par deux fois en 1901 et 1902 puis est classé l’année suivante comme relevant du service auxiliaire pour cause de « faiblesse »45. Aussi, s’il parait en définitive hasardeux d’avancer que tous les hommes que la récupération conduit sous l’uniforme du 47e RI sont a priori aussi peu aptes à combattre que ne semble l’être Joseph Le Guyader, il est à peu près hors de doute qu’un certain nombre d’entre eux ne présente pas une constitution optimale, à l’instar d’Antoine Puydebois, un soldat que la mort fauche à l’âge de 35 ans. Aussi, si les 30% de combattants « récupérés », et donc inaptes au regard des critères de sélection datant d’avant le 1er août 1914, traduisent sans doute un certain effet de source, gageons toutefois que l’impression qui en résulte n’est pas totalement éloignée de la réalité.

En effet, un certain nombre de cas laissent à penser que les autres poilus de l’unité, et tout particulièrement ceux qui sont en campagne depuis le mois d’août 1914, sont en cet été 1915 dans une condition physique, mais aussi morale, assez précaire. Certes, il y a les combattants qui comme Julien Loret peuvent profiter d’une permission, mais on sait les effets de ces congés limités. En effet, ce conscrit précise bien dans ses mémoires qu’il est un des premiers au sein de sa compagnie à bénéficier d’un tel droit, ce qui rappelle que tous les hommes n’ont pas pu en bénéficier à la fin du mois de septembre 191546. De plus, et même si le témoignage de Julien Loret est sur ce point peu disert, on sait que le retour au front à la suite d’une permission est souvent source de cafard pour les hommes47.

L’impossible percée

Après une soixantaine d’heures passées en cantonnement « de repos », le 47e RI retourne le 24 septembre 1915 en tranchées et occupe le sous-secteur de Saint-Thomas. Comme à son habitude, le JMO se contente d’informations techniques, éléments qui ne laissent supposer aucune difficulté particulière et qui, en tout cas, ne permettent pas de se faire une idée de l’état d’esprit des troupes en cet instant particulier48. Mais des témoignages produits ultérieurement, à la faveur d’un procès en révision d’une condamnation à mort prononcée par le Conseil de guerre de la 20e division, font apparaître que les hommes sont non seulement épuisés mais que du fait de l’exiguïté des boyaux, de l’importance du trafic et d’une consommation semble-t-il abondante d’alcool, cette montée en ligne est des plus pénibles49.

Carte postale. Collection particulière.

Nonobstant l’état des rangs, le 47e RI agit en fonction de l’ordre n°166 du général Anthoine commandant le 10e corps, instruction datée du 18 septembre 1915. Placée en réserve des troupes d’assaut dans le « ravin des places d’armes », l’unité a pour mission de suivre l’élan, de s’infiltrer dans la brèche provoquée par les premiers éléments et de se rabattre sur la gauche du théâtre d’opérations pour « attaquer ou masquer Servon suivant les évènements »50. En conséquence, les hommes du lieutenant-colonel Bühler se postent derrière le 167e RI qui a pour mission de sortir des lignes comprises entre la tranchée 16 à droite et le bois en dent de scie à gauche51. C’est le III/47e RI qui est censé mener la marche, suivi des II et I/47e RI. Pour l’occasion, chaque bataillon dispose d’un certain nombre de renforts. Les II et III/47e RI, respectivement aux ordres des commandants Emile Fatou et Auguste Joseph, sont ainsi complétés d’une section de mitrailleuses et d’une section des éléments du génie du 10e corps. Le I/47e RI, qui est lui placé sous les ordres du capitaine Roussette et se trouve le plus en retrait dans le dispositif, se voit adjoindre deux sections de mitrailleuses, la CHR/47e RI ainsi que des pionniers et des bombardiers52. Dans leurs emplacements respectifs, les 168e et 169e RI s’apprêtent également à jaillir et à fondre sur les objectifs qui leurs sont assignés53. Pour faciliter l’évolution des hommes, des brèches sont préalablement opérées dans les réseaux de fil de fer français54.

Le JMO du 167e RI permet d’avoir une bonne idée de la manière dont s’enchaînent alors les évènements. La préparation d’artillerie débutée quatre jours plus tôt cesse brusquement à 9 heures 15, au moment précis où 4 vagues parallèles sortent à l’assaut des tranchées ennemies. Aussitôt les Allemands commandent au moyen de fusées blanches, rouges et vertes un violent tir de barrage qui, s’il gêne la progression des éléments à la droite du champ de bataille, n’empêche pas les poilus d’avancer. Ainsi, au bout de 15 minutes, le I/167e RI parvient à s’emparer du Bois en dents de scie tandis que les autres bataillons prennent possession des premières lignes allemandes. Mais, ce faisant, les poilus découvrent un blockhaus et de nombreuses défenses intactes. Alors que l’artillerie allemande redouble son tir de barrage, le 167e RI doit encaisser une violente contre-attaque et ne peut que reculer, ayant perdu de nombreux hommes et officiers. Avant 10 heures les survivants rejoignent les parallèles de départe. Suivant l’assaut du 167e RI, le III/47e RI débouche quelques instants après l’heure H des lignes françaises, franchit le réseau de fil de fer français et ne tarde pas, lui aussi, à atteindre le Bois en dents de scie. A la tête du bataillon figurent, à en croire le JMO de l’unité, bien entendu le commandant Joseph mais aussi le lieutenant-colonel Bühler, le capitaine-adjoint Guihaire ainsi que le sous-lieutenant Gaultier, chef de la section téléphonique56. Alors que le III/47e RI se trouve aux alentours de 9 heures 30 dans le Bois en dents de scie, il apparait que le IIe bataillon qui devait suivre le mouvement est lui coincé dans les boyaux et ne peut déboucher. Au même moment, les Allemands prononcent leur contre-attaque par la droite et, forçant le 167e RI à se replier, placent les hommes du commandant Joseph dans une très fâcheuse posture. Le rédacteur du JMO du 47e RI décrit bien décrit bien la situation qui, au même moment, empêche le IIe bataillon de jaillir :

« Un fouillis d’hommes du 167e, de blessés du bataillon Joseph et des divers régiments d’attaque, les bouche littéralement et rend impossible tout mouvement. Dépasser dans les boyaux des hommes chargés de sacs, encombrés de deux musettes et de deux bidons est un travail surhumain. Le IIe bataillon embouteillé dans ces boyaux n’en peut sortir et manque le départ. »57

A découvert, le IIIe bataillon essuie pendant ce temps de plein fouet la contre-attaque allemande et est quasiment décimé, à commencer par le commandant Joseph, selon toute vraisemblance tué mais dont le sort reste néanmoins longtemps incertain58. Moins d’une heure après le début de l’offensive, le régiment se voit ainsi amputé d’un tiers de ses forces, comme pris dans une souricière. Ironie de l’histoire, quelques instants plus tard, sur la Côte d’Emeraude, le général Grillot, gouverneur de Saint-Malo, remet la Légion d’honneur et la Croix de guerre à plusieurs officiers du 47e RI, demeurés au dépôt ou en convalescence59.

La densification des fronts ou la raison d’un échec ?

Eminemment meurtrières, ces quelques dizaines de minutes de combat appellent deux remarques essentielles. La première concerne la préparation d’artillerie : bien qu’au centre des préoccupations du général Pétain, celle-ci ne donne pas nécessairement les résultats escomptés comme le montre l’exemple du 167e RI, rapidement exposé aux défenses allemandes intactes et tout particulièrement à un blockhaus. La seconde se rapporte à l’extrême densification du front : il en résulte d’importants flux humains à gérer qui, faute de pouvoir s’écouler rapidement, bouchent les boyaux et les tranchées et empêchent tout renfort. C’est précisément ce qui arrive au II/47e RI, empêtré dans ses propres lignes sans pouvoir en sortir. Ce sont d’ailleurs là les deux explications essentielles apportées par le général Pétain à l’échec de cette offensive dans un rapport daté du 1er novembre 191560.

Le général Pétain à l'automne 1915 dans son wagon de commandement. Carte postale. Collection particulière.

Mais en attendant, mystique de l’offensive et mythe de la percée obligent, il faut repartir à l’assaut malgré les pertes effroyables. Après avoir rendu compte de la situation au général Riberpray, le lieutenant-colonel Bühler reçoit l’ordre d’appuyer la nouvelle attaque qui sera menée dans l’après-midi par la 249e brigade61. Formée des 76e – unité dont les casernes se trouvent à Paris, Coulommiers et Sevran – et 131e RI – tenant garnison à Orléans et Pithiviers – et renforcée de quelques éléments du génie, elle est placée dans la matinée du 25 septembre en réserve afin d’appuyer le moment venu la percée réalisée par les troupes d’assaut. A l’origine, son ordre de bataille stipule qu’elle doit s’infiltrer entre la gauche de la 128e division et la droite du 47e RI, sans doute pour elle aussi fondre sur le Bois en dents de scie. L’opération ne donnant pas les résultats escomptés, elle doit se porter en avant à 14 heures afin de dégager la gauche du 167e RI62. Pour autant, là encore, on ne peut que constater que cette « tentative d’attaque » est une nouvelle fois « sans résultats »63. Sur le papier, l’appel à des troupes fraîches peut apparaître comme une excellente initiative. Mais, en densifiant encore un peu plus le front, la 249e brigade ne fait qu’aggraver les problèmes déjà déplorés lors de cette matinée du 25 septembre 1915. Ainsi, en ce début d’après-midi, encore plus de poilus s’amoncellent dans les tranchées et les boyaux, empêchant ainsi tout mouvement, situation que décrit parfaitement le rédacteur du JMO du 47e RI :

« L’encombrement des boyaux est encore augmenté. Aux blessés du 167e et du 47e, aux agents de liaison courant affolés à la recherche de leurs chefs de corps, sont venus s’ajouter les régiments de la 249e brigade. A 14 heures une attaque de 2 compagnies du 76e débouche péniblement de la tranchée 11 et est aussitôt arrêtée par le feu de l’ennemi. Personne ne l’appuie ou ne peut l’appuyer. »64

A la fin de la journée, le bilan est particulièrement lourd. Ne parvenant pourtant pas à déboucher des parallèles de départ engorgées, la 249e brigade déplore 29 disparus, 237 blessés, dont un colonel et un chef de bataillon, et 20 tués, dont un chef de bataillon65. Le 167e RI est pour sa part décimé : 9 officiers tués, 17 blessés et 10 disparus, terrible bilan auquel viennent s’ajouter 87 sous-officiers et hommes du rang tués, 505 blessés et 441 disparuse. Plus vers l’est sur le champ de bataille, le 168e RI déplore pour sa part plus de 1 200 disparus67. En comparaison, les pertes portées sur le JMO du 47e RI paraissent fades : 7 officiers et 224 hommes68. Pourtant, lorsque ces données sont rapportées au fait qu’un seul bataillon combat lors de cette offensive du 25 septembre 1915, on mesure combien cette attaque est dramatiquement meurtrière. Et encore, le bilan aurait sans doute pu être plus lourd sans des hommes comme Alphonse Baudoin69 ou Pierre-Marie Lec’hvien, aumônier du II/47e RI qui au soir du 25 septembre 1915 franchit le réseau de barbelés pour relever des blessés et ainsi, à en croire la citation à l’ordre du régiment qui à cette occasion le distingue, sauver « la vie à plusieurs soldats »70. Outre le commandant Joseph dont on a vu plus haut qu’il est probablement tué sur le Bois en dents de scie, le 47e RI déplore la disparition du sous-lieutenant Vasseur de la 10e compagnie, un nordiste sorti du rang à la faveur du conflit qui sera déclaré tué à l’ennemi à Servon par un jugement déclaratif délivré en 1921 par le tribunal de Douai71. Le lieutenant Gaudel et le sous-lieutenant Barthe sont eux portés blessés sur le JMO de l’unité, de même que le sous-lieutenant Saint-Mleux, mutilé à la jambe gauche72. En comparaison, le capitaine René Guihaire parait bien chanceux : lui aussi porté disparu au soir du 25 septembre 1915, il est en réalité capturé par les Allemands et n’est rapatrié en France qu’en janvier 191973.

Parti diminué à l’assaut lors de cette offensive du 25 septembre 1915, le 47e RI ressort donc affligé de lourdes pertes à l’issue de ces combats qui, pourtant, sont assez brefs. C’est en définitive la preuve que bien que garnissant en apparence les rangs, la politique de récupération ne parvient pas à pallier les lacunes tactiques de l’armée française.

 

Panser ses plaies et préparer l’hiver

Pourtant, bien que très affaibli, le 47e RI ne peut rompre le combat. Au contraire, il doit panser ses plaies en prévision de la campagne d’hiver qui s’annonce. Pour ce faire, il reconstruit ses défenses et entreprend de nombreux travaux de « réparation des tranchées et abris qui ont beaucoup souffert » lors de l’attaque du 25 septembre74. Mais surtout, il comble les vides dans les rangs.

A propos de l’encadrement

La nature militaire ayant en effet en horreur le vide, le 47e RI masque ses pertes de deux manières. La première consiste en de nombreux renforts en provenance du dépôt : 50 hommes aux ordres du sous-lieutenant Graf le 8 octobre 1915, 144 hommes le 15 octobre, 109 le 18 octobre, 84 le 20 octobre et 137 le 30 octobre 191575. Malheureusement, en l’état actuel de nos recherches, il n’est pas possible de se livrer à une analyse plus fine de ces nouveaux venus, enquête qui aurait pu éventuellement révéler un nouvel abaissement des critères physiques permettant l’envoi sur le front ou une plus large ouverture au recrutement régional. En effet, il n’existe à notre connaissance aucune liste nominative concernant ces renforts, document qui aurait pu permettre un recours aux registres matriculaires massivement mis en ligne à l’occasion du centenaire de la Première Guerre mondiale.

En Argonne en janvier 1916. BDIC: VAL 130.T944.

Une autre manière pour le 47e RI d’effacer les pertes concédées le 25 septembre 1915 est de reconstituer ses cadres. Mais le tableau de constitution de l’unité publié à la date du 1er octobre 1915 peine à taire la pénurie d’officiers, tant subalternes que supérieurs. En effet, là où le 1er août 1914 les douze compagnies du 47e RI sont commandées par des capitaines, cette proportion chute à seulement 33% à la date du 1er octobre 1915. La situation est même pire que le 24 septembre 1914, alors que le 47e RI se relève à peine de dramatiques batailles à Charleroi, Guise et sur le fort de la Pompelle. En effet, à ce moment, une compagnie sur deux demeure commandée par un capitaine, les restantes étant aux mains d’un lieutenant. Au 1er octobre 1915, quatre compagnies sont aux ordres d’un sous-lieutenant, cette responsabilité échouant même à des réservistes tels Alfred Burckhardsmeyer76.

Ajoutons toutefois que ce relatif affaiblissement des cadres, et selon toute vraisemblance de la troupe, si l’on veut bien se référer aux critères en vigueur lors de la mobilisation générale, n’est le propre ni du 47e RI, ni même de l’armée française. La capture, le 11 décembre 1915, d’un déserteur allemand permet en effet de disposer d’intéressantes informations concernant la 12e compagnie du 83e régiment de Landwehr, unité occupant les positions situées de l’autre côté du no man’s land. Passablement éprouvée lors de l’attaque du 25 septembre, elle déplore la perte d’environ 60 hommes et reçoit très rapidement des renforts afin de garnir les rangs. Mais, là aussi, les nécessités du moment semblent conduire à une brusque révision, à la baisse, des critères de recrutement puisqu’un tiers de la troupe de cette unité de Landwehr, ou réserve de l’armée active allemande, est en réalité composée d’homme de la Landsturm, ou réserve de l’armée territoriale allemande77. Ajoutons de surcroît que les renseignements donnés par Paul Friedrich Neumann lors de son interrogatoire corroborent toute une série de débriefings menés sur d’autres soldats allemands capturés à la même période et qui tous confirment ces changements dans le recrutement même si des différences peuvent exister. Le 85e régiment de Landwher semble ainsi recruter de jeunes, voire de très jeunes soldats, engagés volontaires des classes 1916, 1917 et même 191878.

Une décélération du temps

Mais la ressemblance avec l’armée allemande ne s’arrête pas là. A partir du 30 septembre 1915, alors que le général Joffre siffle la fin de l’offensive, la fameuse percée tant espérée repérée au Bois des Tantes se révélant n’être qu’un « trou de souris »79, une même décélération du cours des événements semble s’emparer de toute la chaîne de commandement, du généralissime à un niveau aussi subalterne et opératif que le 47e RI. Même les Allemands sont emportés par ce ralentissement de cadence et le résultat sur le terrain ne tarde pas à se faire attendre, ce dont atteste parfaitement le vocabulaire employé par le rédacteur du JMO du 47e RI. Entre le 3 octobre et le 31 décembre 1915 apparaissent en effet à de nombreuses reprises des expressions telles que « secteur calme », « rien de particulier », « rien à signaler » ou encore « sans incident »80. Bien entendu, le live and let live system a ses limites et on assiste de temps à autres à un regain d’activité. Ainsi, le 30 octobre, le rédacteur du JMO du 47e RI note que le secteur occupé par l’unité est « copieusement arrosé de projectiles de tout calibre pendant toute la journée », opération cependant sans suite puisque le lendemain il n’y a « rien à signaler »81. A la mi-novembre 1915, l’artillerie, notamment lourde, allemande se fait plus présente mais sans pour autant être suivie d’assauts d’infanterie82. En effet, toutes les opérations ennemies mentionnées à cette période par le JMO de la 40e brigade ont pour objectif le renforcement des défenses accessoires83, comme si la saison de la percée s’achevait pour de nouveau laisser place à celle de la poliorcétique. Une rapide analyse lexicographique des rapports quotidiens de renseignements produits par l’état-major du 10e corps d’armée confirme d’ailleurs cette tendance. Pour le seul mois d’octobre 1915, l’expression « travaux de terrassement » pour qualifier l’activité ennemie est ainsi employée 11 fois, la mention de « fils de fer » revenant 9 fois, celle de « défenses accessoires » 6 fois84. Il est vrai que certains bruits ne trompent pas, notamment lorsque les hommes de la tranchée T10 occupée par le 47e RI entendent distinctement « les Allemands planter des piquets »85, signe indéniable de déploiement de réseau Brun. En définitive, l’impression produite par ce début d’automne 1915 est bien celle d’une entrée dans une certaine torpeur propre à la campagne d’hiver qui s’annonce.

Il convient toutefois de ne pas se laisser tromper par une source qui, derrière un impératif de neutralité et d’objectivité86, ne fait jamais que refléter la subjectivité de celui qui la rédige. Ainsi, la comparaison du JMO du 47e RI avec ceux de la 40e brigade et de la 20e division d’infanterie laisse apparaître des choix lexicaux différents pour décrire une réalité du champ de bataille qui est pourtant la même87. De même, il convient de garder en tête que tous les documents n’ont pas la même fonction, ce qui doit inviter à une certaine prudence. Les comptes rendus journaliers de renseignement du 10e corps donnent ainsi l’impression d’une activité soutenue, mentionnant chaque tir de mortier ou le moindre lancer de grenade.  C’est même précisément ce qui justifie leur tenue quotidienne : informer de l’activité de l’ennemie dans ses moindres faits et geste. Le contraste est dès lors d’autant plus grand qu’en comparaison, le rédacteur du JMO du 47e RI n’a, dans le même temps, pas nécessairement grand-chose à consigner. Or perdre de vue cette différence de fonction entre ces deux sources peut incontestablement aboutir à une sorte d’effet de loupe pouvant induire en erreur sur la réalité de la portion de front qu’occupe l’unité à l’automne 1915. Certes, le 47e RI n’est pas inactif. Au contraire, il continue à entreprendre de nombreux travaux dans les secteurs dont il a la charge. Outre la continuation de tranchées et de boyaux de première ligne, on note ainsi la mise en chantier de plusieurs « ouvrages » fortifiés dont un porte le nom du lieutenant-colonel Leroy commandant le 169e RI, tué lors de l’attaque du 25 septembre 191588. Pour les aider dans ces tâches éprouvantes, les hommes reçoivent même le concours d’une compagnie du génie, preuve d’une liaison interarmes sans cesse plus importante sur ce champ de bataille qui se base désormais moins sur la baïonnette que la pelle89. Pour autant, il n’en demeure pas moins que la guerre, activité encore très saisonnière, entre en cet automne 1915 dans un nouveau cycle, beaucoup plus lent que celui de la période mai-septembre 1915 et caractérisé par une baisse sensible des velléités offensives des belligérants. Mobilis in immobile, le 47e RI n’est pas épargné par ce changement et se fond rapidement dans ce nouveau rythme, prenant les tranchées pendant une quinzaine de jours puis partant en cantonnement de repos pendant une grosse semaine. Comparable à une sorte d’assolement triennal du champ de bataille, ce nouvel emploi du temps ne doit rien à l’improvisation est en réalité minutieusement détaillé dans un ordre de la 20e DI porté le 1er décembre 1915 sur le JMO du 47e RI. Désormais, le secteur de la division est scindé en deux sous-secteurs confiés chacun à un binôme et au sein desquels les régiments permutent, se relevant mutuellement. Pour une raison que l’on ignore, cette organisation ne reprend pas la structuration des brigades puisque le 47e RI fait équipe avec le 25e de Cherbourg tandis que Granville fait équipe avec Saint-Lô90. Mais là n’est sans doute pas le plus important. Comme s’il se préparait à hiverner, le régiment vit désormais à un rythme ralenti mais régulier. L’organisation du secteur prescrit en effet que non seulement les régiments « alternent toujours entre eux » mais que « les mêmes bataillons reprennent toujours les mêmes quartiers »91, instaurant ainsi une indéniable routine dans la campagne. Dans le même temps, les permissions reprennent à partir du 18 octobre 1915 à hauteur de 5% des effectifs totaux du 47e RI92. C’est d’ailleurs ce qui conduit le colonel Bühler à prendre pour quelques jours le commandement de la 40e brigade, le colonel Simon étant parti au début du mois de novembre  en permission93.

A Vienne-le-Chateau, un poilu apporte à des civils un sapin d'Argonne, décembre 1915. BDIC: VAL 130.T810.

Sans surprise, un tel changement de rythme s’accompagne d’une baisse importante de la mortalité. On ne recense en effet que 9 militaires du 47e RI tués à l’ennemi et titulaires de la mention « mort pour la France » pour la période courant du 1er octobre au 31 décembre 1915e. Et encore, ces chiffres doivent être revus à la baisse du fait d’un certain nombre d’incohérences relevées dans les sources. Félix Harel a ainsi dû être enlevé de ce corpus puisque la date de décès mentionnée – 2 octobre 1915 – sur sa fiche de mort pour la France correspond en réalité à la découverte de sa dépouillee. Le cas de Jean Gloro est lui plus complexe. Ce fantassin est en effet répertorié comme tué à l’ennemi le 24 novembre 1915 en application d’un avis de décès provenant du bureau des archives administratives qui le mentionne comme mort pour la France à Duisans, non loin d’Arras96. Dès lors, de deux choses l’une : ou l’intéressé décède en Champagne lors de l’automne 1915, ou ses jours s’achèvent quelques mois plus tôt en Artois. Toutefois, en l’absence d’informations supplémentaires, qui auraient notamment pu être fournies par la base des sépultures de guerre du portail Mémoire des hommes, il est impossible de trancher. Tel n’est en revanche pas le cas de Jean Raoult : bien que répertorié comme mort pour la France « antérieurement au 11 novembre 1915 » à Roclincourt, il est possible de faire remonter son décès au printemps 1915 puisque son nom figure parmi les dépouilles inhumées en la nécropole Notre-Dame de Lorette97. Si dans ce cas le doute n’est plus permis, tel n’est pas le cas pour Marcel Lamoureux : certes, la base de données des sépultures de guerre recense deux notices à ce nom mais aucune ne correspond à ce soldat de 2e classe du 47e RI né à Montdidier. En conséquence, là encore, il est impossible de déterminer s’il décède au printemps ou en automne 1915, et donc en Artois ou en Champagne98. Au final, ce ne sont que cinq fantassins du 47e RI que l’on peut répertorier avec certitude comme tués à l’ennemi et titulaires de la mention « Mort pour la France » au titre de la période 1er octobre – 31 décembre 1915.

Ce chiffre contraste grandement avec les semaines précédant l’offensive du 25 septembre 1915 où le JMO, ne relevant que peu de morts, pouvait à tort faire croire à une période calme. Il n’est ici plus question d’un effet de source mais bel et bien d’une baisse de rythme du conflit. La situation est telle qu’à dire vrai, l’ennemi n’est plus tant l’Allemand que l’eau. Les précipitations sont tellement importantes que le rédacteur du JMO de la 40e brigade note, le 2 décembre, que les « travaux sont gênés par la pluie ». Dans les jours qui suivent, cet officier précise que les intempéries, en plus de causer la crue de l’Aisne toute proche et d’inonder la plupart des cagnas, provoque de « nombreux éboulements dans les tranchées, boyaux et abris »99. Dans le secteur qu’occupe le 47e RI, la situation est telle que l’on croit à la noyade d’un poilu de la 4e compagnie lorsque Victor Ridereau est porté manquant à l’appel. Si l’infortuné est en réalité prisonnier des Allemands – sans doute se sera-t-il perdu  au cours d’une liaison – une telle anecdote dit bien les conditions extrêmes que doivent affronter les fantassins lors de cet hiver 1914-1915100.

 

Dans un ouvrage devenu aujourd’hui un véritable classique de l’historiographie de la Première Guerre mondiale, M. Goya avance l’idée que « le pari humain français des masses animées d’un moral à toute épreuve n’était peut-être pas si fou »101, comme en témoigne notamment le fameux « miracle » de la première bataille de la Marne. Mais l’exemple du 47e RI lors de l’offensive du 25 septembre 1915 en Champagne montre qu’un an plus tard l’armée française parvient au bout de ce « pari » des « expériences à coup d’hommes » menées dans un contexte général de crise des munitions102. Si la politique de récupération permet de combler les vides dans les rangs, l’analyse des pertes des semaines, pourtant plutôt calmes au regard du JMO, précédant l’offensive d’automne – enquête rendue possible par la mise en ligne des registres matriculaires du recrutement – montre un incontestable abaissement des critères physiques de recrutement. Or, ce choix de la quantité sur la qualité, si on nous permet de nous exprimer en ces termes, se révèle d’autant plus dramatique que la doctrine d’emploi des troupes, et tout particulièrement la densification du front, ne permet pas encore de résoudre l’équation tactique posée par le siège mutuel qu’est la guerre des tranchées.

De même, le « calme » qui s’empare de nouveau du 47e RI à partir du 30 septembre 1915 ne doit pas tromper. La préparation de la campagne d’hiver marque moins pour l’historien un changement d’année calendaire que la fin du « long 1915 »103 et l’entrée dans une nouvelle période, celle de la Materialsclacht, de la « bataille de matériel » pour reprendre l’expression forgée par Hindenbourg et Ludendorff en septembre 1916 lors d’une visite sur le front de la Somme104. C’est donc bien un changement de paradigme qui se prépare lors de cet hiver 1915-1916.

Il serait dès lors tentant d’insister sur la dimension fondamentalement industrielle de la violence de la Première Guerre mondiale et sur cette configuration inédite du champ de bataille qui, balayé par l’artillerie, les mitrailleuses et les gaz, quand il n’est pas soufflé par les mines, n’accorde plus de place au combattant. Pourtant, le recours à la monographie régimentaire confirme tout l’intérêt d’un autre pari, celui de « la microanalyse et de la complexité »105. Dramatique, l’offensive du 25 septembre 1915 laisse en effet le 47e RI comme groggy, saoulé par la violence du choc, comme en hibernation. Car c’est bien en définitive une nouvelle saison de la guerre qui débute au lendemain de cette attaque, rappelant le caractère éminemment cyclique de l’activité guerrière. Or, quoi de plus naturel que le rythme des saisons ?

Erwan LE GALL

DoctorantCERHIO-CNRS UMR 6258

 

 

 

 

1 BECKER, Jean-Jacques, « L’Evolution de l’historiographie de la Première Guerre mondiale », Revue historique des armées, n°242, 2006, p. 4-15 rappelle que l’on « aurait eu le sentiment de rabaisser le soldat en disant que c’était le camion qui avait permis aux troupes françaises de tenir à Verdun, puis finalement de gagner la bataille ».

2 Anonyme, Historique officiel du 47e régiment d’infanterie, Saint-Servan, J. Haize, 1920.

3 Parmi de multiples références, distinguons HARDIER, Thierry et JAGIELSKI, Jean-François, Oublier l’apocalypse ? Loisirs et distractions des combattants pendant la Grande Guerre, Paris, IMAGO, 2014 ; LAFON, Alexandre, La Camaraderie au front. 1914-1918, Paris, Armand Colin / Ministère de la Défense, 2014 et CRONIER, Emmanuelle, Permissionnaires dans la Grande Guerre, Paris, Belin, 2013.

4 Sur cette période et les mois précédents, nous nous permettons de renvoyer à LE GALL, Erwan, Une entrée en guerre. Le 47e régiment d’infanterie de Saint-Malo au combat (août 1914 – juillet 1915), Talmont-Saint-Hilaire, éditions CODEX, 2014.

5 Il s’agit de la commune connue aujourd’hui sous le nom de Servon-Melzicourt mais uniquement dénommée dans les archives Servon. Pour une plus grande cohérence avec les textes originaux, nous avons décidé de garder cette appelation.

6 Sur la notion de « particule élémentaire » on se permettra de renvoyer à LE GALL, Erwan, Une entrée en guerre…, op. cit., p. 37-52.

7 SHD-DAT : 26 N 133/2, JMO 10e corps d’armée, 19 juillet 1915.

8 SHD-DAT : 26 N 636/7, JMO 47e régiment d’infanterie, 31 juillet 1915.

9 LE GALL, Erwan, Une entrée en guerre…, op. cit., p. 184.

10 SHD-DAT : 26 N 507/4, JMO 40e brigade, 12 août 1915.

11 AUDOIN-ROUZEAU, Stéphane, « 1915 : enlisement », in WINTER, Jay, La Première Guerre mondiale, Tome 1 : combats, Paris, Fayard, 2013, p. 81.

12 DUMENIL, Anne, « De la guerre de mouvement à la guerre de positions : les combattants allemands », in Horne, John (dir.), Vers la guerre totale, le tournant de 1914-1915, Paris, Tallandier, 2010, p. 59.

13 SHD-DAT : 26 N 301/1, JMO 20e division d’infanterie, 15 juillet 1915.

14 SHD-DAT : 26 N 636/7, JMO 47e régiment d’infanterie, 17-25 juillet 1915.

15 SHD-DAT : 26 N 636/7, JMO 47e régiment d’infanterie, 15-19 août 1915.

16 « Médaille militaire », Le Salut, 34e année, 15-16 octobre 1915, p. 2.

17 SHD-DAT : 26 N 636/7, JMO 4717 régiment d’infanterie, 21 et 22 août 1915.

18 Cette répartition des tâches tendant à placer l’infanterie en infériorité par rapport au génie est mentionnée par Eugène Lasbleis, un sapeur originaire de Lamballe portant les uniformes des 6e et 8e régiments du génie pendant la Grande Guerre. GUILLAUME, Agnès, HARDIER, Thierry et LASBLEIS, André (dir.), Les lettres de guerre du sergent Eugène Lasbleis (1915-1918), Moyenmoutier, EDHISTO / FSE Eluard, 2015, p. 113 notamment.

19 SHD-DAT : 26 N 301/1, JMO 20e division d’infanterie, 28 août 1915.

20 SHD-DAT : 26 N 636/7, JMO 47e régiment d’infanterie, 28 août 1915.

21 Arch. Dép. Manche : 5 Mi 1228 et 1 R 3/115.1148 ; Arch. Dép. I&V: 10 NUM 35288 1332 ;  Journal officiel de la République française, 22 juillet 1914 et 4 octobre 1920, p. 14799 ; SHD-DAT : 26 N 636/7, JMO 47e régiment d’infanterie, 28 août 1915, « Etat-civil », L’Ouest-Eclair, n°5718, 8 avril 1915, p. 3.

22 SHD-DAT : 26 N 636/7, JMO 47e régiment d’infanterie, 8 septembre 1915.

23 SHD-DAT : 26 N 636/7, JMO 47e régiment d’infanterie, 28 août 1915.

24 SHD-DAT : 26 N 636/7, JMO 47e régiment d’infanterie, 13 septembre 1915.

25 SHD-DAT : 24 N 396/3, Compte rendu journalier de renseignement, 13 septembre 1915.

26 SHD-DAT : 24 N 396/3 : Compte rendu journalier de renseignement, 4-23 septembre 1915 et 26 N 432/1, JMO 128e DI, 18 septembre 1915.

27 SHD-DAT : 26 N 301/1, JMO 20e division d’infanterie, 24 août 1915.

28 SHD-DAT : 26 N 301/1, JMO 20e division d’infanterie, 28 août et 8 septembre 1915.

29 SHD-DAT : 26 N 301/1, JMO 20e division d’infanterie, 3 et 7 septembre 1915.

30 SHD-DAT : 26 N 301/1, JMO 20e division d’infanterie, 15 septembre 1915.

31 VILLATOUX, Marie-Catherine, « Le renseignement photographique dans la manœuvre. L’exemple de la Grande Guerre », Revue historique des armées, n°261, 2010, p. 3-13.

32 SHD-DAT : 26 N 636/7, JMO 47e régiment d’infanterie, 18 septembre 1915.

33 BAVCC/Mémoire des hommes.

34 Arch. Dép. I&V : 1 R 1912.2008 ; BAVCC/Mémoire des hommes.

35 Pour de plus amples développements sur l’ensemble du conflit, on se permettra de renvoyer à LE GALL, Erwan, « Saint-Malo, la Bretagne, la France : des multiples inscriptions territoriales du 47e régiment d’infanterie », in BOURLET, Michaël, LAGADEC, Yann et LE GALL, Erwan (dir.), Petites patries dans la Grande Guerre, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2013, p. 63-79.

36 Arch. Dép. Corrèze : 1 R 1378.56 ; Arch. Dép. Nord : 1 R 2876.3709.

37 BOULANGER, Philippe, La France devant la conscription, géographie historique d’une institution républicaine, républicaine, 1914-1922, Paris, Economica, 2001, p. 118. 

38 Ajoutons qu’il s’agit là de données a minima puisque les cas de Golven, Le Gloux et Paul Alips restent encore bien nébuleux faute d’archives précises ou disponibles.

39 Arch. Dép. CdA : 1 R 1180.1567.

40 Arch. Dép. CdA : 1 R 1316.2272.

41 MAURIN, Jules, Armée, guerre, société, soldats languedociens (1889-1919), Paris, Publications de la Sorbonne, 1982, p. 40.

42 Arch. Dép. I&V : 1 R 1956.1000.

43 Arch. Dép. CdA : 1 R 1973.667.

44 BAVCC/Mémoire des hommes ; Arch. Dép. CdA : EC Bégard et 1 R 2001.1249.

45 Récupéré, Antoine Puydevois est classé service armé par la Commission de réforme de Tulle en date du 29 octobre 1914. Mobilisé au 100e RI de Tulle le 24 janvier 1915, il est affecté au 47e RI le 25 juin 1915, ce qui doit vraisemblablement correspondre à la fin de ses classes et à son arrivée au front. Arch. Dép. Corrèze : 2E_61_12 et 1 R 1378.56.

46 Arch. Mun. Saint-Malo : 21 S.

47 CRONIER, Emmanuelle, op. cit…

48 SHD-DAT : 26 N 636/7, JMO 47e régiment d’infanterie, 24 septembre 1915.

49 SHD-DAT : GR 11 J 872, affaire François Denès. Sur cette question on se permettra de renvoyer à LE GALL, Erwan, « La guerre comme série de mouvements ? Analyse à partir du cas 1914-1918 », En Envor, revue d’histoire contemporaine en Bretagne, n°3, hiver 2014, en ligne.

50 Ministère de la Guerre, état-major de l’armée, service historique, Les Armées françaises dans la Grande Guerre, Tome III, Annexes, 2e volume, Paris, Imprimerie nationale, 1925, annexe n°1458, ordre général n°166 pour l’attaque, p. 1010-1013.

51 SHD-DAT : 26 N 706/2, JMO 167e régiment d’infanterie, 25 septembre 1915.

52 SHD-DAT : 26 N 636/7, JMO 47e régiment d’infanterie, 25 septembre 1915.

53 SHD-DAT : 26 N 706/2, JMO 168e régiment d’infanterie, 25 septembre 1915 et 26 N 707/4, JMO 169e RI, 25 septembre 1915.

54 SHD-DAT : 26 N 636/7, JMO 47e régiment d’infanterie, 25 septembre 1915.

55 SHD-DAT : 26 N 706/2, JMO 167e régiment d’infanterie, 25 septembre 1915.

56 SHD-DAT : 26 N 636/7, JMO 47e régiment d’infanterie, 25 septembre 1915.

57 SHD-DAT : 26 N 636/7, JMO 47e régiment d’infanterie, 25 septembre 1915.

58 SHD-DAT : 26 N 636/7, JMO 47e régiment d’infanterie, 25 septembre 1915 ; BAVCC/Mémoire des hommes ; Arch. Nat. : LH/1374/82 ; Archives en ligne du CICR.

59 « Remise de décoration », Le Salut, 34e année, n°75, 28-29 septembre 1915, p. 1.

60 PEDRONCINI, Guy, Pétain. Le soldat, 1914-1940, Paris, Perrin, 1998, p. 84-86.

61 SHD-DAT : 26 N 636/7, JMO 47e régiment d’infanterie, 25 septembre 1915.

62 SHD-DAT : 26 N 646/5, JMO 249e brigade, 25 septembre 1915.

63 SHD-DAT : 26 N 432/1, JMO 128e division d’infanterie, 25 septembre 1915.

64 SHD-DAT : 26 N 636/7, JMO 47e régiment d’infanterie, 25 septembre 1915.

65 SHD-DAT : 26 N 646/5, JMO 249e brigade, 25 septembre 1915.

66 SHD-DAT : 26 N 706/2, JMO 167e régiment d’infanterie, 25 septembre 1915.

67 SHD-DAT : 26 N 706/6, JMO 168e régiment d’infanterie, 25 septembre 1915.

68 SHD-DAT : 26 N 636/7, JMO 47e régiment d’infanterie, 28-29 septembre 1915.

69 Brancardier de la 1/47e RI originaire d’Erquy, Alphonse Baudoin est cité à l’ordre du régiment pour s’être porté « spontanément en avant des parallèles, relever, malgré la fusillade, un soldat blessé d’un autre régiment ». « Citation », Le Moniteur des Côtes-du-Nord, 46e année, n°4, 22 janvier 1916, p. 3.

70 « Le clergé à la guerre », L’Ouest-Eclair, n°6043, 30 décembre 1915, p. 4 ; « A l’ordre du jour », Dieu et patrie, n°58, 2 janvier 1916, p. 91. 71 BAVCC/Mémoire des hommes ; Arch. Dép. Nord : 1 R 3013.1802.

72 SHD-DAT : 26 N 636/7, JMO 47e régiment d’infanterie, 28-29 septembre 1915 ; Arch. Dép. I&V : 1 R 2083.116.

73 Arch. Dép Loire-Atl. : 1 R 239.2386.

74 SHD-DAT : 26 N 636/7, JMO 47e régiment d’infanterie, 26-29 septembre 1915.

75 SHD-DAT : 26 N 636/7, JMO 47e régiment d’infanterie, octobre 1915.

76 SHD-DAT : 26 N 636/6 et 7, JMO 47e régiment d’infanterie, tableaux de constitution du régiment, 1er août 1914, 24 septembre 1914 et 1er octobre 1915.

77 SHD-DAT : 26 N 636/7, JMO 47e régiment d’infanterie, 11 décembre 1915.

78 SHD-DAT : 24 N 396, dossier 4, rapport sur l’interrogatoire des prisonniers faits à l’attaque du 25 septembre 1915, interrogatoire du prisonnier Kastler daté du 22 octobre 1915 et compte rendu d’interrogatoire de Richard Pawlick daté du 6 décembre 1915.

79 PORTE, Rémy, Joffre, Paris, Perrin, 2014, p. 278.

80 SHD-DAT : 26 N 636/7, JMO 47e régiment d’infanterie, 3 octobre - 31 décembre 1915.

81 SHD-DAT : 26 N 636/7, JMO 47e régiment d’infanterie, 30-31 octobre 1915.

82 SHD-DAT : 26 N 636/7, JMO 47e régiment d’infanterie, 9-17 novembre 1915.

83 SHD-DAT : 26 N 507/4, JMO 40e brigade, novembre 1915.

84 SHD-DAT : 24 N 396/3, comptes rendus journaliers de renseignements, octobre 1915.

85 SHD-DAT : 26 N 636/7, JMO 47e régiment d’infanterie, 15 novembre 1915.

86 On se rapportera ainsi aux « instructions pour la rédaction des historiques des corps de troupe » et notamment aux « observations générales » figurant en préambule du journal des marches et opérations du 47e régiment d’infanterie. SHD-DAT : 26 N 636/7, JMO 47e régiment d’infanterie.

87 SHD-DAT : 26 N 507/4, JMO 40e brigade, 3 octobre – 31 décembre 1915 et 26 N 301/2 : JMO 20e division, 3 octobre – 31 décembre 1915.

88 SHD-DAT : 26 N 636/7, JMO 47e régiment d’infanterie, 7 octobre 1915.

89 SHD-DAT : 26 N 636/7, JMO 47e régiment d’infanterie, 14 octobre 1915.

90 SHD-DAT : 26 N 636/7, JMO 47e régiment d’infanterie, 1er décembre 1915.

91 SHD-DAT : 26 N 636/7, JMO 4791 régiment d’infanterie, 1er décembre 1915.

92 SHD-DAT : 26 N 636/7, JMO 47e régiment d’infanterie, 18 octobre 1915.

93 SHD-DAT : 26 N 301/2, JMO 20e division d’infanterie, 7 novembre 1915. Cet intérim prend fin le 18 novembre 1915.

94 BAVCC/Mémoire des hommes.

95 BAVCC/Mémoire des hommes et Arch. Dép. I&V : 1 R 1978.610.

97 Arch. Dép. CdA : 1 R 1453.1624.

97 BAVCC/Mémoire des hommes ; Arch. Dép. CdA : 1 R 1314.1394.

98 Arch. Dép. Somme : 5 Mi_D812 et Arch. Dép. Aisne : 22 R 08.109.

99 SHD-DAT : 26 N 507/4, JMO 40e brigade, 2-4 décembre 1915.

100 SHD-DAT : 26 N 636/7, JMO 47e régiment d’infanterie, 1er décembre 1915 confirmé par Arch. CICR : RID 108040.

101 GOYA, Michel, La Chair et l’acier, l’invention de la guerre moderne, 1914-1918, Paris, Tallandier, 2004, p. 173.  

102 « Entre les obus et les fantassins, ce sont les obus qui sont les plus rares. Ainsi les offensives de [la fin] 1914 et 1915 ressemblent-elles à des expériences à coup d’hommes. Le souci d’économiser l’infanterie n’intervient véritablement que vers la fin de l’année 1915. » Ibid., p. 219.

103 HORNE, John, « De la guerre de mouvement à la guerre de positions : les combattants français », in HORNE, John (dir.), Vers la guerre totale, op. cit…, p. 79.

104 AUDOIN-ROUZEAU, Stéphane et BECKER, Annette, 14-18, retrouver la guerre, Paris, Folio, 200, p. 48.

105 SALSON, Philippe, L’Aisne occupée. Les civils dans la Grande Guerre, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2015, p. 273.